Les erreurs stratégiques du PDG historique Gérard Mestrallet ont pesé sur Engie

Les erreurs stratégiques du PDG historique Gérard Mestrallet ont pesé sur Engie

Gérard Mestrallet, ancien président du conseil d’administration d’Engie, lors de l’assemblée de l’énergéticien, en 2017.
Gérard Mestrallet, ancien président du conseil d’administration d’Engie, lors de l’assemblée de l’énergéticien, en 2017. ERIC PIERMONT / AFP

Une femme à abattre. Sans doute est-ce ainsi que les partisans d’Isabelle Kocher – et la directrice générale d’Engie elle-même – présenteront l’éviction de la seule dirigeante du CAC 40 au terme d’un mandat de quatre ans. Ils n’auront pas vraiment tort. L’histoire du patronat français ne manque pas de PDG masculins qui ont conservé longtemps leur fauteuil malgré un bilan sans relief, voire mauvais. Mais cette seule explication est évidemment trop courte.

Lire notre récit : Comment Kocher a perdu la bataille d’Engie

Mme Kocher n’a pas toujours fait preuve de doigté dans ses relations au sein d’Engie, où beaucoup de têtes ont valsé dès son arrivée. Quand elle devient directrice générale, en mai 2016, elle assoit vite un pouvoir sans partage en reléguant au second plan son président, Gérard Mestrallet, qui a créé le géant de l’énergie en mariant Suez à Gaz de France en 2008. Faire cela à un cacique du CAC 40 ! Et l’homme qui vous a poussé au sommet, qui plus est ! Imagine-t-on Henri de Castries, sitôt arrivé à la tête d’Axa, tuer ainsi son « père », Claude Bébéar ?

« La vieille garde industrielle »

Mme Kocher hérite alors d’un groupe en difficulté : 4,6 milliards d’euros de pertes en 2015. Rebaptisé Engie, il n’a négocié son virage « vert » que deux ans plus tôt, quand M. Mestrallet a décidé de « déprécier le monde ancien » en tirant un trait sur 15 milliards d’euros d’actifs dans ses comptes, puis sur quelques milliards l’année suivante. « On ne peut pas s’accrocher au monde ancien, déclarait-il alors au Monde. Je veux investir dans le monde nouveau, qui passe par notre implication dans la transition énergétique en Europe. »

En 2012-2013, il avait ferraillé à Bruxelles contre les subventions à l’éolien et au solaire autorisées par la Commission européenne

Mais, en 2012-2013, il avait ferraillé à Bruxelles contre les subventions à l’éolien et au solaire autorisées par la Commission européenne, qui l’avaient obligé à fermer de nombreuses centrales électriques au gaz. « On est allé trop vite et trop loin sur les renouvelables », affirmait-il. Au début de la décennie 2010, il avait également renforcé ses positions dans la production d’électricité à partir d’énergies fossiles en achetant le britannique International Power pour 28 milliards d’euros. Loin d’une stratégie bas carbone.

Mme Kocher a pressé le mouvement en 2016, en cédant une bonne partie de ses centrales au charbon, les plus polluantes et émettrices de CO2. Pour l’un de ses soutiens inattendus, le député européen Europe Ecologie-Les Verts Yannick Jadot, elle se heurte à la « vieille garde industrielle de ce pays », moins soucieuse qu’elle d’accélérer la transition énergétique. Ce rythme plus soutenu semble, pourtant, satisfaire les analystes des grandes banques, qui ont récemment publié des notes optimistes sur le potentiel de rebond du titre.

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LJD

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