Covid-19 : « Pour limiter l’épidémie », en incitant à « rester chez soi au moindre symptôme, le gouvernement devrait prendre en charge les jours de carence »

Covid-19 : « Pour limiter l’épidémie », en incitant à « rester chez soi au moindre symptôme, le gouvernement devrait prendre en charge les jours de carence »

Tribune. Lorsqu’un salarié va chez le médecin et se fait délivrer un arrêt maladie, il n’est pas couvert pour tous les jours non travaillés. Les fonctionnaires doivent ainsi payer leur premier jour d’arrêt. Les salariés du privé paient de leur poche les trois premiers jours d’absence, sauf si leur employeur leur verse des indemnités complémentaires. Ces jours de carence ont bien sûr pour objectif d’éviter que les salariés « n’abusent trop du système » en obtenant de médecins peu scrupuleux un arrêt maladie « à la moindre petite grippette ».

Dans cet esprit, les salariés qui subissent une perte de salaire y réfléchiront à deux fois avant de poser un arrêt. Pour savoir si cet objectif est justifié, on dispose de nombreuses recherches dont les résultats sont pour une fois fort concordants.

En France, trois études ont ainsi montré, à partir de trois méthodes très différentes, que les jours de carence limitent effectivement les arrêts maladie de courte durée, notamment ceux de moins de trois jours. Cependant, ils augmentent aussi les arrêts de plus longue durée (une semaine ou plus), de sorte que le nombre total de jours d’arrêt maladie est inchangé, voire augmenté, et le gain pour les finances publiques est limité.

D’autres études à l’étranger aboutissent à des résultats de même nature. Deux hypothèses se disputent pour expliquer ces résultats.

Il est d’abord possible que les salariés optimisent leurs arrêts, en renonçant plus souvent à prendre des arrêts courts lors de problèmes de santé « mineurs », mais en s’arrêtant plus longtemps dans les cas plus graves afin d’amortir la perte salariale liée au délai de carence.

Présentéisme

Il est cependant aussi possible que les petites infections des salariés qui renoncent à leur arrêt maladie s’aggravent à cause du manque de repos et nécessitent finalement des arrêts plus longs. Ce second mécanisme peut même être démultiplié pour les maladies contagieuses : en renonçant à leur arrêt, certains salariés pourraient transmettre leurs infections à d’autres qui se retrouveraient alors face au même dilemme.

Quelle que soit l’explication dominante, on sait que les jours de carence incitent les salariés à aller travailler lorsqu’ils sont malades. Ce présentéisme est attesté par des enquêtes de santé publique dans de nombreux pays : les salariés dont les arrêts maladie sont les moins bien couverts déclarent davantage aller travailler lorsqu’ils sont malades.

Plus important encore : de tels comportements ont bien des conséquences en termes de santé publique, pour les personnes concernées, mais aussi pour la propagation des épidémies. Une étude a ainsi montré que lorsqu’un Etat américain améliore la couverture des arrêts maladie, les épidémies s’y propagent par la suite moins que dans les Etats voisins !

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LJD

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