Football et ramadan : « Dans les organisations privées, quelle que soit leur forme juridique, c’est la liberté de conviction et de manifester ses convictions qui prime »
Fin mars, la Fédération française de football (FFF) a diffusé un communiqué rappelant l’interdiction de l’arrêt des matchs pour permettre à des joueurs musulmans de rompre le jeûne du ramadan.
L’origine de cette prise de position ne serait pas à chercher du côté d’une demande de joueurs ou de clubs professionnels, mais d’informations remontées indiquant que de telles interruptions se seraient produites durant des matchs amateurs. Pour justifier sa décision, la Fédération a fait référence à ses statuts, qui énoncent un principe de « neutralité du football ». Elle a également souligné, par l’intermédiaire de son président de la Commission fédérale des arbitres, qu’il y a « un temps pour faire du sport, et un temps pour pratiquer sa religion ».
Réactions virulentes
Cette prise de position a rapidement été commentée et a parfois donné lieu à des réactions virulentes, allant jusqu’à en faire d’un côté un exemple d’une supposée islamophobie française et, de l’autre, de l’entrisme de la religion dans le football. Elle a aussi été opposée à celles de fédérations étrangères qui ont accepté ces interruptions de match.
Si ce contexte précis a ses spécificités, il s’agit d’un cas exemplaire des situations et des questions que suscitent les faits religieux au travail. En effet, les arguments mobilisés par la FFF sont ceux qui reviennent le plus souvent dans le discours des dirigeants d’entreprise et des manageurs, lorsqu’ils sont confrontés au fait religieux dans leurs situations de travail. Cela est particulièrement vrai dans des secteurs d’activité tels que le sport, les loisirs ou le médico-social : le réflexe le plus fréquent est de se référer au principe de laïcité, puis de rappeler que la religion devrait être réservée au domaine privé ou intime.
Sur ce point, il faut redire que la laïcité, dans son volet de neutralité religieuse, concerne le secteur public et l’action publique. Dans les organisations privées, quelle que soit leur forme juridique (sociétés, associations, etc.), c’est la liberté de conviction et de manifester ses convictions qui prime.
Légitimité et proportionnalité
L’organisation peut la restreindre, mais pour des raisons précises (par exemple, des règles d’hygiène ou de sécurité) et dans des circonstances précises : elle ne peut imposer une restriction de liberté générale et non motivée à ses salariés en rendant la neutralité religieuse obligatoire. Deux critères s’imposent donc à toute restriction : la légitimité et la proportionnalité.
Il faut ensuite rappeler que, au travail, les salariés sont des personnes dans toutes leurs dimensions. Ils ne sont pas simplement des compétences, des bras (des jambes pour les joueurs !), des capacités de calcul ou de vista. Ils viennent au travail tels qu’ils sont, sans laisser à la porte leurs soucis, leur caractère, leur imagination et, bien sûr, leurs convictions.
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