L’argot de bureau : l’« innovation frugale », quand le système D devient le plan A

L’argot de bureau : l’« innovation frugale », quand le système D devient le plan A

En ces temps de sobriété, faut-il préférer James Bond ou MacGyver ? D’un côté, un pompeux et coûteux agent secret, qui emploie l’équivalent d’une PME pour construire des joujoux sophistiqués qui ne serviront qu’une fois, probablement avant d’exploser. De l’autre, un aventurier malin, sauvant le monde en n’utilisant que son couteau suisse et du ruban adhésif.

Ce qui est certain, c’est que le second sait bien faire avec peu. En cela, le héros télévisé des années 1980 est un pionnier de ce que l’on nomme en gestion « l’innovation frugale ». Le concept, présenté comme un impératif stratégique pour les entreprises, dans un contexte de transition écologique, désigne en management de l’innovation le fait de faire au mieux… avec le moins possible. L’innovateur frugal est souvent sans le sou.

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Cette notion d’innovation frugale trouve d’ailleurs son origine dans les pays émergents, contraints de rivaliser de créativité pour trouver leur place sur de grands marchés, et plus particulièrement l’Inde. Il découle du mot familier jugaad, signifiant « détournement » en tamoul, et souvent assimilé au fait d’être créatif ou ingénieux.

Paiement par mobile M-Pesa

L’entrepreneur franco-américain Navi Radjou, né à Pondichéry (Inde), a théorisé l’innovation frugale au début des années 2010, s’appuyant sur le concept de jugaad. Il met en avant que le produit ou la solution organisationnelle « frugale » doit répondre à un besoin aussi simple que l’énergie, l’éducation ou la santé, en agissant sur la chaîne de valeur existante pour l’adapter au public visé.

Par exemple, en développant le système de paiement par mobile M-Pesa via un téléphone basique, qui a permis à des millions d’Africains d’accéder à certains services bancaires, en alternative au dernier smartphone et ses 1 754 fonctionnalités qui leur étaient financièrement inaccessibles.

Le produit frugal peut être construit à travers la réutilisation de matériaux : c’est le cas par exemple du Jerry Do-It-Together, un ordinateur fabriqué avec des composants informatiques de réemploi, assemblés dans un bidon de vingt litres, qui visait à réduire la fracture numérique en Afrique notamment. En France, durant le Covid-19, on peut citer le « détournement » de masques de plongée Decathlon, reconvertis en respirateurs pour les hôpitaux. Cette idée ne sort pas de nulle part : depuis 2016, le géant du sport en France possède une équipe projet qui se consacre à l’innovation frugale et au jugaad, pour répondre à sa volonté de proposer des produits basiques pouvant toucher le plus grand nombre.

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LJD

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