« La notion même de travail a pris un sacré coup dans l’aile depuis la pandémie de Covid-19 »
Elon Musk a prévenu. Dorénavant ne seront admis à travailler chez Twitter que les forçats adeptes d’une culture du travail « extrême » (extremely hardcore), ne comptant plus les heures et accessible seulement aux meilleurs. Les autres prendront la porte et trois mois d’indemnités. Une bonne partie a choisi de faire sa valise.
User sa santé pour s’enrichir et accroître la fortune de l’homme le plus riche de la planète n’est plus vraiment l’horizon rêvé de la nouvelle génération. La notion même de travail a pris un sacré coup dans l’aile depuis la pandémie de Covid-19. On en a vu les signes dans les démissions et pénuries soudaines d’emploi qui se sont répandues tant aux Etats-Unis qu’en Europe.
L’étude publiée le 11 novembre par la Fondation Jean Jaurès et signée Jérôme Fourquet et Jérémie Peltier le confirme : en 1990, quand on interrogeait les Français sur ce qui était très important pour eux, 60 % citaient spontanément le travail. Ils ne sont plus que 24 % à le penser en 2021. Les loisirs, cités par 31 % des sondés en 1990, recueillent désormais 41 % des suffrages, près de deux fois plus que pour le travail.
Crispation sur le pouvoir d’achat
Quand Nicolas Sarkozy lançait en 2007 son « travailler plus pour gagner plus », plus de 60 % des Français déclaraient être disposés à rogner sur leurs loisirs pour arrondir leurs fins de mois. Aujourd’hui, c’est l’inverse. En pleine crispation sur le pouvoir d’achat, ils sont la même proportion à admettre envisager de gagner moins pour avoir davantage de temps libre.
Les gens vont moins au cinéma, font moins de sport et d’activités extérieures. Une « épidémie de flemme » particulièrement marquée chez les moins de 50 ans
La crise sanitaire a servi de révélateur, avec ses confinements, son chômage partiel et la généralisation du télétravail. Les auteurs de l’étude évoquent un « ramollissement généralisé des individus ». Les gens vont moins au cinéma, font moins de sport et d’activités extérieures. Une « épidémie de flemme » particulièrement marquée chez les moins de 50 ans. Les habitants de la région parisienne sont les plus touchés. L’extension formidable du télétravail n’y est pas pour rien. La RATP enregistre un trafic 18 % plus faible le vendredi que le mardi.
Les racines de ce basculement spectaculaire sont profondes. C’est tout un système de valeurs qui bascule. « La sacralisation du travail et de l’effort s’est effacée avec la dislocation terminale de la matrice catholique et la disparition des mondes ouvrier et paysan », écrivent les auteurs de l’étude.
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