Impôts et réformes : comment la crise des « gilets jaunes » a modifié le profil économique du quinquennat
Emmanuel Macron a-t-il pris un virage social ? Les mesures pour le pouvoir d’achat et les baisses d’impôts ont dessiné une inflexion proménages, mais les réformes de l’assurance-chômage et des retraites s’annoncent plus explosives socialement.
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Un « acte II du quinquennat » avec « deux impératifs : la constance et la cohérence ». En introduction de son discours de politique générale, le 12 juin, le premier ministre Edouard Philippe l’a clairement indiqué : après sept mois de crise sociale des « gilets jaunes », pas question pour le gouvernement de changer de cap. Emmanuel Macron l’avait déjà martelé lors de sa conférence de presse du 25 avril : il n’y aurait « aucun recul » dans son « ambition » de réformer le pays.
Pourtant, les mesures pour le pouvoir d’achat annoncées en décembre 2018 par le président de la République – revalorisation de la prime d’activité, défiscalisation des heures supplémentaires, suppression de la hausse de la contribution sociale généralisée (CSG) pour les petites retraites –, comme la baisse de l’impôt sur le revenu et la réindexation d’une partie des pensions sur l’inflation promise par le chef de l’Etat fin avril ont semblé modifier le profil économique du quinquennat.
« On a accéléré un certain nombre de mesures qu’on avait annoncées, et qui devaient s’étaler dans le temps. On a ainsi favorisé le retour au travail », estime Emilie Cariou, députée (La République en marche, LRM) de la Meuse, issue de l’aile gauche de la majorité.
De fait, sur le papier, les lignes rouges du candidat Macron ont été préservées. Le chef de l’Etat n’est pas revenu sur la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), pourtant largement réclamée sur les ronds-points et dans les cahiers de doléances ouverts à l’occasion du grand débat. Pas touche, non plus, à la transformation du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) en baisse de cotisations pour les entreprises, malgré le coût de 20 milliards d’euros cette année.
Préserver le « en même temps » macronien
Quant au financement des mesures, il devrait se faire par une baisse de la dépense publique et par des rabots sur les niches fiscales des entreprises, et non des ménages les plus aisés, comme l’avaient suggéré les députés de la majorité. « L’exécutif ne voulait pas donner un signal de hausse d’impôts à qui que ce soit », explique l’un d’eux.
Une manière de préserver le « en même temps » macronien, en abaissant les impôts pour les ménages, notamment les classes moyennes, sans revenir trop fortement sur les gages donnés aux entreprises et aux « premiers de cordée ». Une ligne de crête résumée par l’injonction à ce que « le travail paye », répétée en boucle au ministère de l’économie et des finances comme à l’Elysée.