Démographie, innovation : pourquoi l’économie européenne décline depuis quarante ans

Démographie, innovation : pourquoi l’économie européenne décline depuis quarante ans

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, à Bruxelles, le 8 septembre.

Economiquement, l’Europe décroche. Ce n’est pas une opinion, mais un fait objectivement mesurable. En 1981, les Etats-Unis et les dix-neuf pays qui constituent aujourd’hui la zone euro pesaient 21 % de l’économie mondiale chacun ; presque quarante ans plus tard, leur part est passée respectivement à 16 % et 12 %. Pendant le même temps, le poids de la Chine a bondi de 2 % à 18 %. Que l’empire du Milieu, avec 1,4 milliard d’habitants, soit passé devant, relève largement d’un rattrapage logique. Le déclin européen, en revanche, a été bien plus rapide que celui des Etats-Unis.

Les économistes sont presque unanimes sur le constat. « Sur le diagnostic, il n’y a pas photo », regrette Gilles Moëc, économiste en chef à Axa. « De 2008 à 2019, la croissance américaine a été de 1,85 % par an, celle de la zone euro de 0,82 %, environ deux fois moins », précise Eric Dor, directeur de la recherche économique à l’école de commerce Iéseg.

Le décrochage, qui s’était atténué dans les années 2000, s’est accéléré avec la crise de la zone euro à partir de 2010. « Ces quinze dernières années, l’Europe a peiné à apporter la prospérité promise », résume Clemens Fuest, président de l’institut de conjoncture munichois IFO.

« Troisième crise majeure pour l’Europe en dix ans »

La pandémie risque d’accentuer le phénomène. En 2020, la récession sera de 3,7 % aux Etats-Unis, contre 7,5 % en zone euro, selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Les Américains auront retrouvé fin 2021 leur niveau économique d’avant la pandémie de Covid-19. Du côté européen, il faudra attendre presque un an de plus. « C’est la troisième crise majeure pour l’Europe en dix ans [après la crise financière de 2008 et celle de l’euro de 2010-2015] », rappelle Klaas Knot, le gouverneur de la Banque centrale des Pays-Bas.

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Il faut, bien sûr, moduler le constat : mesuré en produit intérieur brut (PIB) par habitant, le décrochage européen demeure, mais il est moins fort, et certains Etats, comme l’Allemagne et les pays scandinaves, s’en tirent mieux. Par ailleurs, les inégalités aux Etats-Unis sont bien plus élevées, et l’espérance de vie y baisse, preuve d’un profond malaise du modèle américain. Comment expliquer, malgré tout, le décrochage européen ?

Le Monde a décidé de se pencher pendant une semaine sur le sujet, pour tenter d’en analyser les causes profondes : démographie faiblissante, innovation en berne, défauts de construction de la monnaie unique, désindustrialisation…

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