En Europe, les pays du Sud sont plus affectés par les destructions d’emplois

Partir à l’étranger, pour tenter sa chance là où la conjoncture est un peu meilleure. Depuis que la boutique de souvenirs où elle travaillait, près de Lisbonne, a baissé le rideau, Joana Ribeiro y réfléchit sérieusement. La jeune femme tourne en rond dans le petit appartement qu’elle partage avec sa sœur. Elle compte les jours. Et angoisse : « La saison touristique est morte et je ne suis pas près de retrouver un job dans le secteur. » En 2008, lors de la précédente crise, nombre de ses amis avaient émigré au Royaume-Uni ou au Brésil pour échapper au chômage. Elle avait choisi de rester auprès de ses parents, aujourd’hui à la retraite, et de terminer ses études de lettres. « On va revivre les mêmes galères, les fins de mois difficiles avec, en plus, la peur d’attraper le virus. Autant partir. Mais quel pays, aujourd’hui, est épargné par la maladie ? »
« Les destructions de postes risquent d’exploser lorsque les dispositifs de chômage partiel seront levés », analyse Nadia Gharbi, économiste chez Pictet WM
A l’heure où le Vieux Continent entame un déconfinement prudent, les inquiétudes de nombreux Européens, au Portugal comme ailleurs, se cristallisent désormais autour de l’emploi. « Les pays membres de la zone euro ont retenu les leçons de la crise de 2008 et ont tous adopté le chômage partiel pour protéger les salariés », observe Nadia Gharbi, économiste chez Pictet WM. En cela, le modèle européen est plus protecteur que celui des Etats-Unis, où le taux de chômage a bondi de 3,5 % en février à 14,7 % en avril, au plus haut depuis juin 1940. Il n’empêche : « L’Europe n’est pas épargnée pour autant par les destructions de postes, et celles-ci risquent d’exploser lorsque les dispositifs de chômage partiel seront levés », ajoute Mme Gharbi.
De fait, le taux de demandeurs d’emploi est passé de 7,3 % à 7,4 % dans la zone euro en mars, et il devrait franchir la barre des 10 % d’ici à décembre, estime le Fonds monétaire international (FMI), dans ses dernières prévisions. La hausse s’annonce particulièrement marquée en Espagne (de 14,1 % en 2019 à 20,8 % sur l’ensemble de 2020), en Grèce (de 17,3 % à 22,3 %), en Italie (de 10 % à 12,7 %), au Portugal (de 6,5 % à 13,9 %) ou encore en Irlande (de 5 % à 12,1 %). En revanche, elle sera sans doute plus modérée en Allemagne (de 3,2 % à 3,9 %), en Autriche (de 4,5 % à 5,5 %) ou aux Pays-Bas (de 3,4 % à 6,5 %). En France, le taux de chômage devrait passer de 8,5 % à 10,4 %, prévoit le FMI.
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