« Des Droits vulnérables » : l’ambivalence des politiques du handicap
Livre. Longtemps perçu sous le seul angle médical, le handicap est aussi une réalité sociale, souvent synonyme de pauvreté, de défaut d’accessibilité, d’absence de pouvoir et d’infériorisation statutaire. Qu’est-ce que la reconnaissance des droits par l’action publique change à l’expérience sociale du handicap ? Les droits ont-ils des effets réels sur la vie des individus ? Dans Des Droits vulnérables. Handicap, action publique et changement social (Sciences Po Les Presses), Anne Revillard s’intéresse aux conséquences des politiques du handicap sur la concrétisation des droits.
« L’expérience du handicap est à la fois celle de certaines caractéristiques physiques, sensorielles, cognitives ou psychiques induisant des capacités durables, et celle du traitement social qui leur est associé », souligne la professeure associée en sociologie à Sciences Po. Les politiques publiques affectent ces deux dimensions : les politiques de santé touchent aux aspects médicaux, tandis que de nombreuses autres politiques ont une incidence sur les aspects sociaux.
L’ouvrage examine le rôle que jouent ces politiques dans la concrétisation des droits des personnes en situation de handicap. Il s’appuie sur des entretiens biographiques de dix-sept femmes et treize hommes, âgés de 23 ans à 75 ans, analysés dans une perspective qui combine sociologie de l’action publique et sociologie du droit. La moitié d’entre eux ont une incapacité visuelle, et l’autre une incapacité motrice.
Les origines sociales et tranches d’âge sont diverses, et les niveaux d’études vont du brevet (ou moins) au doctorat. Un tiers des personnes interrogées vivent uniquement de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) et sont très éloignées du marché du travail, les autres ont des emplois de différents degrés de stabilité et de prestige, du travail en secteur protégé au professeur d’université.
Education et travail
Les deux premiers chapitres suivent le cycle de vie des personnes et abordent respectivement l’éducation et le travail. La question des droits relatifs au travail « cristallise les ambivalences des politiques du handicap : entre hypothèse d’inaptitude au travail ouvrant droit à des prestations d’assistance et promotion de l’insertion professionnelle, entre travail protégé, quotas et antidiscrimination. » Le secteur du travail illustre la portée simultanément contraignante et habilitante de l’action publique. D’un individu à l’autre, un instrument d’action publique donné peut être aussi bien perçu comme une contrainte que comme une ressource.
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