L’ex-directrice du régime de garantie des salaires n’obtient pas le statut de lanceuse d’alerte
C’est un coup dur pour celle qui affirmait avoir révélé le scandale des entreprises en difficulté. Mardi 7 novembre, Houria Aouimeur, l’ancienne directrice nationale du régime de garantie des salaires AGS, a été déboutée de toutes ses demandes par le conseil de prud’hommes de Paris. Elle réclamait, en particulier, le statut de lanceuse d’alerte dans une affaire de détournement de fonds, mais les juges, saisis en référé, ont refusé de lui donner gain de cause.
Cette décision constitue un nouveau rebondissement dans un dossier à tiroirs particulièrement complexe. Tout commence à l’automne 2018, lorsque Mme Aouimeur prend les rênes du régime AGS, un organisme de protection sociale au fonctionnement très atypique. Il permet aux salariés de sociétés battant de l’aile ou liquidées de continuer à être payés. L’argent est mis à disposition de mandataires judiciaires qui le redistribuent ensuite aux travailleurs concernés. Le dispositif est gouverné par une association patronale, tout en étant rattaché à l’Unédic, l’association paritaire qui gère l’assurance-chômage.
Début 2019, un audit réalisé par le cabinet E & Y, à la demande de Mme Aouimeur, juste après son recrutement à l’AGS, révèle des anomalies susceptibles de mettre en cause le prédécesseur de la directrice nationale (favoritisme à l’égard d’une société d’avocats et de prestataires de services de communications, etc.). Des plaintes sont déposées en mars 2019, notamment par le Medef et par l’Unédic, pour « corruption active et passive, prise illégale d’intérêt »…
Au fil des mois, les soupçons s’élargissent à d’autres protagonistes – en particulier à des administrateurs et mandataires judiciaires qui auraient été impliqués dans des manœuvres frauduleuses avec l’ancienne équipe à la tête de l’AGS. Une deuxième série de plaintes est déposée, fin 2019, pour « abus de confiance, faux et usage de faux »… En parallèle, Mme Aouimeur confie un autre audit au cabinet Advolis, qui s’interroge sur l’emploi de plusieurs milliards d’euros ayant transité entre les mains de mandataires judiciaires entre 2013 et 2018.
Le dossier n’est pas clos
L’affaire prend une nouvelle dimension lorsque l’Unédic – l’employeur des personnels du régime AGS, donc de Mme Aouimeur – s’intéresse aux « frais de mission, de réception et de déplacement » de la directrice nationale et de ses proches collaborateurs. Une première « évaluation » met en évidence des dépenses très élevées : notes de restaurants, courses en taxis… Une autre expertise – du cabinet PwC – parvient à des constats similaires tout en pointant du doigt des contrats et marchés passés avec des prestataires dans des conditions irrégulières. Du fait de tous ces « manquements », l’Unédic – qui est le patron de Mme Aouimeur – décide de la licencier, en février, pour « faute lourde ».
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