« S’inspirant des entreprises dites “libérées”, certains éliminent le manageur »

Au nom de l’« agilité », de nouveaux modes d’organisation du travail se diffusent dans les entreprises depuis les années 2000, recomposant les chaînes de décision, explique la journaliste du « Monde » Anne Rodier dans sa chronique.

Publié aujourd’hui à 10h03 Temps de Lecture 2 min.

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« Des strates de manageurs sont supprimées, jusque dans les entreprises les plus classiques du monde industriel. »
« Des strates de manageurs sont supprimées, jusque dans les entreprises les plus classiques du monde industriel. » David Leahy/Cultura / Photononstop

Chronique « Carnet de bureau ». Les manageurs français, débordés, stressés, démotivés, sont assez pessimistes sur l’avenir de leur fonction : « 38 % pensent qu’elle aura disparu d’ici cinq à dix ans », indique une étude du Boston Consulting Group, publiée fin septembre. Ils n’ont peut être pas complètement tort.

Au nom de l’« agilité », qui est au management ce que le numérique est à la technologie, de nouveaux modes d’organisation du travail se diffusent dans les entreprises depuis les années 2000, recomposant les chaînes de décision. « Big bang », « essaimage » ou « redéploiement par pôle », font voler en éclat l’organigramme d’hier, relate le Livre blanc des DRH édité au printemps par le cabinet de conseils Julhiet Sterwen, spécialisé en transformation des entreprises.

Le mode classique de gestion les entreprises « a atteint ses limites », affirmait dès 2014 l’auteur du best-seller Reinventing Organizations. Frédéric Laloux annonçait ni plus ni moins un changement d’ère dans la gouvernance et l’émergence d’une nouvelle façon de voir la collaboration : « Une organisation où des millions d’acteurs se coordonnent fonctionne mieux qu’une pyramide, disait-il. Mais ça nécessite qu’on réinvente l’ensemble des pratiques et des processus de décision. Il faut des structures, mais pas forcément des boss. »

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Des strates de manageurs sont supprimées, jusque dans les entreprises les plus classiques du monde industriel. Saint-Gobain a ainsi repensé son organisation à l’occasion du déménagement du siège, programmé pour le 1er trimestre 2020 dans une nouvelle tour de la Défense. « Pour améliorer le management, pour que la circulation de l’information soit plus fluide, nous avons supprimé trois niveaux hiérarchiques en 2019. Nous incitons les salariés à travailler en groupe », explique Régis Bluegeon, le DRH France du groupe industriel.

Retour de la « hiérarchie plate »

Les salariés ne s’y retrouvent pas toujours : « 67 % des manageurs estiment que depuis deux ans le management a évolué vers des méthodes plus collaboratives, mais seuls 44 % des salariés partagent cet avis », indique l’Observatoire du management dans son baromètre annuel paru le 11 octobre.

Les sciences cognitives s’invitent dans l’entreprise

Dans un monde professionnel où les repères se diluent, les cadres se forment aux neurosciences.

Par Publié aujourd’hui à 07h00

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« Les neurosciences permettent de revisiter ou de valider des techniques que l’on connaissait déjà, comme les exercices d’entraînement mental, et d’identifier les biais cognitifs qui altèrent nos décisions. »
« Les neurosciences permettent de revisiter ou de valider des techniques que l’on connaissait déjà, comme les exercices d’entraînement mental, et d’identifier les biais cognitifs qui altèrent nos décisions. » Ingram / Photononstop

Un homme a retroussé son pantalon, dévoilant de sobres chaussettes grises. Sa voisine a défait les lacets de sa chaussure, les laissant effleurer le sol. En face, un homme a enfilé sa veste, mais en partie seulement : une manche retombe inerte le long de sa chemise. Ils se dévisagent, curieux : en quelques secondes, chacun a dû changer six éléments dans son apparence, et ensuite repérer les modifications opérées par son binôme.

Le changement le plus flagrant, néanmoins, se lit sur leurs visages. Lorsqu’ils ont franchi le seuil de l’Institute of NeuroCognitivism (INC), logé dans un immeuble haussmannien du 9e arrondissement parisien, les huit inscrits à la séance découverte « Mon cerveau et moi. Comprendre et changer le comportement humain grâce aux neurosciences » affichaient une mine sérieuse, voire affectée. Les voilà souriants et décontractés.

« Vous êtes passés de la gouvernance émotionnelle à la gouvernance adaptative. Vous arrêtez d’anticiper, vous êtes dans le moment présent, vous n’êtes pas inhibés. Vous n’avez plus le stress du résultat, vous allez plus vite », détaille l’animatrice, Sabrina Lefébure. Trois heures durant, elle initie les dirigeants, spécialistes en RH et coachs, aux différents territoires cérébraux qui gouvernent les comportements. Après avoir investi le terrain de l’éducation, les sciences cognitives s’invitent désormais dans l’entreprise.

Le crâne de Phineas Gage

Dirigeant d’une société de transport de colis exprès qu’il a fondée en 1993, François-Xavier a poussé la porte de l’INC à la suite des plaintes de son fils de 25 ans, qui vient de rejoindre la structure familiale : « Il m’a dit que j’étais nul en intelligence émotionnelle. J’ai voulu me former, et j’ai été séduit par l’approche neuroscientifique, ça a l’air concret, c’est plutôt sécurisant pour quelqu’un de ma génération. »

Christophe Ferragne s’est, lui, intéressé à l’approche neurocognitive et comportementale grâce à une certification qualifiante organisée par l’Ecole nationale des ponts et chaussées. Le directeur adjoint chargé des collectivités et de la prospective au Syndicat intercommunal d’énergies du département de la Loire repart de la formation satisfait – il invitera tout son encadrement supérieur à suivre les mêmes cours – et armé d’outils concrets : « Lorsque je suis dans le couloir avant d’entrer dans la salle pour une réunion publique ou stratégique, pendant dix ou quinze secondes, je fais le blanc autour de moi. Je ferme les yeux, je me concentre sur les différents bruits qui m’entourent, et sur mes sensations. Cela me permet d’appréhender une situation complexe en toute sérénité. »

La grève pour le climat est-elle licite ?

Jean-Emmanuel Ray, dans sa chronique, précise les conditions d’acceptabilité du droit de grève face aux bouleversements et à l’urgence climatique.

Publié aujourd’hui à 06h30 Temps de Lecture 2 min.

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« Un arrêt de travail fondé sur ce seul motif [ le déréglemnt climatique] sera considéré comme illicite dans la plupart des pays développés »
« Un arrêt de travail fondé sur ce seul motif [ le déréglemnt climatique] sera considéré comme illicite dans la plupart des pays développés » Till Jacket / Photononstop

Droit social. Dans de nombreux pays, de puissantes manifestations ont eu lieu le vendredi 20 septembre contre le dérèglement climatique (« Fridays For Future »). Elles risquent de se reproduire, toujours un vendredi… Mais pour des raisons très différentes, un arrêt de travail fondé sur ce seul motif sera considéré comme illicite dans la plupart des pays développés.

En France, « l’exercice normal du droit de grève » exige l’existence de revendications professionnelles. De nature politique, un mouvement exclusivement fondé sur le changement climatique n’est donc pas licite ; à moins que ses organisateurs y ajoutent des revendications sociales sur la qualité de vie au travail, le télétravail… Sinon, il s’agit d’un « mouvement illicite » susceptible d’entraîner pour ses participants les mêmes sanctions disciplinaires que pour un salarié absent sans motif dans les mêmes conditions, avec un éventuel licenciement en cas de récidive.

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Seule exception : la très politique grève du 24 avril 1961 à la suite du putsch des généraux à Alger. Dans son arrêt du 16 juin 1963, la Cour de cassation n’avait pas évoqué le terme « grève », mais un « arrêt général de travail organisé par toutes les organisations syndicales en réponse à un appel du chef de l’Etat pour protester contre le mouvement insurrectionnel d’Alger ». Puisqu’il s’agissait d’un mouvement de civisme, l’employeur ne pouvait pas sanctionner un participant à cet « arrêt général » en forme de mobilisation des citoyens.

Une dynamique collective et consensuelle

Cette « illicéité » de principe est la même dans la plupart des pays du monde, car la grève est un « conflit d’intérêts » qui oppose les syndicats au « partenaire social adéquat » : l’employeur susceptible de négocier leurs revendications. Alors une grève mondiale pour le climat…

Sans parler du fréquent « devoir de paix », lié à la signature d’un accord collectif, aux Etats-Unis, au Canada ou en Allemagne. Pendant toute sa durée, les syndicats ne peuvent valablement déclencher une grève : s’ils le font tout de même, l’employeur pourra les assigner en responsabilité contractuelle.

Mais le contentieux n’est ni le droit ni la vie. Dans nos sociétés qui font la part belle à la réputation, l’entreprise médiatisée licenciant ainsi un collaborateur aurait sans doute judiciairement raison, mais médiatiquement tort.

La parité homme-femme progresse trop lentement en Europe

En dépit des progrès enregistrés ces dernières années, les Européennes restent moins payées que les Européens, et sous-représentées dans les hautes fonctions politiques comme économiques, selon un rapport.

Par Publié aujourd’hui à 11h10

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En France, les femmes touchent en moyenne 18 % de moins à la fin du mois
En France, les femmes touchent en moyenne 18 % de moins à la fin du mois GERARD JULIEN / AFP

Les femmes seront-elles, un jour, aussi bien payées que les hommes ? Peut-être, mais la route est encore longue. « L’Union européenne [UE] progresse vers l’égalité des genres à la vitesse d’un escargot » : tel est le constat dressé par l’Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes (EIGE), dans un rapport publié mardi 15 octobre. Selon ce dernier, sur une échelle de 1 à 100, l’indice d’égalité des genres en 2019 n’est que de 67,4 points pour l’ensemble de l’Union, soit 1,2 point de plus seulement qu’en 2015, et 5,4 points de plus qu’en 2005.

Pour construire cet indice, l’EIGE, institution liée à la Commission européenne, a mouliné une impressionnante quantité d’indicateurs dans chacun des 28 pays membres en matière d’emploi, de revenus, d’éducation, mais aussi de parité dans les postes de pouvoir (économique, politique), de temps consacré aux tâches domestiques et de santé. Dans chaque domaine, une note de 1 à 100 permet de mesurer les progrès réalisés ces dernières années par les Etats en termes d’égalité hommes-femmes, et de leur attribuer une note globale.

Sans surprise, les pays nordiques, en particulier la Suède (83,6 points) et le Danemark (77,5) sont en tête du classement, tandis que la Hongrie (51,9) et la Grèce (51,2) sont en queue de peloton. La France, elle, se situe au-dessus de la moyenne (74,6), devant le Royaume-Uni (72,2) et l’Allemagne (66,9). L’Italie est loin derrière (63), mais enregistre une remontée rapide (+ 13,8 points depuis 2005). Si, depuis quinze ans, la plupart des pays ont progressé, les changements restent lents, jugent les experts de l’EIGE. Voire inexistants dans quelques-uns, comme la Lituanie, dont la note stagne depuis 2005 (55,5).

En France, les femmes touchent en moyenne 18 % de moins

Le rapport fourmille d’informations permettant de mesurer le fossé séparant encore les Etats, pour des raisons autant liées à l’histoire qu’au système de prise en charge de la petite enfance, aux discriminations en entreprise et au manque de volonté politique. Ainsi, 72 % des enfants de moins de 3 ans bénéficient d’un système de garde formel au Danemark, contre 7 % seulement en République tchèque et moins de 1 % en Slovaquie, où la maternité est plus souvent synonyme de renoncement à l’emploi. « Partout, être mère continue d’entraver la carrière des femmes, surreprésentées dans l’emploi à temps partiel », résument les auteurs.

« La peur de la discrimination au travail est la première cause de non-syndicalisation »

Pour la première fois, un rapport d’organisations publiques met en évidence que des millions de salariés sont sanctionnés quand ils exercent une liberté inscrite dans la Constitution, expliquent dans une tribune au « Monde » trois militants de la CGT.

Publié aujourd’hui à 06h00 Temps de Lecture 4 min.

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« Il est maintenant officiel que c’est la peur, justifiée, de la discrimination au travail qui est la première cause de non-syndicalisation chez les salariés. »
« Il est maintenant officiel que c’est la peur, justifiée, de la discrimination au travail qui est la première cause de non-syndicalisation chez les salariés. » Fred De Noyelle/Godong / Photononstop

Tribune. Selon l’enquête sur les discriminations dans l’emploi du Défenseur des droits et de l’Organisation internationale du travail (OIT), la discrimination syndicale par les employeurs est un phénomène massif et répandu. 42 % des actifs estiment que s’ils exercent la liberté de se syndiquer, ils prennent un risque pour leur emploi, leurs conditions de travail, leur rémunération et leur déroulement de carrière.

Ce n’est pas de la paranoïa, puisque l’étude en question révèle que presque la moitié de celles et ceux qui ont pris ce droit de se syndiquer confirment qu’ils ont été victimes de représailles de la part de leur employeur. Et 67 % d’entre eux perçoivent leur engagement comme un risque professionnel. Enfin, le niveau de la répression augmente en cas de participation à l’activité syndicale, de prise de responsabilité dans les institutions représentatives du personnel, d’exercice d’un mandat de délégué.

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Il est maintenant officiel que c’est la peur, justifiée, de la discrimination au travail qui est la première cause de non-syndicalisation chez les salariés. Dans cette situation, que valent les déclarations patronales et gouvernementales sur l’importance d’une prétendue démocratie sociale ? Bien sûr, nous syndicalistes ne découvrons pas cette stigmatisation du syndicalisme que nous dénonçons depuis des années. En plus des mesures de rétorsion contre les syndiqués, il y a les attaques des médias, les procès contre les syndicalistes, les remises en cause des moyens et des locaux, les lois qui réduisent le droit syndical.

La stigmatisation du syndicalisme

En 2015, une analyse du Fonds monétaire international (FMI), passée elle aussi assez inaperçue, relevait l’existence d’un « lien entre la baisse du taux de syndicalisation et l’augmentation de la part des revenus les plus élevés dans les pays les plus avancés durant la période 1980-2010 ». Cette étude expliquait ce lien par le fait qu’« en réduisant l’influence des salariés sur les décisions des entreprises », l’affaiblissement des syndicats a permis « d’augmenter la part des revenus constitués par les rémunérations de la haute direction et des actionnaires ».

Comment manager des collaborateurs « ubérisés » ?

Alors que les entreprises n’hésitent plus à recourir aux services de travailleurs en free-lance, comment DRH et managers sont appelés à gérer ces collaborateurs venus de l’extérieur ? Un sujet abordé lors de la conférence « Entreprise hub ou Uber ? », organisée le 10 octobre par l’Observatoire des cadres de la CFDT.

Par Publié aujourd’hui à 10h21

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« Autre source d’inquiétude chez les DRH et les managers : alors que le recrutement de free-lances rend parfois le pas sur celui de salariés en interne, comment maintenir un collectif de travail ?. »
« Autre source d’inquiétude chez les DRH et les managers : alors que le recrutement de free-lances rend parfois le pas sur celui de salariés en interne, comment maintenir un collectif de travail ?. » Mosuno Media/Westend61 / Photononstop

A l’ère de « l’entreprise étendue », la sous-traitance de pans entiers de l’activité d’une entreprise à des travailleurs indépendants se banalise et s’accélère. Selon un bilan de la plate-forme de mise en relation Malt, BNP Paribas a recouru aux services de pas moins de 607 free-lances inscrits sur ce service (contre 307 en 2018), suivi de près par Orange (avec l’emploi de 530 free-lances inscrits sur Malt), Publicis (391)… Même les grands comptes n’hésitent plus à confier des projets, parfois d’envergure, à des prestataires extérieurs.

Sur le modèle popularisé par Uber, de nouvelles formes de collaboration voient le jour, par l’intermédiaire ou non d’une plate-forme de « free-lancing ». Lors de l’emploi d’un travailleur indépendant, le contrat de travail se voit remplacé par un contrat commercial entre le donneur d’ordres et le prestataire. Employeurs et direction des ressources humaines (DRH) se retrouvent alors face à un nouveau dilemme : comment manager ces collaborateurs non soumis au fameux devoir de subordination du salarié ? Tel était le sujet de la conférence Entreprise hub ou Uber ? organisée par l’Observatoire des cadres de la CFDT, le 10 octobre.

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« Quand on parle d’entreprise étendue, cela n’a rien de nouveau, rappelle en introduction Laetitia Vitaud, dirigeante du cabinet d’études spécialisé dans le futur du travail Cadre Noir Ltd. Depuis les années 1970, le dogme dominant est d’externaliser tout ce qui n’est pas le cœur de métier de l’entreprise, des femmes de ménage aux services support ». Une nouveauté néanmoins : la disparition du contrat de travail, qui régissait les relations entre employeurs et employés. Par ailleurs, « les free-lances ont inventé de nouvelles manières de travailler à travers le coworking, l’utilisation de logiciel en open source… », souligne la spécialiste. De nouvelles méthodes de travail en mode « collaboratif » et « agile », recherchées par les entreprises – en théorie.

Si la flexibilité des free-lances est appréciée, la disparition des rapports hiérarchiques, que sous-tend le statut de travailleur indépendant, se gère plus difficilement. « Les formes de contrôle et de pilotage des entreprises restent dépendantes des logiques habituelles », estime Pascal Ughetto, professeur à l’université de Paris-Est-Marne-la-Vallée et chercheur au sein du Laboratoire techniques, territoires et sociétés (LATTS).

Êtes-vous touché par la réforme des retraites ?

Les choses sont très simples : deux seuls cas de figure se présentent, explique Dominique Prévert, d’Optimaretraite.

Par Dominique Prévert Publié aujourd’hui à 06h00

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La prochaine réforme des retraites suscite beaucoup d’intérogations
La prochaine réforme des retraites suscite beaucoup d’intérogations Alain Le Bot / Photononstop / Alain Le Bot / Photononstop

Question à un expert

Qui sera concerné par la réforme des retraites ?

Vous ne pouvez pas ignorer que le gouvernement travaille actuellement à un nouveau système de retraite universel dit « à points ». Mais croulant sous les informations souvent confuses et quelquefois contradictoires, vous ne savez plus à quelle sauce vous allez être mangé ! Alors éteignez vos télévisions et vos radios et revenez aux choses simples et essentielles… car, en réalité, deux seuls cas de figure se présentent.

Soit vous êtes né en 1963 ou après, vous faites effectivement partie de ceux qui seront concernés par la prochaine réforme. Soyez alors vigilant et attentif aux nouvelles règles du jeu, qui vous concerneront forcément !

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Soit vous êtes né avant 1963, vous ne serez alors aucunement concerné par la réforme.

Dans ce cas, les règles du jeu qui prévaudront sont celles d’aujourd’hui. Ne vous laissez pas détourner des enjeux majeurs d’une stratégie de fin de carrière et de départ à la retraite que vous devez élaborer en identifiant notamment : votre âge légal de départ à la retraite, l’âge de votre taux plein, les possibilités de rachat de trimestres et l’intérêt de ce rachat, les possibilités de cumul emploi retraite, la manière dont vous protégez votre conjoint par la réversion… Tout cela continue de vous concerner de manière identique, et vous devez rester, dans la mesure du possible, pilote de vos propres choix en fonction de vos propres intérêts.

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« Les open spaces altèrent notre concentration mais aussi la qualité de nos interactions »

Le traitement du bruit en entreprise et des temps de récupération des salariés par le décloisonnement des espaces de travail est inapproprié, explique le neuroscientifique Gaëtan de Lavilléon, dans une tribune au « Monde ».

Publié aujourd’hui à 06h00 Temps de Lecture 3 min.

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« L’insatisfaction des salariés en open space viendrait à 25 % du bruit, qui arrive en tête des nuisances citées. »
« L’insatisfaction des salariés en open space viendrait à 25 % du bruit, qui arrive en tête des nuisances citées. » Plattform/Johnér / Photononstop

Tribune. Selon une étude récente conduite par l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS), l’insatisfaction des salariés en open space viendrait à 25 % du bruit, qui arrive en tête des nuisances citées. Et pour cause. Bien que notre cerveau soit un organe extrêmement puissant, notre attention, qui lui permet de traiter en priorité les informations les plus pertinentes, demeure très fragile : au moindre bruit, elle peut se retrouver « capturée », nous conduisant à changer d’activité en permanence – toutes les trois minutes en moyenne selon les conclusions d’une étude publiée en 2004 par deux chercheurs de l’Université de Californie.

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D’après l’auteur de l’étude de l’INRS, l’acousticien Jacques Châtillon, « la gêne ressentie est surtout liée aux conversations intelligibles qui empêchent de se concentrer sur autre chose ». La preuve, s’il en est, des limites rencontrées par le décloisonnement des espaces de travail.

Pire, et c’est pour le moins contre-intuitif, deux chercheurs de la Harvard Business School ont montré qu’en passant de bureaux fermés à des espaces ouverts, les salariés de plusieurs entreprises ont vu leurs échanges en face à face chuter de près de… 70 % ! Voilà donc une triple peine pour les salariés comme pour les organisations : les open spaces provoquent davantage de nuisances, altèrent notre concentration, mais aussi la qualité de nos interactions.

Sieste ou activité sportive

L’ambition originelle était pourtant louable : favoriser les échanges et la collaboration en décloisonnant l’espace. Malheureusement, cette transformation a été effectuée au détriment de la concentration des individus. Il est donc nécessaire de réinventer des espaces de travail pour concilier les activités propices à la collaboration et à la concentration de chacun.

Dans la région bordelaise, une équipe de courtiers – confrontée au bruit et à une promiscuité nécessaire à leur activité – a opté pour un espace de travail partagé circulaire favorisant une circulation immédiate des informations visuelles et sonores entre les salariés. Dans le même temps, à proximité immédiate, ont été également installées des cabines acoustiques leur permettant de s’isoler, afin de pouvoir « sortir du flux ».

« La crise de la représentation du monde politique est proche de celle qui touche les entreprises »

Dans une tribune au « Monde », la philosophe Sophie Berlioz et le sociologue Philippe Emont décrivent l’effet de dupe de l’actuel modèle de consultation français, qui aboutit à l’absence de dialogue social, en raison du refus d’écouter la parole exprimée.

Publié aujourd’hui à 06h00 Temps de Lecture 4 min.

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Tribune. La consultation citoyenne est à la mode, hier le grand débat, aujourd’hui les consultations sur les retraites. Pourtant, le dialogue social ne fonctionne pas. Certes, les vertus du concept sont louées, mais lorsque l’on quitte les éléments de langage, les belles idées se transforment alors en autant d’éléments de blocages. Blocages sociaux tous azimuts dont la crise des « gilets jaunes » représente sans doute l’événement le plus saillant.

Car, indépendamment de la violence qui s’est exprimée, cette crise est le symptôme d’un dysfonctionnement du dialogue social qui touche peu ou prou tous les secteurs, de la politique aux entreprises. En effet, tant que les réformes seront présentées par les gouvernants comme s’imposant logiquement et rationnellement (et donc sans autres possibilités), il continuera d’être inutile d’en discuter, et préférable de les appliquer rapidement.

Réformes conçues en « chambre »

La crise de la représentation qui touche aujourd’hui le monde politique est proche de celle qui touche les entreprises et altère la bonne conduite du dialogue social. De fait, il peine aujourd’hui à jouer son rôle de régulation ou à garantir la cohésion sociale. Pourquoi ?

Prenons le cas d’une restructuration d’entreprise. Les décisions stratégiques sont prises d’en haut. Les modalités de mise en œuvre de la décision sont conçues « en chambre » par des experts qui établissent ensemble une organisation cible.

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Les organisations cibles font ensuite l’objet d’une consultation auprès des instances représentatives du personnel. Les remarques formulées par ces dernières peuvent être prises en compte par les décideurs pour améliorer le projet, mais elles peuvent ne pas être prises en compte, et les décideurs mettront en œuvre le projet tel qu’initialement conçu.

Ce mouvement, à peine caricatural, est proche de la manière dont sont menées les réformes publiques, conçues en « chambre » par des experts, puis présentées aux organisations syndicales qui font part de leurs amendements. Ensuite débattues au Parlement, validées ou complétées, dans le cas où le 49.3 n’est pas activé. Enfin présentées aux Français de manière technique et rationnelle.

Effet de dupe

Très schématiquement, je décide d’un cap, j’en conçois les modalités de mise en œuvre, j’en informe les corps intermédiaires, je les consulte sur les modalités de mise en œuvre, et quel que soit leur avis, je suis tout à fait libre de ne rien changer dans les limites fixées par le droit.

Les chiffres chocs d’une enquête européenne sur les violences sexistes au travail

Un sondage réalisé dans cinq pays de l’Union et publié samedi révèle que 60 % des femmes ont subi des atteintes au cours de leur carrière.

Par Publié le 12 octobre 2019 à 05h16, mis à jour à 09h41

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JAMIE JONES / IKON IMAGES / PHOTONONSTOP

Six Européennes sur dix ont été un jour confrontées, au cours de leur carrière professionnelle, à des violences sexistes ou sexuelles. C’est l’un des chiffres chocs de l’enquête sur le sexisme au travail réalisée par l’IFOP pour la Fondation Jean-Jaurès et la Fondation européenne d’études progressistes, publiée samedi 12 octobre.

Ce travail a pour ambition de combler un manque : les dernières données sur le sujet remontent à 2014 pour la France (une enquête du Défenseur des droits) et elles datent de 2012 pour l’Europe (issues de l’Agence européenne des droits fondamentaux).

Cinq mille femmes, qui ont été interrogées en avril dans cinq pays de l’Union européenne (UE) – Allemagne, Espagne, France, Italie, Royaume-Uni –, témoignent de cette réalité contemporaine, malheureusement bien enracinée. Pour éviter que certains faits passent sous les radars, toute une série d’agissements, répétés ou non, allant du regard concupiscent jusqu’au rapport sexuel contraint, ont été passés à la loupe.

A chaque fois, les femmes ont été interrogées sur leur expérience au long de la vie et au cours de l’année écoulée. Sur cette période plus restreinte, 21 % des femmes en moyenne (18 % en France) se disent victimes d’au moins une manifestation de sexisme ou de harcèlement sexuel. Leurs réponses, qui s’inscrivent dans des contextes culturels différents, avec des seuils de tolérance qui peuvent varier, restent cependant éloquentes.

« La violence est une réalité quasi quotidienne pour une grande partie des femmes au travail », résume Juliette Clavière, directrice de l’Observatoire de l’égalité femme-homme de la Fondation Jean-Jaurès.

Sifflements et gestes grossiers

C’est en Espagne et en Allemagne que les femmes se déclarent plus volontiers victimes d’atteintes sexuelles ou sexistes au travail au cours de leur vie, respectivement 66 % et 68 % d’entre elles – contre 55 % des Françaises.

Gare toutefois aux interprétations hâtives, met en garde François Kraus, directeur du pôle « Genre, sexualité et santé sexuelle » de l’IFOP. La réponse aux questions dépend aussi du seuil de tolérance des femmes interrogées. Dans ces deux pays, des politiques publiques volontaristes sur le sexisme et des polémiques nationales récentes (vague d’agressions en Allemagne, affaire de la « meute » en Espagne) ont probablement eu un effet sur les consciences, estime-t-il.