En Alsace, des ateliers pour aider les allocataires du RSA à « recréer du lien social »
Les têtes sont basses et les regards timides. Des années de précarité, d’isolement, voire de désocialisation finissent par rendre prudent, méfiant même. Pour les bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA), parler de soi est une épreuve. Difficile de s’exprimer quand votre voix paraît, la plupart du temps, inaudible. Julie, Cyril et Sandra – ils ont souhaité rester anonymes – sont de ceux-là.
Tous trois font partie des 305 Alsaciens au RSA inscrits dans un parcours de bénévolat volontaire lancé par la Communauté européenne d’Alsace (CEA, issue de la fusion des départements du Haut-Rhin et du Bas-Rhin), qu’ils suivent à l’Atelier, l’une des quatre structures financées par la collectivité pour mener cette mission. Un dispositif qui permet « de recréer du lien social, de se sentir utile », assure Julie, 36 ans. Titulaire d’une licence de psychologie, au RSA depuis 2015, elle est aujourd’hui en contact avec l’association Caritas pour mener un projet professionnel orienté vers le social. « C’est ce parcours qui m’a permis de savoir que je voulais vraiment faire ça », raconte-t-elle.
L’Alsace, un territoire qu’il est utile d’observer au regard de la réforme du RSA promise par Emmanuel Macron. Lors de sa campagne pour sa réélection, au printemps, le président de la République avait annoncé vouloir conditionner le versement de l’allocation à entre quinze et vingt heures d’activités hebdomadaires. Le ministre du travail, Olivier Dussopt, a annoncé, mardi 13 décembre, la liste des dix-neuf territoires retenus pour expérimenter ce nouveau dispositif d’accompagnement en 2023, dans le cadre de la création de France Travail, le futur service public de l’emploi.
Succès mitigé
Les deux départements alsaciens n’ont pas attendu le projet gouvernemental pour tenter d’associer RSA et bénévolat. En 2016, le Haut-Rhin avait voulu rendre obligatoire un engagement associatif de sept heures par semaine. Une mesure d’abord retoquée par le tribunal administratif fin 2016 avant d’être finalement validée par le Conseil d’Etat, en 2018. Mais depuis la fusion des deux départements, en 2021, la CEA préfère miser sur le volontariat, notamment à travers ces « ateliers de l’engagement citoyen ». Les allocataires participent à des rendez-vous collectifs deux fois par mois, une première étape avant de passer éventuellement au bénévolat dans une association. « Le début d’une reprise de confiance en soi », explique Lorna Piasentin, référente RSA de l’Atelier.
Pour le président (Les Républicains) de la CEA, Frédéric Bierry, « le volontariat est la clé ». Le dispositif vise, selon lui, « des personnes particulièrement éloignées de l’emploi » pour lesquelles « la vie associative permet de recréer un réseau, de retrouver confiance en se montrant à soi et aux autres qu’on peut tenir un engagement et de réaliser quelque chose ». L’impact paraît cependant tout relatif. Avec 305 personnes accompagnées, il concerne seulement 1 % des 39 000 allocataires du RSA que compte l’Alsace.
Il vous reste 57.96% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.