Guy Ryder : « De nombreuses menaces pèsent sur le multilatéralisme en crise »
Guy Rider, le directeur général de l’Organisation internationale du travail, évoque des tensions entre Etats.
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Cent ans après le traité de Versailles qui a créé, le 28 juin 1919, l’Organisation internationale du travail (OIT), un colloque sur le thème « justice sociale et travail décent » a célébré l’événement à Paris. Directeur général de la plus ancienne organisation multilatérale, depuis octobre 2012 et jusqu’en 2022, Guy Ryder veut faire vivre le principe fondateur de l’OIT – « pas de paix durable sans justice sociale » – fondé sur le tripartisme. Chacun des 187 pays membres est représenté par l’Etat, les employeurs et les travailleurs. La conférence annuelle, du 10 au 21 juin à Genève, a rassemblé 6 300 participants venant de 177 Etats et a accueilli 34 chefs d’Etat et de gouvernement. Britannique, âgé de 63 ans, ancien secrétaire général de la Confédération des syndicats libres, fondée en 2006, M. Ryder tire les leçons de ce centenaire dans un contexte où le multilatéralisme est remis en cause.
L’OIT est centenaire. Quelle est son actualité, son utilité ?
C’est l’occasion de faire l’état des lieux par rapport aux deux enjeux principaux : le dialogue social, au niveau mondial, – est-il utile ? –, et l’avenir du travail. Sur le tripartisme et le respect de notre mandat de justice sociale, les résultats sont extrêmement positifs. La participation à notre conférence de 34 chefs d’Etat et de gouvernement est un record. Le secrétaire général des Nations unies [Antonio Guterres] a parlé d’une présence exceptionnelle. Les messages du président Emmanuel Macron, d’Angela Merkel [la chancelière allemande] ou de Dmitri Medvedev [le premier ministre russe] ont été forts. Ils ont tous dit « oui au tripartisme, oui au dialogue social, oui à la justice sociale, oui au BIT [Bureau international du travail] comme acteur principal du multilatéralisme ».
Pour autant, respectent-ils ces principes dans leurs pays ?
Je ne pense pas que ces messages étaient diplomatiques. Les chefs d’Etat ne se sont pas déplacés juste par politesse.
Dans la déclaration adoptée, il est question de droits fondamentaux que plusieurs pays membres ne respectent pas…
Le monde du travail est-il parfait ? Non. Les réalités du monde du travail sont parfois loin des jolis principes affichés dans nos déclarations, sans aucun doute. Cette déclaration résulte d’une négociation tripartite mondiale entre 187 pays. Elle est très importante car elle réaffirme l’adhésion aux valeurs centenaires de l’OIT et tente d’ébaucher des pistes pour le futur. Elle insiste sur notre rôle dans la lutte contre le changement climatique.