En Corée du Sud, la mort tragique d’une employée met en évidence les pratiques d’un autre âge du géant de la boulangerie SPC
L’opération contrition tentée, vendredi 21 octobre, par Hur Young-in, fondateur et président du géant sud-coréen de la boulangerie et de la restauration rapide SPC (« S » pour « Samlip », « P » pour « Paris Croissant » et « C » pour « compagnies »), connue pour son enseigne-phare, Paris Baguette, et ses franchises Shake Shack et Baskin Robbins, peine à convaincre.
En costume sombre orné du badge bleu et jaune (symbolisant le ciel et le soleil) du logo en forme de sourire de l’entreprise, le dirigeant (36e fortune de son pays, selon Forbes) a présenté ses excuses pour la mort, le 15 octobre, d’une employée de 23 ans dans une usine du groupe, à Pyeongtaek, à 65 kilomètres au sud de Séoul. La jeune femme a été happée par un mixeur géant dans lequel elle versait des ingrédients.
Depuis, l’entreprise est la cible de vives protestations et d’un appel au boycott de ses enseignes, car le drame illustre sa très controversée gestion d’un personnel majoritairement féminin et précaire. Le tragique accident serait dû à l’absence d’un dispositif de sécurité. L’usine a relancé ses activités dès le lendemain du drame. « Ce n’est pas correct », a admis M. Hur. « Nous allons renforcer la sécurité », a promis, de son côté, Hwang Jae-bok, le président-directeur général de Paris Baguette.
Appel au boycott et rassemblement à Paris
La grogne a gagné l’Assemblée nationale et amené le président, Yoon Seok-youl, à déplorer « un drame bouleversant ». Il a appelé à une enquête approfondie sur la mort de la jeune femme dont le décès a suscité une vive émotion dans un pays où la précarité touche surtout les femmes et où les coûts d’éducation restent élevés. La victime travaillait pour aider sa mère et son jeune frère. Elle rêvait de diriger un jour un magasin Paris Baguette.
Un rassemblement s’est tenu le 20 octobre devant le Paris Baguette du Châtelet, à Paris
Outre l’appel au boycott lancé sur Twitter, avec comme slogan « Nous ne mangerons pas de pain réalisé avec le sang des travailleurs », un mouvement de protestation a été organisé devant 1 000 des 3 400 Paris Baguette de Corée du Sud. En France, à l’initiative de la Confédération générale du travail (CGT), qui craint de voir « les entreprises en France » s’inspirer « des violations des droits humains en Corée du Sud », un rassemblement s’est tenu le 20 octobre devant le Paris Baguette du Châtelet, à Paris, où l’enseigne s’est installée en 2014.
Les méthodes de SPC sont critiquées depuis 2017. A l’époque, il est apparu que les cinq mille boulangers de Paris Baguette, dont 80 % de femmes, étaient employés non pas par Paris Croissant, la maison mère de la franchise, mais par des entreprises partenaires, notamment PB Partners. Jugeant cette pratique illégale, le ministère du travail avait ordonné à Paris Croissant d’embaucher les personnels concernés, ce que l’entreprise n’aurait pas fait.
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