« Le télétravail creuse les inégalités entre les travailleurs, entre les sexes, entre les pays »
C’est reparti. En Europe, à mesure que les pays réintroduisent des restrictions pour lutter contre la pandémie, des millions de salariés reprennent le chemin de la maison. Pour beaucoup, le télétravail va redevenir la norme pendant de longues semaines encore. Il est bien sûr trop tôt pour dire jusqu’à quel point, et à quel degré, celui-ci se prolongera lorsque le Covid-19 sera sous contrôle. Mais le plus probable est qu’il se stabilisera à un niveau plus élevé que celui d’avant-crise. Avec ses avantages : plus de flexibilité pour les salariés, lorsqu’il est bien organisé par l’entreprise. Et ses inconvénients : il est susceptible de creuser un certain nombre d’inégalités, à court comme à moyen terme.
Plus les restrictions se prolongeront, plus ceux pour qui le télétravail est impossible (en particulier dans le commerce, l’hôtellerie-restauration, le tourisme) risquent de perdre leur emploi, de voir leurs revenus diminuer ou de se retrouver au chômage technique.
Difficultés dans les pays émergents
Dans une publication sur le sujet, des économistes du Fonds monétaire international (FMI) estiment que près de 100 millions de travailleurs au sein de 35 pays développés et émergents, soit 15 % de la population active concernée, sont dans une telle situation. Ils sont plutôt « jeunes, peu diplômés, en contrats précaires, dans des petites entreprises et en bas de l’échelle des revenus », égrènent les trois autrices, Mariya Brussevich, Era Dabla-Norris, et Salma Khalid. Ce qui laisse craindre « que la pandémie exacerbe les inégalités ». Entre les générations, entre les sexes, entre les riches et les pauvres.
Mais aussi, entre les pays. Selon les spécialisations productives, le degré de numérisation, la nature des emplois et l’échelle des revenus, le télétravail se déploie de façon très différente d’une économie à l’autre. D’après les estimations, 40 % des emplois peuvent ainsi être « télétravaillés » dans les pays développés, avec un écart allant, au sein de la zone euro, de 24 % en Italie à 42 % en Allemagne.
Même dans le commerce, la possibilité de travailler depuis le foyer est bien plus forte dans les pays riches
Dans les pays émergents, où plus de la moitié des ménages n’ont même pas d’ordinateur chez eux, jusqu’à 20 % de la population urbaine peut télétravailler, mais le niveau est quasi nul dans les campagnes. Ce n’est pas tout : même dans les secteurs à forte présence physique, comme le commerce, la possibilité de travailler depuis le foyer est bien plus forte dans les pays riches, où le numérique et la vente à distance sont plus implantés.
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