Fichage à Force ouvrière : une opération « pensée, voulue et organisée » par son ex-leader

Fichage à Force ouvrière : une opération « pensée, voulue et organisée » par son ex-leader

 Le secrétaire confédéral du syndicat Force ouvrière, Pascal Pavageau, lors du deuxième jour de la réunion d’été de l’association patronale Medef à Jouy-en-Josas, le 29 août 2018.

Ses dénégations n’ont absolument pas convaincu les magistrats. Mardi 31 octobre, l’ancien secrétaire général de Force ouvrière (FO), Pascal Pavageau, a été condamné par la 17chambre correctionnelle du tribunal judiciaire de Paris pour avoir entrepris le fichage « clandestin » de 127 cadres de l’organisation, avant son élection, en avril 2018. Une opération de basse police qui avait fait scandale et l’avait forcé à quitter ses fonctions, un peu moins de six mois après avoir pris les commandes de la confédération.

Les motivations de la décision, que Le Monde a pu consulter, sont sobres mais implacables : la collecte « illicite » de données personnelles « a été pensée, voulue et organisée » par l’ex-leader syndical, « de concert » avec celle qui était sa directrice du cabinet et sa compagne au moment de la révélation des faits, Cécile Potters.

Les deux prévenus devront payer une amende, respectivement de 4 000 et de 2 000 euros. Leur complice, Justine Braesch, qui était chef de cabinet de M. Pavageau quand l’affaire a éclaté, a été sanctionnée de la même manière, mais pour un montant inférieur (1 500 euros), sa responsabilité étant « moindre » aux yeux du tribunal.

Lors du procès, qui s’est tenu le 13 septembre, la représentante du parquet, Marion Adam, avait requis des peines plus lourdes : six mois de prison avec sursis à l’encontre de Pascal Pavageau et trois mois d’incarcération avec sursis pour Justine Braesch et Cécile Potters. Partie civile dans le dossier, FO a obtenu, au titre du « préjudice » qu’elle a subi, 1 euro de dommages-intérêts, qui seront payés « solidairement » par les trois prévenus. Ceux-ci devront également verser au syndicat 1 000 euros pour les frais de procédure.

Deux listes de 127 dirigeants du syndicat

Le scandale avait été déballé sur la place publique dans un article du Canard enchaîné publié le 10 octobre 2018. L’hebdomadaire avait mis au grand jour l’existence de deux listes de 127 dirigeants de FO, avec, pour chacun d’eux, des informations diverses – dont certaines relevaient de leur « intimité », comme le souligne le tribunal (orientation sexuelle, état de santé). Les « opinions politiques ou philosophiques » étaient bien souvent mentionnées. Dans certains cas, les appréciations étaient assorties d’injures ou d’accusations (« ordure », « mafieux », « voleur de portefeuille », « détourne des fonds », etc.). Elaborés avant que M. Pavageau soit propulsé à la tête de FO, en avril 2018, ces documents cataloguaient aussi les personnes en fonction de leur proximité avec le secrétaire général et de leur positionnement dans le syndicat. Autant d’éléments recueillis et conservés sans le consentement des intéressés – donc en violation complète avec la loi.

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LJD

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