Covid-19 : pour les saisonniers, « le manque de visibilité est terrible »

Pour le million de personnes qui, chaque année, font les saisons, l’été 2020 s’annonce à haut risque. En 2019, près de la moitié des saisonniers ont exercé leur activité dans les secteurs de la restauration, de l’hébergement et des loisirs, principalement sur les lieux de vacances, selon les données compilées par la Dares, la direction chargée de la recherche au ministère du travail, fin décembre. Et une part non négligeable (15 %) dans le commerce. Environ un quart ont été embauchés pour effectuer des travaux de cueillette de fruits ou les vendanges. Or, si les opportunités de contrats dans l’agriculture existent bel et bien, sur le littoral ou dans les lieux touristiques, il en va tout autrement en raison des conséquences de la pandémie de Covid-19.
Alors qu’hôtels et restaurants font travailler 150 000 saisonniers l’hiver et 300 000 l’été, le marché est aujourd’hui au point mort, en l’absence de consignes gouvernementales sur ce qui sera autorisé ou non durant l’été. « Tous les recrutements sont suspendus, faute de visibilité, déclare Thierry Grégoire, président de l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (UMIH)-saisonniers. Et puis, lorsque nous le pourrons, nous ne rouvrirons pas dans les mêmes conditions. » Le respect des règles de distanciation, notamment dans les restaurants, va réduire les flux de clientèle, avec sans doute un impact sur les effectifs des établissements. Selon M. Grégoire, même en cas de réouverture, « environ 75 % seulement des saisonniers du secteur pourraient trouver du travail cet été ».
« Ce n’est pas la faute de l’Etat, mais le manque de visibilité est terrible », confirme Damien Dejoie, directeur de l’office de tourisme de La Baule et de la presqu’île de Guérande, qui accueille 550 000 personnes à l’année. « Lors de la marée noire de l’Erika [en décembre 1999], au moins, on savait qu’on allait s’en sortir, on avait une estimation du temps du chantier de nettoyage. Là, on est dans le flou. On se prépare comme on peut, sans savoir quelle sera la situation sanitaire d’ici deux à trois mois. On essaie de trouver des solutions pour éviter la casse. »
En avril 2020, Pôle emploi n’a enregistré sur sa plate-forme Mobilisation emploi que 3 800 nouvelles offres d’emploi saisonniers, un chiffre en recul de 71 % par rapport à avril 2019
M. Dejoie lui-même « retarde au maximum le recrutement » de la trentaine de saisonniers censés étoffer ses équipes au cours de la saison estivale : « J’attends de savoir quels vont être nos besoins en termes d’accueil et dans quelles conditions on va rouvrir. Et forcément, la même problématique se pose pour tous les acteurs du secteur touristique. »
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