La difficile implantation d’Amazon près de Rouen
C’est en terrain miné qu’avance, discrètement, un géant américain du commerce en ligne, dans la banlieue de Rouen, en Seine-Maritime. Dans sa conquête du Grand Ouest, où il n’est pas encore implanté, Amazon – contacté, le groupe n’a pas donné suite – entend ouvrir une gigantesque plate-forme logistique de plus de 160 000 m2, sur trois niveaux, sur les 35 hectares de l’ancien site industriel de la raffinerie Petroplus, à Petit-Couronne, en zone portuaire.
Ouverte vingt-quatre heures sur vingt-quatre, cette usine à colis permettrait de distribuer 330 000 paquets par jour et de créer « 1 839 emplois à temps plein en période de pic d’activité ». Le projet est porté par le fonds chinois Gazeley, spécialiste en immobilier logistique, auquel Amazon fait souvent appel. Une promesse de vente a été signée avec la société Valgo, qui avait acheté le site de l’ex-raffinerie, en 2014, pour le dépolluer et le commercialiser.
Si le nom de la firme de Jeff Bezos n’apparaît sur aucun document officiel, il est sur toutes les lèvres depuis des mois. « C’est un secret de Polichinelle », déclare au Monde le président PS de la Métropole Rouen Normandie, Nicolas Mayer-Rossignol, qui a « échangé avec les gens d’Amazon avant l’été ». La récente ouverture d’une petite agence de livraison Amazon, à Saint-Etienne-du-Rouvray, près de Rouen, témoigne également du fort intérêt du groupe pour ce bout de Normandie.
« Le projet reprend son cours »
La partie s’avère cependant loin d’être gagnée. Au-delà de l’opposition politique, associative et commerçante croissante, le premier caillou dans la chaussure d’Amazon est d’ordre sécuritaire. L’enquête publique a abouti à un avis favorable, fin octobre, mais le risque incendie, dans une métropole marquée par la catastrophe industrielle de Lubrizol, s’est invité dans le dossier. Deux rapports alarmants, rédigés par le service d’incendie et de secours de Seine-Maritime, soulignent que « les sapeurs-pompiers seraient confrontés à une impossibilité opérationnelle de limiter la propagation d’un incendie, en cas de non-maîtrise de ce dernier par le système » d’extinction automatique.
En conséquence, le préfet de Seine-Maritime, Pierre-André Durand, à qui appartiendra la décision finale d’autorisation d’exploitation, a décidé, début novembre, de prolonger de six mois, soit jusqu’à la fin juillet 2021, le délai d’instruction du dossier au plan environnemental. « Afin de permettre à la société Gazeley (sollicitée, sans succès) de répondre à ces interrogations », indique la préfecture. Ce dont ne doute pas le PDG de Valgo, François Bouché : « Ce n’est qu’une affaire de moyens supplémentaires. Le projet reprend son cours. »
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