Mineurs isolés étrangers : « Mes petits gars ne peuvent pas travailler »

Mineurs isolés étrangers : « Mes petits gars ne peuvent pas travailler »

Abdoulaye Konaté, Samuel Diallo et Sagata Diakité sur leur lieu d'apprentissage du métier de bordureur à La Courneuve le 6 février.
Abdoulaye Konaté, Samuel Diallo et Sagata Diakité sur leur lieu d’apprentissage du métier de bordureur à La Courneuve le 6 février. CAMILLE MILLERAND / DIVERGENCE

L’histoire relèverait de l’anecdote si elle ne se déroulait pas dans un territoire où les questions migratoires sont centrales. Avec 1 500 mineurs isolés étrangers pris en charge par les services de la protection de l’enfance (trois fois plus qu’en 2015), la Seine-Saint-Denis est le troisième département concerné par les flux migratoires de jeunes non accompagnés.

Autant de personnes dont l’insertion professionnelle est un enjeu central. Or, un des patrons de société de Saint-Denis, Francis Dubrac, à la tête d’une entreprise de travaux publics presque centenaire, Dubrac TP, reproche à la préfecture de ne pas l’autoriser à recruter une vingtaine de ces mineurs en apprentissage.

Alors que les grands chantiers des Jeux Olympiques de 2024, mais aussi du réseau de transport Grand Paris Express ou de rénovation urbaine, lui font convoiter de beaux marchés, Francis Dubrac n’arrive pas à embaucher de manœuvres et autres maçons de voirie dans le cinquième département le plus peuplé de France (plus de 1,6 million d’habitants).

Besoins de main-d’œuvre

D’aussi loin qu’il se souvienne, ce patron sait que les vagues migratoires, du Maghreb, du Portugal et du Mali, sont souvent venues répondre aux besoins de main-d’œuvre de l’entreprise familiale spécialisée dans l’aménagement de route. Les effectifs se renouvelaient par « cooptation », les personnels étaient formés par « compagnonnage » dans cette entreprise gérée de façon paternaliste, même si son dirigeant goûte peu cette qualification.

« Mais tous ceux qui dépassent la deuxième génération d’immigration, ils ne veulent plus bosser dans le BTP, constate-t-il depuis un moment. On embauche dix jeunes de quartier, il en reste cinq à l’arrivée. »

« Ce sont des gamins ponctuels, courageux, qui s’intègrent dans les équipes sans problème », note Francis Dubrac, à la tête d’une boîte de travaux publics.

Pour faire face à ses besoins d’embauches croissants, M. Dubrac, qui est aussi vice-président de la Chambre des métiers de l’artisanat du département, décide de mettre sur pied une formation de maçon de voirie par alternance et mobilise les acteurs locaux autour de lui (organismes de formation et intercommunalité) pour constituer une promotion d’une trentaine d’élèves. L’initiative rencontre un succès en demi-teinte, car seuls dix-sept apprentis signent. « Comme pour plein de métiers pénibles, peu valorisants, il y a une grosse problématique de main-d’œuvre », reconnaît Anne Gillet, mandatée par l’intercommunalité Plaine Commune pour accompagner cette démarche.

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LJD

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