En France, du mieux sur le front de la productivité
L’économie française ne réserve pas que de mauvaises surprises. Au contraire de la situation budgétaire du pays, qualifiée de « très grave » par le nouveau premier ministre, Michel Barnier, la productivité horaire, mise à mal par la pandémie de Covid-19, semble donner quelques signes de rétablissement.
Sur douze mois, entre le deuxième trimestre 2023 et le deuxième trimestre 2024, cette donnée, qui mesure la valeur ajoutée produite en fonction du nombre d’heures travaillées, a progressé de 1,3 %, indique Eric Heyer, directeur du département analyse et prévision de l’Observatoire français des conjonctures économiques. Un « rythme bien supérieur à celui de l’avant-crise ». Les années précédant la crise sanitaire, la productivité croissait, en effet, d’environ 0,9 % par an.
La crise liée à la pandémie, avec les confinements et autres arrêts de production industrielle, puis les désordres d’approvisionnement liés à la guerre en Ukraine ont fait chuter la production. Or, dans le même temps, le marché du travail, soutenu par le chômage partiel, les aides aux entreprises et le fait que les sociétés conservent leurs effectifs en attendant la sortie de crise, a permis de soutenir les créations d’emplois. L’apprentissage, de son côté, poursuivait son essor.
Inexplicable
Entre fin 2019 et le deuxième trimestre 2024, l’économie nationale a gagné 1,1 million d’emplois. Beaucoup plus que ce qu’on aurait obtenu si la productivité était restée la même qu’avant la crise : l’économie n’aurait dû gagner « que » 129 000 emplois supplémentaires. Soit, résume M. Heyer, 980 000 emplois « de trop » par rapport à la croissance du pays.
A la sortie du Covid-19, le bilan était inquiétant : les économistes chiffraient les pertes de productivité à 5 % environ sur la période comprise entre mi-2019 et mi-2023. Une partie de cette baisse s’explique par la « rétention » de main-d’œuvre, l’apprentissage et la baisse de la durée du travail, mais une autre partie est inexplicable, selon les économistes. Elle correspondait à 480 000 créations d’emplois.
Cependant, ce chiffre a été révisé à la baisse : « Selon les comptes nationaux publiés en mai, le produit intérieur brut a été un peu supérieur à ce qui avait été initialement évalué par l’Insee, et on a eu plutôt moins de créations d’emplois », explique Matthieu Lemoine, économiste à la Banque de France. « Au total, pendant cette période, la productivité s’est donc moins dégradée que ce que l’on pensait. »
La partie « inexpliquée » ne représente plus que 285 000 emplois, concentrés dans deux secteurs, l’industrie pour 200 000 emplois environ, et la construction. Cette situation devrait être transitoire : « Lorsque l’activité va répartir ces branches, ces entreprises vont utiliser cette main-d’œuvre disponible et n’auront pas à embaucher », explique Eric Heyer. Et ce « surplus » d’emplois sera alors résorbé.
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