« Les fermetures de petits commerces risquent de ruiner en partie l’ambition de renforcer la cohésion des territoires »

« Les fermetures de petits commerces risquent de ruiner en partie l’ambition de renforcer la cohésion des territoires »

Une femme passe devant un magasin fermé, à Paris, le 6 novembre.

Chronique. Hélène Wasselin a eu une belle idée pour dénoncer la fermeture des petits commerces jugés « non essentiels » par le gouvernement dans le cadre de la lutte contre l’épidémie de Covid-19 : photographier dans son salon de coiffure Esquisse de soi de Boulogne-sur-mer (Pas-de-Calais), torse nu et de dos, ses collègues victimes comme elle de ce couperet administratif, puis les poster sur les réseaux sociaux avec ces mots : « La Covid nous met à terre ! L’Etat nous met à poil ! » Cette indépendante est aussi conseillère municipale (PS). Il arrive parfois que la boutique et la politique fassent cause commune.

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Cette décision, « c’est un crève-cœur pour moi », a confessé le premier ministre, Jean Castex. On veut bien croire l’ancien maire de Prades, dans les Pyrénées-Orientales. Et les milliers d’élus, toutes couleurs politiques confondues, qui s’inquiètent de voir leur cœur de ville s’arrêter définitivement de battre. De Béziers à Aurillac et de Chalon-sur-Saône à Argenton-sur-Creuse, ils ont manifesté et pris des arrêtés municipaux – aussi symboliques qu’illégaux – pour autoriser l’ouverture de tous les magasins. Et certains ont trouvé un bouc émissaire facile, Amazon, accusé de prospérer sur la misère de la boutique.

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Pas de doute, le géant du commerce en ligne a tiré un énorme profit de la crise sanitaire, amplifiant les craintes d’un petit commerce en retard de numérisation et celles des grandes surfaces. Sa capitalisation boursière a gonflé de 500 milliards d’euros depuis le début de la pandémie pour atteindre 1 400 milliards. Il a déjà avalé 20 % des parts du marché français des ventes en ligne, et l’e-commerce ne redescendra pas à son niveau d’avant-Covid. Le groupe de Jeff Bezos continue de tisser sa toile, avec le soutien d’élus bénissant les centaines d’emplois créés dans ses « usines à colis » de 50 000 m2 sur plusieurs étages, ses centres de tri et ses points de livraison, qui écoulent aussi quantité de produits made in France.

« L’humanité de notre cité »

Y a-t-il de quoi réveiller la guerre des « petits » contre les « gros », vigoureuse dans les années 1950-1970 ? Ou relancer le mouvement des « gilets jaunes », comme s’en inquiète un ministre ? « L’insurrection, nous ne la prônerons pas », rassure le président de la Confédération des commerçants de France, Francis Palombi, après le défilé de 500 d’entre eux à Bayonne. Pas de nouveau Pierre Poujade dénonçant des « trusts apatrides » ni de Gérard Nicoud, ces leaders populistes qui ont fédéré la colère des indépendants contre le fisc, la Sécu et les hypers. La grande distribution, elle-même en crise, s’est jointe aux attaques contre les purs acteurs d’e-commerce et tente de ranimer des boutiques… qu’elle a contribué à asphyxier.

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LJD

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