Confrontés au vieillissement de leur personnel, les fabricants français du luxe peinent à recruter
La tente du Comité Colbert a été montée sur le parking du parc des expositions de Cholet (Maine-et-Loire), face aux véhicules blindés de l’armée de terre, qui recrute 16 000 militaires d’active, et au pavillon dévolu aux emplois dans la police. L’association de promotion du luxe a choisi ce « Carrefour de l’orientation des métiers et de l’entreprise » pour présenter les « métiers de la main » et promouvoir les formations ouvertes aux collégiens et lycéens.
Vendredi 22 novembre, dès 9 heures, une colonne de cars déverse des centaines d’adolescents de la région, bassin important de production de mode en France. La foule est dense. En trois jours, près de 16 000 personnes sont venues voir les stands d’une dizaine de marques de luxe. Ils se sont initiés au point coulé pour fixer un galon sur un tweed Chanel, au moulage de porcelaine chez Bernardaud ou à la coloration de cuir chez Louis Vuitton.
Les doigts tachés d’encre rouge, après avoir badigeonné un porte-étiquette de valise, Raziella Cailleau dit ne pas vouloir « faire ça, comme métier ». A 13 ans, elle se voit « être styliste ». Lola Raboin se destine, elle aussi, à cette fonction « qui fait rêver », mais elle sait qu’elle rejoindra d’abord un atelier de confection. Cette lycéenne de 16 ans, en baccalauréat professionnel dans la filière des métiers de la mode et du vêtement, à Cholet, est là « pour obtenir un stage chez Chanel en 2026 ». Depuis le début de la matinée, elle gravite autour de Denis Ridard, ancien chef de l’atelier galon de la maison de luxe, venu, dé au doigt, susciter des vocations.
En quête de « mains »
Cette manifestation « rassure les parents et leurs enfants en leur présentant tous ceux qui recrutent », souligne Bénédicte Epinay, déléguée générale du Comité Colbert. « Au fond, nous sommes tous là pour trouver ceux qui remplaceront les baby-boomeurs de nos ateliers », avance Sylvie Chailloux, présidente de Textile du Maine, sous-traitant de marques de luxe.
Or il y a urgence. Le secteur recrute, partout en France. Le Comité Colbert estime que, dans cette industrie qui emploie directement ou indirectement 615 600 personnes en France, 20 000 postes étaient à pourvoir en 2024. La plupart sont nés dans les ateliers créés récemment par les grands faiseurs, d’autres se profilent.
Hermès, qui, depuis dix ans, inaugure une maroquinerie par an en moyenne, en projette trois autres en France en 2025. Et, cette année, LVMH, qui emploie près de 10 000 artisans, « avait 3 500 postes à pourvoir dans les métiers dits “d’excellence”, dont environ 10 % dans la création et 30 % dans l’artisanat », précise Alexandre Boquel, directeur des métiers d’excellence, au sein du groupe aux 120 usines en France, représentant 280 métiers. Ses concurrents sont aussi sur le pont. Longchamp est « sans arrêt en recherche de maroquiniers », observe David Brugel, directeur industriel de la marque, à la tête de cinq ateliers en France (900 personnes). En Auvergne-Rhône-Alpes, Van Cleef & Arpels recrute pour ses deux nouveaux ateliers de Châteauneuf-sur-Isère (Drôme), près de Romans-sur-Isère, et de Dorat (Puy-de-Dôme). A terme, ils emploieront de 500 à 600 personnes.
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