Le chômage en nette baisse en France au 4e trimestre, à son plus bas niveau depuis fin 2008

Le taux de chômage a nettement baissé, de 0,4 point, au quatrième trimestre 2019 pour s’établir à 8,1 % de la population active et atteindre son plus bas niveau depuis fin 2008, selon les chiffres publiés par l’Insee jeudi 13 février.

La France (hors Mayotte) compte 2,424 millions de chômeurs, soit 85 000 de moins sur le trimestre. Sur un an, le taux de chômage, mesuré selon les normes du Bureau international du travail (BIT), est en recul de 0,7 point. L’Insee a aussi révisé son chiffre du 3e trimestre de 8,6 à 8,5 %.

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Le taux de chômage diminue de 0,5 point pour les personnes de 25 à 49 ans et pour celles de 50 ans ou plus, signale l’Insee. En revanche, il augmente nettement pour les jeunes (+1,1 point).

Sur Twitter, Olivier Dussopt, secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’action et des comptes publics, a souligné que « les investissements et les créations d’emplois dans le privé portaient leurs fruits ». Il a salué le « plus bas niveau de chômage depuis 12 ans ». La ministre du travail Muriel Pénicaud a, elle, estimé que l’objectif d’un taux de chômage à 7 % en 2022 était « franchement atteignable ».

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Au travail, l’homophobie se dévoile

« L’inclusion des salariés LGBT est un sujet qui s’est imposé aux entreprises à l’occasion de leur travail sur les questions de diversité »
« L’inclusion des salariés LGBT est un sujet qui s’est imposé aux entreprises à l’occasion de leur travail sur les questions de diversité » Ingram / Photononstop

Tabou pour les uns, non-sujet pour les autres, l’orientation sexuelle d’un salarié constitue pourtant une source de rejet au travail. Selon un sondage réalisé par l’IFOP pour l’Autre Cercle, une association qui œuvre pour l’inclusion professionnelle des personnes lesbiennes, gay, bisexuelles et transgenres (LGBT), pas moins de 10 % d’entre elles font état d’agressions physiques ou sexuelles à leur encontre au travail. Au total, un sondé sur quatre dit avoir été victime d’au moins une agression, verbale ou physique, dans son entreprise ou son administration. « Les résultats de l’enquête montrent que le problème est réel, déclare Alain Gavand, vice-président de la Fédération nationale de l’Autre Cercle, chargé de ce baromètre. Cela prouve aussi que l’orientation sexuelle et l’identité de genre ne peuvent être cantonnées à la sphère privée. »

Les agressions verbales sont les plus fréquentes. Moqueries, insultes et mises à l’écart s’avèrent les discriminations les plus subies par les personnes interrogées dans le cadre de cette enquête d’une ampleur inédite, réalisée par questionnaire auto-administré en ligne auprès de 1 229 personnes homosexuelles, bisexuelles et transgenres, extrait d’un échantillon de 13 346 personnes représentatives de la population métropolitaine âgée de 18 ans et plus, du 12 au 24 avril 2019.

A titre de comparaison, l’enquête a également été menée du 4 au 30 novembre 2019 auprès d’un échantillon de 16 953 salariés et agents travaillant dans des organisations engagées sur ces questions et signataires de la Charte LGBT + lancée par l’Autre Cercle.

Double peine

L’étude montre aussi le poids des discriminations fondées sur l’apparence : les hommes qui se décrivent comme d’apparence féminine et les femmes androgynes sont les plus nombreux à se dire victimes de ces moqueries (41 % et 42 % respectivement). Les facteurs discriminatoires se cumulent chez les salariés LGBT non blancs, qui sont 34 % à se déclarer victimes de pareilles attaques, contre 18 % chez les autres. Les salariés musulmans sont davantage touchés (40 %) que les catholiques (19 %) ou que ceux qui se déclarent sans religion (16 %). Les femmes sont aussi un peu plus nombreuses à subir des moqueries (23 % contre 17 % pour les hommes). « Les gens qui appartiennent à plusieurs groupes minoritaires subissent la double peine », commente Alain Gavand, qui souligne également le poids de la religion : « On l’a vu, par exemple, lors des manifestations contre le mariage pour tous. »

L’Assemblée nationale vote une loi pour encadrer le travail des enfants youtubeurs et influenceurs

L’Assemblée nationale a adopté une proposition de loi sur l’exploitation commerciale de l’image d’enfants de moins de 16 ans sur Internet.
L’Assemblée nationale a adopté une proposition de loi sur l’exploitation commerciale de l’image d’enfants de moins de 16 ans sur Internet. NICOLAS SIX / « LE MONDE »

Ils s’appellent Kalys, Athena, Néo, Swan, Fantin, Amantine ou encore Maellia. Ces jeunes Français sont les stars ou les contributeurs de chaînes YouTube qui cumulent plusieurs centaines de milliers de vues et d’abonnés.

Leur activité – qui peut paraître anodine mais est parfois très lucrative – de déballage de jouets et de scènes familiales du quotidien devrait être prochainement encadrée par le droit du travail. L’Assemblée nationale a en effet adopté, mercredi 12 février, en première lecture, une proposition de loi sur l’exploitation commerciale de l’image d’enfants de moins de 16 ans sur Internet.

A l’issue d’un débat plutôt consensuel, les 69 députés présents ont voté à l’unanimité pour le texte. Son rapporteur, le député (La République en marche, LRM) du Bas-Rhin et président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation à l’Assemblée nationale, Bruno Studer, salue « le résultat d’un travail transpartisan » sur ce dossier. Si la proposition de loi est adoptée au terme de son parcours législatif, la France serait à l’avant-garde en la matière.

Vide juridique

Le texte a comblé un vide juridique concernant une « nouvelle forme d’entrepreneuriat et d’expression artistique » ayant émergé ces dix dernières années, expliquait M. Studer au Monde en décembre 2019. Il s’agit tout d’abord d’étendre la législation en vigueur pour les enfants du spectacle aux activités rémunératrices des enfants youtubeurs, e-sportifs (participant à des compétitions de jeux vidéo) ou influenceurs.

La proposition adoptée va aussi plus loin en réglementant « la zone grise » des vlogs (contraction des mots « vidéo » et « blog ») familiaux, qui ne relèvent pas vraiment des relations de travail traditionnelles mais dépassent la simple activité de loisir. La loi prévoit ainsi dans son article 3 que seront concernées les activités de production de vidéos en ligne avec des mineurs dès lors qu’elles dépasseront un certain temps consacré, un volume de contenus ou « lorsque la diffusion de ces contenus produit, au profit de la personne responsable de la réalisation, de la production ou de la diffusion de celui-ci, des revenus directs ou indirects ». Les seuils seront fixés ultérieurement par décret en Conseil d’Etat.

Les créateurs de contenus qui embauchent des moins de 16 ans, qu’il s’agisse ou non des parents, devront aussi obtenir une autorisation auprès de la commission des enfants du spectacle, rattachée à chaque direction départementale de la cohésion sociale.

Comme pour les enfants acteurs et mannequins, les horaires et temps de tournage seront encadrés et la rémunération de ces contenus (par la publicité en ligne ou le placement de produit par exemple) sera en grande partie bloquée auprès de la Caisse des dépôts et consignations jusqu’à la majorité de l’enfant. L’autorité administrative pourra également saisir un juge des référés qui pourra contraindre la plate-forme à retirer les contenus des chaînes qui ne respecteraient pas la loi.

Responsabiliser les plates-formes

Les députés instaurent aussi un droit à l’oubli pour les enfants mis en scène sur les plates-formes en ligne. Même avant leur majorité, ils pourront s’adresser au service de partage de vidéos qui sera « tenu de faire cesser dans les meilleurs délais la diffusion de l’image du demandeur lorsque celui-ci était mineur à la date de ladite diffusion ».

Les plates-formes devront par ailleurs informer les usagers sur la loi, les droits de l’enfant et les risques psychologiques, « favoriser » un système de signalement et collaborer avec les associations françaises de protection de l’enfance.

« Les services de plate-forme de partage de vidéos [devront aussi adopter] des chartes visant à améliorer la lutte contre l’exploitation commerciale illégale de l’image d’enfants », mentionne la loi. Un dispositif placé sous l’égide du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), appelé à devenir l’Arcom dans le cadre de la future réforme de l’audiovisuel, qui pourra formuler des recommandations et dressera des bilans réguliers.

Car « il faut aussi responsabiliser les entreprises qui participent à la diffusion de ces images et en tirent des revenus, soutient le rapporteur. Elles doivent s’associer à cet effort, comme les parents. » Si le député avait échangé ces derniers mois avec YouTube, détenu par Google, et dit avoir « reçu un retour favorable de Snapchat », il déplore que les autres réseaux sociaux ne se soient pas associés aux discussions.

Bien que soutenant la proposition, certains députés, à l’instar de Muriel Ressiguier (La France insoumise, Hérault), ont toutefois regretté que les plates-formes soient seulement incitées à coopérer à travers l’élaboration de chartes et non contraintes.

« Ce n’est qu’un petit aspect de la question de la vie en ligne des mineurs, concédait avant l’examen de la loi Bruno Studer. Il restera aussi à se pencher sur la question de l’exposition à la violence et à la pornographie. Toutefois, cette proposition permet concrètement de garantir les intérêts supérieurs des enfants, de protéger aussi leur intimité et leur intégrité, de rappeler que le travail des enfants est interdit sauf dérogation. »

Et de se féliciter que ce texte « produise, avant même son adoption, des effets ». A l’initiative de Hasbro, un mastodonte du secteur, la Fédération française des industries jouet puériculture (FJP) a signé, en janvier, une charte éthique concernant le recours à des enfants influenceurs dans ses campagnes de promotion.

Retrouvez nos articles sur YouTube et les enfants

Le Monde a publié une série d’articles sur les liens parfois problématiques entre les enfants et YouTube, pour découvrir ce qu’ils regardent sur la plate-forme, mais aussi ce qu’ils y créent :

Quels sont les effets de la retraite sur le niveau de vie ? L’Insee répond

C’est par un pur hasard du calendrier statistique que l’Insee a publié, mercredi 12 février, en plein début sur la réforme des retraites, une étude portant sur les évolutions de niveau de vie des ménages avant et après le départ à la retraite. Un travail « photographique », portant sur six années, et qui permet de montrer que les régimes actuels ont un impact à la baisse du niveau de vie pour la majorité des ménages, mais produisent un tassement des inégalités entre les plus modestes et les plus favorisés.

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Les statisticiens ont travaillé sur un échantillon démographique représentant environ 4 % de la population française. Ils ont regardé l’évolution des niveaux de vie des personnes qui ont pris leur retraite en 2013 et qui sont âgées de 60 ans et plus, entre l’année 2010, trois ans avant leur départ, et 2016, trois ans après. « Ce qui n’inclut pas les personnes qui sont parties avant l’âge de 60 ans », met en garde Sylvie Le Minez, chef de l’unité Enquêtes et études démographiques, « soit qu’elles aient pris un départ anticipé, soit qu’elles appartiennent aux catégories actives de la fonction publique ». L’étude n’isole pas non plus les évolutions en fonction des régimes de retraite dont relèvent les ménages considérés.

Elle limite la pauvreté

Ces précautions posées, le passage à la retraite se traduit pour 56 % des personnes par une baisse du niveau de vie. Pour 42 % des nouveaux retraités, cette baisse est supérieure à 10 %. A l’inverse, 44 % d’entre eux bénéficient d’une hausse de leur niveau de vie : c’est notamment le cas si la fin de carrière a été heurtée (chômage, temps partiel…). Elle est supérieure à 10 % pour 32 % des nouveaux retraités. Pour des raisons liées au fait qu’ils perçoivent en général des revenus du travail supérieurs à ceux des femmes, les hommes ont plus à perdre que leurs compagnes lors du départ à la retraite. La baisse du niveau de vie se chiffre pour eux à 9,1 % en moyenne, contre 6,9 % pour les femmes. Au final, en 2014, soit la première année de perception des pensions de retraite, la pension moyenne déclarée à l’administration fiscale est de 1 470 euros par mois (1 120 euros pour les femmes, 1 910 euros pour les hommes), soit 86 % des revenus du travail perçus en 2010.

Ces évolutions contrastées ont un effet positif sur les inégalités, qui se tassent parmi les personnes fraîchement retraitées. En moyenne, le niveau de vie de ceux qui figuraient parmi les plus modestes en 2010 avait augmenté de 69 % en 2016 ; à l’inverse, ceux qui figuraient parmi les plus favorisés de 2010 avaient vu leur niveau de vie baisser de 27 % en 2016. Même chose entre diplômés du supérieur et non-diplômés : les premiers voient leur niveau de vie reculer de 11 % contre 3 % seulement pour les seconds.

Autre effet du passage à la retraite : elle limite la pauvreté. Parmi les ménages qui connaissent une fin de carrière difficile (chômage, précarité…) et qui se retrouvent sous le seuil de pauvreté, la liquidation des pensions permet de sortir de la pauvreté dans 37 % des cas. Trois ans après leur retraite, 7 % des personnes ont un niveau de vie inférieur au seuil de pauvreté, un chiffre deux fois moindre qu’au niveau national. Et, si la retraite n’empêche pas forcément les pauvres de le rester, elle ne fait « basculer » que 3 % des personnes dans cette situation.

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De l’avantage de faire du social au niveau mondial

« Lorsque la législation ou les usages locaux sont moins-disants, le socle de protection sociale pèse son poids face à la concurrence pour recruter des compétences. »
« Lorsque la législation ou les usages locaux sont moins-disants, le socle de protection sociale pèse son poids face à la concurrence pour recruter des compétences. » Andrew Baker/Ikon Images / Photononstop

Priorité au « social global » ! L’Oréal a publié, le 31 janvier, « un socle de droits humains et sociaux » qu’il s’engage à respecter pour « tous ses collaborateurs, quel que soit leur poste ou leur emplacement dans le monde ». Comment ? En appliquant la politique groupe lorsqu’elle est plus favorable que la législation locale. Depuis 2015 déjà, un socle mondial de protection sociale est déployé par l’entreprise de cosmétiques dans 67 pays.

Cette nouvelle initiative vise à garantir un « salaire décent à tous les collaborateurs de L’Oréal à travers le monde ». Elle reste toutefois floue quant à sa mise en œuvre : le groupe s’engage à atteindre « les meilleurs standards » par l’instauration de mesures « dès que possible ». Les responsables des ressources humaines sont chargés de faire respecter les droits humains dans toute l’entreprise.

L’avant-veille, c’est PSA qui signait un accord sur la motivation des salariés et l’environnement de travail (télétravail, dons de jours, formation), également destiné à s’appliquer, à terme, au niveau mondial. « Ce texte est plus qu’un accord. C’est une opportunité qui va nous aider à dynamiser le travail », a déclaré le DRH du groupe, Xavier Chéreau, à l’agence d’information AEF.

Mise en place petit à petit d’accords-cadres mondiaux

Avant d’entamer ses dix-huit mois de négociations avec les syndicats, le groupe PSA avait réalisé une grande étude comparative mondiale auprès des entreprises du secteur automobile pour se faire une idée des standards, pays par pays. « Le premier levier de notre réussite est notre capacité à fournir un bien-être à l’ensemble de nos talents. () Le but est également de faire remonter les spécificités de chaque pays », a précisé M. Chéreau.

Depuis plusieurs années, ce que les recruteurs nomment le « package social » est devenu un élément de rémunération courant dans les pays émergents.

Les droits fondamentaux prennent petit à petit leur place dans les accords-cadres mondiaux. Dans une étude de 2019, l’association Entreprise et droits de l’homme constatait que dix entreprises sur les seize ayant signé des accords-cadres mondiaux ces deux dernières années faisaient référence au Global Compact de 2000 (pacte mondial des Nations unies), six d’entre elles faisant prévaloir les standards internationaux sur les droits de l’homme en cas de loi locale défavorable.

Lorsque la législation ou les usages locaux sont moins-disants, le socle de protection sociale pèse son poids face à la concurrence pour recruter des compétences. Depuis plusieurs années déjà, ce que les recruteurs nomment le « package social » est devenu, par exemple, un élément de rémunération courant dans les pays émergents.

Faut-il créer des syndicats « verts » ?

« Aujourd’hui, la nécessaire transition énergétique frappe nombre d’entreprises dans leur cœur de métier : le moteur thermique dans le secteur automobile, les forages dans le pétrole »
« Aujourd’hui, la nécessaire transition énergétique frappe nombre d’entreprises dans leur cœur de métier : le moteur thermique dans le secteur automobile, les forages dans le pétrole » Ingram / Photononstop

Droit social Longtemps l’eau et l’air purs semblaient en quantité infinie, et pour l’éternité. Le « compromis fordiste » ayant dominé nos relations sociales pendant les Trente Glorieuses a longtemps ignoré les externalités négatives de ce consensuel productivisme. Aujourd’hui, la nécessaire transition énergétique frappe nombre d’entreprises dans leur cœur de métier : le moteur thermique dans le secteur automobile, les forages dans le pétrole. Transition d’autant plus problématique qu’elle se conjugue avec la révolution numérique porteuse de suppressions d’emplois.

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« Si le choix pour sauver la planète, c’est de perdre son boulot, le discours syndical va être compliqué », confiait, le 20 janvier 2020, le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez. L’opposition emplois/environnement est en effet un obstacle auquel sont désormais confrontés décideurs et syndicalistes. Mais se réapproprier ce thème majeur permettra aussi aux syndicats de se reconnecter aux jeunes générations, et aux entreprises de coconstruire leur « raison d’être » en organisant, sur le terrain, des groupes de travail sur ce thème d’intérêt général : conduite écologique, gaspillage énergétique et alimentaire.

La pétition en ligne, baptisée « Printemps écologique », propose, elle, de créer une « organisation interprofessionnelle de type nouveau : un écosyndicat, pour permettre un rôle actif des salariés dans la défense des intérêts environnementaux ».

La recherche de la représentativité

Qu’en dit le droit ? Rien n’empêche des salariés de déposer les statuts d’un syndicat porteur d’un tel message. Certes, depuis 1884, « les syndicats professionnels ont exclusivement pour objet l’étude et la défense des droits ainsi que des intérêts » de leurs adhérents. Mais ce cadre est interprété avec souplesse par la jurisprudence, sauf si ce syndicat n’est que le cache-nez d’un parti politique : « Un syndicat professionnel ne peut pas être fondé sur une cause ou en vue d’un objet illicite ; il en résulte qu’il ne peut poursuivre des objectifs essentiellement politiques » (C. Cass., 10 avril 1998).

Mais s’il veut négocier des accords d’entreprise « verdissants » (covoiturage, télétravail), le jeune « écosyndicat » devra devenir représentatif. Donc présenter des candidats aux élections professionnelles, et y obtenir au minimum 10 % des suffrages exprimés.

Le propre d’un syndicat responsable étant enfin de faire la synthèse d’intérêts contradictoires : l’obsession écologique d’un syndicat créé dans ce but risquerait de provoquer dans l’entreprise plus de « gauloises » radicalités que de consensuelle créativité

A la source des polémiques sur le travail

Economie du travail et de l’emploi, de Bernard Gazier et Héloïse Petit, La Découverte, 408 pages, 25 euros.
Economie du travail et de l’emploi, de Bernard Gazier et Héloïse Petit, La Découverte, 408 pages, 25 euros.

Le Livre. Choquantes pour les uns, les tendances à l’accroissement des rémunérations des patrons et des travailleurs les mieux payés ne reflètent, pour d’autres, que de nouvelles conditions de fonctionnement de l’économie et ne sont ni justes ni injustes. Un fait aussi important que l’existence et l’activité des syndicats est considéré par certains comme une entrave à la concurrence et par d’autres comme un facteur positif de structuration et de promotion du salariat.

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Quant à l’histoire du salaire minimum, elle est marquée de controverses sur sa légitimité et ses effets. C’est dire si l’économie du travail est parcourue de débats et controverses internes. Dans Economie du travail et de l’emploi, Bernard Gazier et Héloïse Petit dressent un état des lieux permettant de s’orienter au sein des multiples théories qui sont actuellement utilisées en économie du travail.

Les enjeux sociaux majeurs

L’ouvrage est structuré en chapitres thématiques qui abordent successivement la demande de travail, l’offre de travail, la détermination des niveaux de salaire et d’emploi, les mouvements sur le marché du travail, les qualifications et la formation, la discrimination, le contrat de travail et la définition des modèles d’entreprise, la négociation et les relations professionnelles, et enfin les institutions et modèles nationaux de capitalisme.

En analysant les politiques publiques qui visent à affecter le travail et en cherchant à évaluer leurs effets, l’économie du travail et de l’emploi est au cœur d’enjeux sociaux majeurs, rappellent le professeur émérite à l’université Paris-I et la professeure d’économie à l’université de Lille. « La vie matérielle de la très grande majorité de nos concitoyens dépend de leur intégration ou non dans l’emploi et de l’évolution au cours du temps de leur travail et de leur rémunération. Il est dès lors compréhensible qu’elle soit parcourue de débats et controverses internes. »

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Le manuel suit une démarche pluraliste, présentant diverses approches avec leurs forces et leurs faiblesses, leurs convergences et leurs divergences. Pour contrer l’impression de dispersion, un chapitre introductif retrace le déploiement des différents courants en économie du travail et de l’emploi.

Les alternatives au courant dominant souvent baptisées « hétérodoxes » ou « socio-économiques » ont suivi « un chemin différent, mais relativement synchrone. » Partagées en plusieurs courants, les dernières vagues d’innovations importantes datent aussi d’il y a près de vingt ans.

Pourquoi des groupes incitent leurs salariés à créer leur entreprise

L’accompagnement proposé aux salariés tentés par la création d’entreprise prend différentes formes : temps, argent, formation et contacts.
L’accompagnement proposé aux salariés tentés par la création d’entreprise prend différentes formes : temps, argent, formation et contacts. ALAIN LE BOT / PHOTONONSTOP

Voilà un an que Carole Neves a quitté le cocon de Sanofi pour voler de ses propres ailes, après vingt ans en R&D au sein du géant pharmaceutique. Elle a créé BiotechStudio, une start-up spécialisée dans les innovations en santé. Un envol qui s’est fait tout en douceur car Sanofi l’a aidée dans le cadre de sa politique d’« essaimage ».

Sofiane Belaïd a lui aussi créé sa société LinkiLab, une plate-forme de mise en relation entre des experts scientifiques et techniques, en janvier 2019, avec l’appui de son employeur, IFP Energies nouvelles (organisme de recherche dans les domaines de l’énergie, du transport et de l’environnement).

Cet accompagnement proposé aux salariés tentés par la création d’entreprise prend différentes formes : du temps, de l’argent, de la formation et des contacts. « J’ai pu consacrer un mi-temps à mon projet durant quelques mois tout en étant rémunéré comme si je travaillais à temps plein », apprécie Sofiane Belaïd. Le congé légal de création d’entreprise ne prévoit en effet pas de rémunération.

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Chez Air France, un consultant spécialisé propose un accompagnement individuel, et une formation interne de cinq jours est offerte en collectif. La compagnie aérienne propose également une aide financière allant de 15 000 euros pour un autoentrepreneur à 24 000 euros pour la création d’une société. L’entreprise mère peut aussi participer au capital de départ. Ainsi, avec une mise de 150 000 euros, IFP Energies nouvelles est entrée au capital de LinkiLab à hauteur de 5 %. Enfin, l’entreprise de départ peut mettre à disposition des créateurs son réseau : banques, assureurs, juristes…

Un accompagnement à la reconversion

La formule séduit. « La conjoncture est propice à l’entrepreneuriat, estime Mano Madi, responsable du pôle création d’entreprise de Sodesi, filiale d’Air France chargée d’accompagner la reconversion professionnelle du personnel navigant commercial. Il y a vingt ans, les jeunes diplômés souhaitaient travailler dans des grands groupes. La création d’entreprise n’était alors envisagée que par défaut. Aujourd’hui, c’est l’inverse. »

« Les seniors qui se sentent un peu à l’étroit en fin de carrière ou qui sont réfractaires à l’idée de retraite sont aussi tentés par la création ou la reprise d’entreprise », complète Laurent Legendre, président de Développement de l’initiative et de l’entrepreneuriat chez les salariés des entreprises (Diese), une association créée en 2000 qui regroupe une vingtaine de grands groupes pratiquant l’essaimage, dont Airbus, Orange, Schneider Electric, EDF, Saint-Gobain ou Thales.

Mineurs isolés étrangers : « Mes petits gars ne peuvent pas travailler »

Abdoulaye Konaté, Samuel Diallo et Sagata Diakité sur leur lieu d'apprentissage du métier de bordureur à La Courneuve le 6 février.
Abdoulaye Konaté, Samuel Diallo et Sagata Diakité sur leur lieu d’apprentissage du métier de bordureur à La Courneuve le 6 février. CAMILLE MILLERAND / DIVERGENCE

L’histoire relèverait de l’anecdote si elle ne se déroulait pas dans un territoire où les questions migratoires sont centrales. Avec 1 500 mineurs isolés étrangers pris en charge par les services de la protection de l’enfance (trois fois plus qu’en 2015), la Seine-Saint-Denis est le troisième département concerné par les flux migratoires de jeunes non accompagnés.

Autant de personnes dont l’insertion professionnelle est un enjeu central. Or, un des patrons de société de Saint-Denis, Francis Dubrac, à la tête d’une entreprise de travaux publics presque centenaire, Dubrac TP, reproche à la préfecture de ne pas l’autoriser à recruter une vingtaine de ces mineurs en apprentissage.

Alors que les grands chantiers des Jeux Olympiques de 2024, mais aussi du réseau de transport Grand Paris Express ou de rénovation urbaine, lui font convoiter de beaux marchés, Francis Dubrac n’arrive pas à embaucher de manœuvres et autres maçons de voirie dans le cinquième département le plus peuplé de France (plus de 1,6 million d’habitants).

Besoins de main-d’œuvre

D’aussi loin qu’il se souvienne, ce patron sait que les vagues migratoires, du Maghreb, du Portugal et du Mali, sont souvent venues répondre aux besoins de main-d’œuvre de l’entreprise familiale spécialisée dans l’aménagement de route. Les effectifs se renouvelaient par « cooptation », les personnels étaient formés par « compagnonnage » dans cette entreprise gérée de façon paternaliste, même si son dirigeant goûte peu cette qualification.

« Mais tous ceux qui dépassent la deuxième génération d’immigration, ils ne veulent plus bosser dans le BTP, constate-t-il depuis un moment. On embauche dix jeunes de quartier, il en reste cinq à l’arrivée. »

« Ce sont des gamins ponctuels, courageux, qui s’intègrent dans les équipes sans problème », note Francis Dubrac, à la tête d’une boîte de travaux publics.

Pour faire face à ses besoins d’embauches croissants, M. Dubrac, qui est aussi vice-président de la Chambre des métiers de l’artisanat du département, décide de mettre sur pied une formation de maçon de voirie par alternance et mobilise les acteurs locaux autour de lui (organismes de formation et intercommunalité) pour constituer une promotion d’une trentaine d’élèves. L’initiative rencontre un succès en demi-teinte, car seuls dix-sept apprentis signent. « Comme pour plein de métiers pénibles, peu valorisants, il y a une grosse problématique de main-d’œuvre », reconnaît Anne Gillet, mandatée par l’intercommunalité Plaine Commune pour accompagner cette démarche.

Air Italy annonce sa mise en liquidation

Un Boeing d’Air Italy, en mars 2018 à Washington.
Un Boeing d’Air Italy, en mars 2018 à Washington. JASON REDMOND / AFP

La compagnie aérienne italienne en difficulté Air Italy, qui a accumulé des centaines de millions d’euros de pertes, a annoncé mardi 11 février sa mise en liquidation, précisant que les vols seront assurés jusqu’au 25 février « par d’autres compagnies aux horaires et aux jours prévus ». « Tous les passagers ayant réservé des vols au départ ou à l’arrivée après le 25 février seront remboursés intégralement ou reprogrammés », indique la compagnie dans un communiqué.

Air Italy, ex-Meridiana, est détenue à 51 % par le prince Aga Khan et à 49 % par Qatar Airways. La compagnie avait convoqué une assemblée des actionnaires qualifiée mardi de « très délicate » par le quotidien italien La Repubblica. « Dans le cas, probable, où la recapitalisation ne se ferait pas, l’assemblée des actionnaires a comme autre hypothèse la liquidation de la société », écrivait le quotidien, rappelant qu’Air Italy emploie environ 1 200 personnes.

Lancée en grande pompe il y a deux ans, Air Italy avait misé sur « les difficultés d’Alitalia », le principal transporteur aérien italien, selon le quotidien spécialisé Il Sole-24 Ore, un calcul qui s’est révélé erroné. Selon ce journal, Air Italy a perdu 164 millions d’euros en 2018 et selon La Repubblica la perte en 2019 est d’environ 200 millions d’euros.

Réunion urgente demandée

L’annonce de la mise en liquidation est intervenue alors que la ministre des transports, Paola De Micheli, a demandé une « réunion urgente » avec la direction d’Air Italy, invitant cette dernière à « suspendre toute décision jusqu’à la réunion avec les ministères compétents ». « La décision de mettre en liquidation une entreprise de telle dimension, sans en informer au préalable le gouvernement, et sans examiner sérieusement d’éventuelles alternatives n’est pas acceptable », a déclaré Mme De Micheli, citée dans un communiqué.

Une rencontre consacrée à Air Italy pourrait se tenir mercredi matin au ministère du développement économique à Rome entre des dirigeants de ce ministère et des représentants de la région Sardaigne, où se trouvent environ 600 des 1 200 emplois menacés. Cette rencontre a été annoncée à la mi-journée par la partie sarde, peu de temps avant la décision sur la liquidation de la compagnie, et il n’était pas clair dans l’immédiat si cette réunion serait maintenue ni si des représentants de la compagnie aérienne seraient également présents.