L’OCDE appelle les Etats à soutenir l’emploi des jeunes

A Los Angeles, le 29 juin.

On les appelle déjà la « génération Covid ». Dans le sillage de la récession liée à la pandémie, les actifs de moins de 25 ans seront parmi ceux qui paieront l’un des plus lourds tributs. « La crise ne doit pas aboutir à une génération perdue de jeunes dont les carrières seront durablement affectées à cause des perturbations sur le marché du travail », prévient Angel Gurria, secrétaire général de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), en introduction des « Perspectives de l’emploi 2020 ».

Publiées mardi 7 juillet, celles-ci dressent un tableau plutôt sombre pour les prochains mois sur le front de l’emploi. Dans l’ensemble des pays de l’OCDE, le taux de chômage, qui s’établissait à 5,2 % en février, a grimpé à 8,4 % en mai et devrait s’établir à 9,4 % fin 2020. En France, il est passé de 7,6 % en février à 8,7 % en avril. S’il a un peu baissé en mai (8,1 %), lors de la réouverture de l’économie, il devrait néanmoins bondir à 12,3 % fin 2020, en dépit du chômage partiel. Et à condition qu’il n’y ait pas de deuxième vague épidémique. Si celle-ci devait se produire, il grimperait plutôt à 13,7 %, prévoit l’organisation.

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Sans surprise, certains travailleurs – indépendants, personnes en CDD, à bas salaires, jeunes et femmes – sont plus sévèrement touchés par la baisse de l’activité. « Cette situation est susceptible d’exacerber les inégalités sur le marché du travail », prévient l’OCDE. Les économistes rappellent, par ailleurs, que seuls 17 % des travailleurs les plus pauvres ont pu télétravailler en France, contre 38,5 % des plus riches.

« Il n’y a aucune minute à perdre »

Ces prochains mois, soutenir les profils les plus fragiles sera donc déterminant. « Après la crise de 2008, les gouvernements avaient agi trop tard et trop peu pour traiter les difficultés des jeunes sur le marché du travail, au prix de séquelles de long terme, encore visibles avant que l’épidémie ne démarre, rappelle Stefano Scarpetta, directeur de la direction de l’emploi, du travail et des affaires sociales à l’OCDE. Il n’y a aucune minute à perdre pour mettre en place un ensemble de mesures assurant qu’aucun jeune actif ne sera laissé de côté. »

Selon lui, il convient d’encourager les entreprises à embaucher les jeunes diplômés ou à leur offrir une première expérience par un stage, en les accompagnant par un soutien financier de l’Etat. L’organisation appelle également à renforcer l’apprentissage et la formation professionnelle, mais aussi à muscler la couverture chômage des travailleurs les plus précaires.

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Vives inquiétudes autour de la reconnaissance du Covid-19 comme maladie professionnelle

Une infirmière et un malade du Covid-19 à Nantes, le 19 mai 2020.

Le gouvernement est accusé d’avoir manqué à sa parole sur une question sensible : la reconnaissance comme maladie professionnelle du Covid-19 lorsque des travailleurs l’ont contracté dans le cadre de leur travail. Des responsables associatifs et syndicaux trouvent, en effet, qu’il y a un très net écart entre les annonces récemment faites sur ce dossier et les dispositions concrètes qui sont sur le point d’être prises. L’Association nationale de défense des victimes de l’amiante (Andeva) s’en est même émue, en parlant de « mensonge » dans une lettre adressée, lundi 6 juillet, au nouveau chef du gouvernement, Jean Castex.

A l’origine de ce courroux, il y a un projet de décret et un projet d’arrêté, que Le Monde a pu consulter. Ces textes sont censés traduire les engagements que l’exécutif a affichés, le 30 juin, dans un communiqué diffusé par les ministères du travail et des solidarités et de la santé, ainsi que par le secrétariat d’Etat à la réforme des retraites. Il faisait état d’« une reconnaissance automatique » et systématique pour les soignants et d’« une reconnaissance facilitée » pour les autres professionnels « ayant travaillé en présentiel pendant la période du confinement ».

« Parcours du combattant »

Ces intentions, évoquées à grands traits, avaient déjà été critiquées par plusieurs associations et syndicats, au motif qu’elles manquaient d’ambition et introduisaient un régime à deux vitesses (entre les soignants et les autres). Aujourd’hui, la déception s’est muée en colère chez certains protagonistes, l’Andeva qualifiant de « mesquinerie » le projet de décret.

Aux yeux de cette association, les « promesses (…) ne seront pas tenues sur deux points essentiels ». S’agissant des soignants, seule « la prise en charge des séquelles respiratoires graves » du Covid-19 sera possible. « Toutes les autres séquelles sévères de cette maladie – séquelles rénales, neurologiques… – sont exclues, s’alarme l’Andeva. Cela constitue une iniquité flagrante entre les catégories de malades. » Quant aux non-soignants, elle juge que le texte « les envoie dans une impasse totale » : « Ils devront établir “un lien direct et essentiel” entre leurs conditions d’exposition et leur pathologie » – ce qui, en matière de Covid-19, est « absolument impossible ».

« On se gargarise de grands flonflons à propos des soignants, mais, dès qu’il s’agit de passer aux travaux pratiques, les mesures ne suivent pas », estime Alain Bobbio, de l’Andeva

Un tel décalage entre la parole et les actes « inspire du dégoût », confie Alain Bobbio, secrétaire national de l’Andeva : « On se gargarise de grands flonflons à propos des soignants, mais, dès qu’il s’agit de passer aux travaux pratiques, les mesures ne suivent pas. » Un avis partagé par Catherine Pinchaut, qui suit ces dossiers à la CFDT : « On est loin d’une reconnaissance automatique pour les soignants, y compris pour des séquelles qui pourraient survenir demain. » C’est d’autant plus dommageable, selon elle, que de tels choix tombent en plein Ségur de la santé – la concertation destinée à améliorer le sort des personnels de santé. Quant aux autres catégories de travailleurs, elle déplore que « la charge de la preuve soit de [leur] responsabilité ». « Ça va être le parcours du combattant et beaucoup vont laisser tomber », craint-elle.

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« Dispositif plus restrictif »

Alors qu’il avait accueilli favorablement le communiqué gouvernemental du 30 juin, Pierre-Yves Montéléon (CFTC) s’interroge désormais : « On peut imaginer que le dispositif envisagé soit plus restrictif que ce qui avait été dit au départ », observe-t-il. « Dans la liste limitative des travaux susceptibles de provoquer la maladie, on ne retrouve pas ceux accomplis par des médecins de ville », s’inquiète, pour sa part, Alain Prunier, de l’Association des accidentés de la vie. Pour les soignants, il relève que le délai de prise en charge est tel qu’il pourrait exclure du dispositif des personnes ayant développé la maladie bien après avoir été exposées à des situations à risque.

Seule Force ouvrière se montre moins critique : « Cela va dans le bon sens, même si ce n’est pas parfait, estime Serge Legagnoa, chargé de ces questions pour la confédération. On aurait préféré que, pour les non-soignants, il y ait une reconnaissance plus directe, mais on a quand même une facilitation [des démarches] qui n’était pas prévue jusqu’à présent. »

Au ministère des solidarités et de la santé, on assure rester « à l’écoute » et que « les principes énoncés dans le communiqué seront au cœur du dispositif » qui sera construit.

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Valeo met la pression sur ses salariés en France pour réduire ses coûts

A l’usine Valeo d’Etaples (Pas-de-Calais), le 26 mai.

« Eviter des mesures douloureuses pour l’emploi. » C’est, selon les termes de la direction du groupe, l’objectif que s’est fixé l’équipementier français Valeo, en ouvrant, mardi 30 juin, des négociations avec les syndicats. Il souhaite conclure, en septembre, un accord de performance collective en vue « d’une réduction des coûts salariaux français de 10 %, soit 100 millions d’euros ».

« Nous faisons face à une crise incroyable, bien pire que celle de 2008, explique au Monde la direction. Il y a une véritable nécessité de travailler sur la compétitivité de l’entreprise dans le cadre d’un dialogue social constructif. » La crise qui touche la filière automobile est de grande ampleur. Le marché européen pourrait chuter de 25 % en 2020. Valeo – 114 000 salariés dans le monde, dont 14 000 en France et 19 milliards d’euros de chiffre d’affaires – prévoit « une baisse de son chiffre d’affaires de 10 % en moyenne sur les cinq prochaines années », selon un document remis aux syndicats. « Il est donc nécessaire d’adapter nos coûts d’investissement, de R&D, de personnel… en conséquence. » « Notre priorité reste le cash », avertissait déjà, le 24 juin, le PDG de Valeo, Jacques Aschenbroich, dans un entretien au Monde.

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« C’est une négociation sans tabous », a annoncé le directeur des ressources humaines, Bruno Guillemet, aux représentants du personnel. Et les sujets soumis à discussion en témoignent : jours de congé, flexibilité horaire, incitation aux congés sans solde, gel des salaires, rémunération des ingénieurs et des cadres, montant des indemnités de départ à la retraite ou de licenciement, majoration des heures de nuit, intéressement, etc. Jusqu’aux primes liées aux médailles du travail. Pour le moment, il ne s’agit que « d’axes de travail » sur lesquels la direction souhaite « recueillir les premières réactions et propositions des organisations syndicales ».

« La production est redevenue proche de son niveau d’avant-crise »

« La crise est un effet d’aubaine pour remettre en cause un certain nombre d’accords », estime Pascal Phan, le délégué syndical central de la CFE-CGC. Une analyse partagée par la CGT : « Valeo veut aussi profiter de la crise pour faire de la marge» Selon Olivier Renaglia, le délégué central de la CGT, il y aurait en filigrane une tentative de « revenir sur des accords d’entreprise plus avantageux que la convention collective de la métallurgie ».

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Les syndicats ont aussi des interrogations sur le niveau de l’effort demandé. « La production est redevenue proche de son niveau d’avant-crise », estime M. Renaglia, qui reconnaît toutefois que le développement de nouveaux produits souffre du report ou de l’abandon de projets de la part des constructeurs automobiles. « Pourquoi 100 millions d’euros d’économie et pas 50 millions ou 200 millions ? », s’interroge de son côté M. Phan, qui souligne la difficulté à faire des prévisions d’activité au-delà de quelques mois.

« Pour le moment, aucun engagement de la direction »

Créés par les ordonnances Macron de 2017, les accords de performance collective prévoient, pour un temps limité, des concessions de la part des employés en échange d’engagements sur le maintien ou sur le développement de l’emploi. « Pour le moment, il n’y a aucun engagement de la part de la direction sur des contreparties, souligne M. Phan. S’il n’y a pas d’engagements sur le maintien de l’emploi, sur le fait qu’il n’y ait pas de licenciements pendant une période déterminée et sur la pérennisation de l’activité sur l’ensemble des sites, nous ne signerons aucun accord. »

Pour absorber les conséquences de la crise, Valeo aimerait bénéficier du nouveau dispositif de chômage partiel de longue durée en vigueur depuis le 1er juillet. Il faut toutefois la signature d’un accord collectif et des engagements de la part de l’employeur en termes de maintien de l’emploi. « Il ne faudrait pas que ce soit un moyen de flexibiliser le travail et une manière détournée de faire payer les salariés par l’Etat », avertit M. Renaglia.

Valeo a prévu un rythme de réunions soutenu – la prochaine doit avoir lieu le 17 juillet – pour tenter de trouver un accord. « Au niveau du groupe, le dialogue social est en général d’un bon niveau », reconnaît M. Phan. Mais, au vu des concessions demandées, les contreparties devront être significatives.

Bilan d’Elisabeth Borne à l’écologie : la poursuite de la « politique des petits pas »

Elisabeth Borne, alors ministre de l’écologie, le 12 juin 2020.

Le passage à la tête du ministère de la transition écologique et solidaire d’Elisabeth Borne n’aura duré qu’une cinquantaine de jours de plus que celui de son prédécesseur, François de Rugy, 354 contre 300. Mais, à la différence de ce dernier, qui a dû démissionner pour « dépenses excessives » le 16 juillet 2019, ou encore de Nicolas Hulot, qui a quitté le navire gouvernemental à la fin d’août 2018, jugeant la politique écologique du gouvernement d’Edouard Philippe trop timide, Mme Borne quitte son poste à l’occasion d’un mouvement collectif, la démission de tout le gouvernement, vendredi 3 juillet. Elle reste néanmoins dans le nouveau gouvernement de Jean Castex, présenté lundi 6 juillet, comme ministre du travail, de l’emploi et de l’insertion. La reconnaissance sans doute de ses capacités à se saisir de dossiers complexes, avec des oppositions importantes, ce qui sera nécessaire à cette polytechnicienne qui fut présidente de la RATP, et qui devra mener à leur terme les réformes des retraites ou de l’assurance-chômage.

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Au fil des changements dans le poste, qualifié de « ministère de l’impossible » par Robert Poujade – premier ministre de l’écologie sous la présidence de Georges Pompidou en 1971, décédé le 8 avril 2020 –, il se confirme que les marges de manœuvre du locataire de l’hôtel de Roquelaure sont limitées. Et que l’avancée des politiques écologiques dépend d’abord des capacités à gagner des arbitrages en réunions interministérielles, et de la confrontation avec des ministères toujours puissants, comme celui de l’économie ou celui de l’agriculture.

Elisabeth Borne a ainsi dû assumer le pataquès gouvernemental, et les rétropédalages consécutifs, à l’hiver 2019-2020, autour de l’amendement sur l’huile de palme, alors que les députés voulaient retirer à celle-ci le bénéfice des avantages fiscaux liés aux biocarburants. « C’était compliqué pour elle de peser face [au ministre de l’économie et des finances] Bruno Le Maire. Elle s’est retrouvée dans des contradictions qui montrent bien que l’on reste dans la politique des petits pas, comme l’avait dénoncé Nicolas Hulot. Elle a fait ce qu’elle a pu », observe ainsi Jean-François Julliard, directeur général de Greenpeace France.

« Alors que l’écologiste le plus populaire de France n’a pas réussi et a démissionné, il est évident que ce ministère est d’une instabilité chronique, qui renvoie aux choix du président de la République et du premier ministre », juge aussi Delphine Batho, députée Ecologie Démocratie Solidarité (EDS) des Deux-Sèvres et ancienne ministre de l’écologie.

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« Mimosa » : le nouveau plan d’économies qu’élabore EDF

EDF se prépare à trois années difficiles. Selon nos informations, le premier producteur d’électricité en Europe a engagé, en interne, un vaste plan d’économies, baptisé « Mimosa », qui vise à combler les pertes causées par la crise sanitaire, qui devraient se situer entre 2 milliards et 3 milliards d’euros. Le groupe étudie plusieurs possibilités : des cessions d’actifs importants, un gel des embauches et des investissements, tout en cherchant des réductions budgétaires à tous les étages.

Selon plusieurs sources internes, la direction a demandé aux différentes branches et filiales de présenter des budgets revus à la baisse. Selon des documents consultés par Le Monde, le groupe souhaite stabiliser ses dépenses d’exploitation pendant les deux prochaines années et réduire fortement ses investissements. « Pour atteindre 2,5 milliards d’euros d’économies, il n’y pas beaucoup de choix, il faudra faire une grosse cession », souligne une source interne. « On nous a demandé de faire remonter toutes les possibilités d’économies », rapporte un responsable d’une filiale importante.

Interrogée par Le Monde, la direction d’EDF confirme l’existence d’un tel plan, sans pour autant en livrer les détails, qui doivent être présentés, fin juillet, au conseil d’administration. « Les arbitrages définitifs ne sont pas encore pris », précise une source interne.

« Attentifs à ce qui n’est pas immédiatement indispensable »

Le PDG du groupe, Jean-Bernard Lévy, a lui-même évoqué ce plan dans le journal de l’entreprise, vendredi 3 juillet. « Certains ont entendu parler d’un plan d’économies baptisé “Mimosa”, explique M. Lévy. Tout en réduisant certaines dépenses, nous n’abandonnons aucun de nos grands projets. (…) Nous ne renoncerons à rien d’essentiel, mais, dans quelques cas, nous retarderons certaines dépenses, nous étudierons certains actifs du groupe si c’est nécessaire, et nous serons très attentifs à ce qui n’est pas immédiatement indispensable. »

« On n’a plus grand-chose à vendre qui ne soit pas stratégique », s’inquiète un syndicaliste

L’entreprise sort déjà d’une cure d’économies relativement sévère. En 2016, au moment de sa recapitalisation par l’Etat, elle s’était engagée à économiser 1 milliard d’euros par an et à céder 10 milliards d’euros d’actifs. L’objectif a été tenu. Réaliser 2,5 milliards d’euros d’économies supplémentaires représente un effort très significatif. « D’autant qu’on n’a plus grand-chose à vendre qui ne soit pas stratégique », s’inquiète un syndicaliste.

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Suzanne Berger : « Nous sommes à la veille d’une nouvelle organisation technologique »

Et si la crise accélérait l’émergence d’une nouvelle forme de mondialisation ? Peut-être bien, car les nouvelles technologies, telles que les imprimantes 3D, permettent de repenser les chaînes de production, explique Suzanne Berger, professeure de sciences politiques au Massachussets Institute of Technology (MIT), et autrice de plusieurs ouvrages sur la mondialisation. Intervenante aux rencontres « Aix en Seine » (3 au 5 juillet à Paris), elle insiste sur la nécessité de protéger les communautés fragilisées par l’ouverture des frontières.

Cette crise va-t-elle sonner le glas de la mondialisation telle que nous l’avons connue ces dernières années ?

La pandémie a frappé dans un contexte où celle-ci était déjà remise en question. La montée des populismes, comme le Brexit, souligne le mécontentement croissant des populations à l’égard d’une mondialisation jugée incapable de fournir une protection efficace contre une série de dangers, attisant la peur de l’étranger.

Beaucoup ont aussi découvert pendant cette crise que certains produits n’étaient pas disponibles à cause de la rupture des approvisionnements. Dans certains pays, cela a intensifié le désir de produire chez soi. Mais ce serait une erreur.

Enfin, les institutions internationales, telles que l’Organisation mondiale de la santé [OMS], ont été incapables d’agir efficacement face au Covid19 – en partie à cause de l’attitude des Etats-Unis, mais pas seulement. Les maux du multilatéralisme sont plus larges. Cela pose une question fondamentale : y a-t-il une incompatibilité entre la mondialisation et la démocratie ?

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Y a-t-il vraiment incompatibilité ?

Je ne pense pas. Mais il est urgent d’imaginer comment protéger ceux qui sont exposés lorsque l’on ouvre les frontières. Les politiques d’ouverture doivent s’accompagner de politiques intérieures évitant que certains secteurs industriels ne paient le prix fort, accompagnant les communautés souffrant le plus du déclin industriel, comme on l’a observé aux Etats-Unis au début des années 2000.

C’est essentiel, car le nationalisme, incontrôlable à bien des égards, nous met en danger : les tensions risquent de ne pas se limiter à l’économie et de déraper en conflits bien réels.

La mondialisation fait des perdants. Pourquoi ne l’a-t-on pas compris plus tôt ?

En partie parce que ce mouvement s’est singulièrement amplifié après 2001, à la suite de l’entrée de la Chine dans l’Organisation mondiale du commerce [OMC], sans que l’on en mesure tout de suite les conséquences. Celle-ci a entraîné des pertes d’emplois aux Etats-Unis, localisées dans certaines industries et régions, où l’on a observé un niveau élevé de vote en faveur de Donald Trump lors de la dernière élection présidentielle.

Néanmoins, la gestion calamiteuse de la pandémie par celui-ci va peut-être changer la donne dans ces régions.

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Comment l’attitude des Etats-Unis à l’égard de la Chine a-t-elle évolué depuis 2001 ?

Si l’on schématise, le désir des industriels américains de faire du business avec la Chine l’a longtemps emporté sur d’autres considérations. Désormais, ces industriels ont changé d’attitude : ils ont épuisé les possibilités de produire à bas coût dans l’Empire du Milieu, et se heurtent à l’impossibilité d’y vendre des produits plus haut de gamme, car Pékin bloque.

Du côté politique, les démocrates comme les républicains ont également ouvert les yeux. Ils ont longtemps été trop naïfs à l’égard de la Chine, aveuglés par la recherche de profits liés aux implantations d’usines sur place, fermant les yeux aux problèmes politiques et démocratiques.

Cette prise de conscience peut-elle accélérer des relocalisations vers les Etats-Unis ?

Je ne crois pas. La production de masse ne reviendra pas aux Etats-Unis. Ce n’est d’ailleurs pas souhaitable, car les emplois dans de telles usines sont difficiles. En outre, la base industrielle du pays a changé : elle est plus spécialisée, s’est tournée vers les nouvelles technologies. En revanche, il est possible de diversifier les sources d’approvisionnement en nous tournant vers d’autres pays d’Asie, comme le Vietnam.

Comment ces chaînes de production peuvent-elles évoluer au cours des prochaines années ?

Après les années 1980, l’organisation des entreprises, jusque-là très verticale, a été bouleversée en partie sous la pression des marchés financiers : les entreprises ont désintégré leurs structures industrielles pour, par exemple, fabriquer en Chine un produit imaginé aux Etats-Unis.

Aujourd’hui, nous sommes peut-être à la veille d’un renversement de cette tendance à la désintégration, au profit d’une nouvelle organisation technologique et industrielle, grâce aux nouvelles technologies telles que l’intelligence artificielle et les imprimantes 3D. Il ne faut néanmoins pas surestimer la vitesse de ces changements.

Que voulez-vous dire ?

Il y a quelques années, on prédisait qu’en 2020 les robots auraient remplacé un grand nombre de travailleurs et que les voitures autonomes auraient chassé les véhicules traditionnels. Certains de mes collègues du MIT sont encore convaincus que l’automatisation va détruire beaucoup d’emplois. Je pense plutôt qu’elle s’inscrira en complément, et que ce mouvement sera plus lent qu’ils ne l’estiment.

Mes étudiants et moi allons voir comment les entreprises américaines adoptent les nouvelles technologies : il y a une forme d’inertie, en particulier dans les TPE et PME. C’est lent, coûteux, et elles auront encore moins de marges de manœuvre financières pour investir dans ces technologies, au sortir de cette crise. D’autant que l’achat d’un robot représente un quart seulement du coût lié à l’intégration de ce dernier : il faut également changer les modes de production, les logiciels, l’organisation…

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La récession va-t-elle pénaliser un peu plus encore nos usines ?

Aujourd’hui, les inquiétudes portent moins sur l’industrie que sur les services, en particulier le tourisme, première victime de la pandémie.

L’essor du télétravail, qui devrait durer, aura également des impacts collatéraux sur certains secteurs. Notamment sur l’immobilier commercial – qui, à l’avenir, aura besoin d’autant de bureaux si l’on travaille plus à la maison ? –, mais aussi, les services liés : restaurants implantés autour des entreprises, pressings, etc.

Quelles sont les autres tendances à l’œuvre accélérées par cette crise ?

Cela n’a pas de rapport avec la pandémie, mais l’un des événements les plus significatifs est, selon moi, le mouvement de protestation contre les violences policières et le racisme déclenché par la mort de l’Afro-Américain George Floyd. Il y a beaucoup de Blancs dans les manifestations. Nombre d’entreprises et d’Etats américains ont pris des mesures pour limiter ce qui s’apparente à du racisme institutionnalisé.

La prise de conscience et la reconnaissance de ces injustices sont plus profondes encore que pendant les années 1970. Je pense que cela aura des conséquences sur la prochaine élection présidentielle, et au-delà.

Les protestations Black Live Matters ont, en outre, inspiré des mouvements dans d’autres régions du monde. Cela restaure un peu le soft power américain, mis à mal ces dernières années, et l’image des Etats-Unis, toujours à même d’inspirer un mouvement positif au-delà de leurs frontières.

« Quand les dividendes de 2019 compromettent la survie des entreprises en 2020 »

Pertes & profits. Le dividende a mauvaise réputation par les temps qui courent. Face la plus visible de la rémunération d’un actionnaire, il concentre tous les reproches que l’on peut adresser à la finance, à la Bourse et au capitalisme en général : celui d’une forme d’enrichissement sans effort, au même titre que l’intérêt d’un emprunt. En période de catastrophe économique, comme en ce moment, il est le symbole de l’aléa moral. Comme si Air France, aidé massivement par l’Etat et préparant le départ de plus 7 500 de ses salariés, choisissait de continuer à verser un dividende confortable à ses actionnaires.

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Il est pourtant un rouage essentiel de la grande machine à recycler le carburant financier de nos économies. Il rémunère l’épargne des fonds de retraite ou des assurances-vie, et permet aux actionnaires de réallouer leurs économies vers d’autres sociétés qui ont besoin d’argent, parce qu’elles sont en croissance ou en difficulté. La Bourse a été créée pour financer des aventures entrepreneuriales et fournir des moyens à une société en toute transparence et de disposer, grâce à ses actions cotées, d’une monnaie échangeable pour faire des acquisitions.

Déclarations ronflantes

Ce cercle vertueux demande un équilibre subtil qui peut être facilement rompu. Cette part supposée des bénéfices peut entrer en conflit avec les autres usages que peut faire l’entreprise de l’argent gagné : augmenter ses salariés (ou en embaucher d’autres) et accroître ses investissements. La bonne gestion consiste à tenir ces trois fils sans qu’aucun ne se casse.

A chaque crise boursière, et surtout depuis celle de 2008, on tente de modérer l’appétit des investisseurs pour le rendement à court terme. Rien n’y fait, en dépit des déclarations ronflantes sur la responsabilité sociale et le souci du long terme. Selon une étude révélée par le Financial Times, peu suspect d’anticapitalisme primaire, les dividendes de 2019 pourraient compromettre la survie de bien des entreprises en 2020. 37 % des sociétés qui composent l’indice américain S&P 500 ont versé, en 2019, des dividendes (ou procédé à des rachats d’actions, ce qui est équivalent) pour un montant supérieur à l’ensemble de leurs bénéfices nets de l’année. C’est un peu moins en Europe, autour de 29 %.

Lire l’éditorial du « Monde » : Face à la pandémie de Covid-19, les dividendes peuvent attendre

Ce qui signifie qu’elles ont dû emprunter pour le faire ou puiser dans leur trésorerie. A l’époque, l’argent était tellement peu cher et le ciel économique si bleu… En ce début d’été 2020, c’est une autre histoire. L’argent n’est plus si bon marché dès lors que la dette des entreprises est dégradée. Ce qui contraint les Etats qui le peuvent à voler à leur secours, et ralentit donc la reprise économique. A trop privilégier l’actionnaire, on compromet son intérêt et celui de tous.

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« En empêchant l’entrée de nouveaux immigrants, Trump pénaliserait l’économie américaine »

Des migrants guatémaltèques, expulsés des Etats-Unis, arrivent à l’aéroport de Guatemala, le 9 juin.

La crise liée à la pandémie risque de creuser encore les écarts de salaires entre les travailleurs très qualifiés et peu qualifiés, prévient Jennifer Hunt, professeure d’économie à l’université Rutgers (Etats-Unis), intervenant aux rencontres « d’Aix en Seine », qui se sont tenues du 3 au 5 juillet à Paris.

Ancienne chef du département américain du Travail (2013–2015) passée par le Trésor américain, cette spécialiste de l’immigration estime également qu’en fermant partiellement ses portes aux travailleurs étrangers, l’économie américaine serait durablement affaiblie.

Quelles séquelles cette crise laissera-t-elle, à long terme, sur les marchés du travail ?

Cela dépend des pays et il est encore trop tôt pour le dire. Mais une chose est sûre : les cicatrices seront probablement plus marquées dans ceux qui, au moment où la pandémie a frappé, n’avaient pas encore retrouvé leur niveau de production d’avant la récession de 2008, comme l’Italie.

Le chômage partiel a protégé des millions d’emplois pendant le confinement en Europe. Sa prolongation ces prochains mois pourrait également contribuer à maintenir des emplois qui, sans la crise, auraient disparu. Est-ce un problème ?

Ces mécanismes ont été efficaces pour permettre aux entreprises de conserver leurs salariés, leur éviter d’avoir à s’en séparer pour tenter de les réembaucher plus tard.

Si en raison d’un rebond de la pandémie, ces dispositifs se prolongent au-delà d’un an, il y a un petit risque : celui de voir l’Etat subventionner des anciennes façons de travailler, de maintenir des emplois peu appareillés au regard des évolutions de l’organisation technique. Mais ce risque reste largement secondaire et limité au regard des coûts qu’un chômage de masse engendrerait.

La hausse du chômage dans les économies avancées va-t-elle se traduire par une nouvelle augmentation des inégalités ?

En termes salariaux, l’écart risque en effet de se creuser encore entre les travailleurs très qualifiés et les peu qualifiés. Ces derniers sont plus durement pénalisés pendant les récessions, car ils occupent des emplois plus fragiles. En outre, le travail à distance a bien souvent été impossible pour eux pendant le confinement.

Ajoutons que la récession actuelle est différente de la précédente à bien des égards. Celle de 2008 avait frappé en premier lieu les hommes, surreprésentés dans les secteurs de l’industrie et de la construction. Cette fois, les femmes, plus nombreuses dans le tourisme, l’hôtellerie-restauration et le commerce de détail, sont les premières affectées – du moins, jusqu’ici.

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Les ingénieurs, victimes collatérales de l’aéronautique en crise

Les premières turbulences de la tornade qui s’est abattue à l’échelle mondiale sur l’aéronautique commencent à se faire durement ressentir sur les sociétés d’ingénierie du territoire toulousain. A l’image d’Airbus, leur principal donneur d’ordres. Si le constructeur européen taille dans ses effectifs, il réduit aussi ses dépenses de recherche et développement (R&D) et d’ingénierie. Ce qui fragilise ces deux secteurs, qui emploient un tiers des salariés de la filière dans la région.

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« A Toulouse, 8 à 10 000 ingénieurs, qui travaillent pour Airbus et d’autres clients de l’aéronautique, se retrouvent en inter-contrats, sans mission, et sont menacés par un PSE [plan de sauvegarde de l’emploi] dans les prochains mois », avance, inquiet, Benoît Maistre, président du collège ICT (ingénierie et de conseil en technologies) du syndicat Syntec-Numérique.

Sogeclair Aerospace, sous-traitant de premier plan d’Airbus, de Bombarbier
ou encore de Dassault Aviation, a perdu plus de 50 % de son activité

A Blagnac (Haute-Garonne), la société Sogeclair Aerospace est l’une des premières PME à travailler à la mise en place d’un plan social. Ce sous-traitant de premier plan d’Airbus, de Bombarbier ou encore de Dassault Aviation, qui a perdu plus de 50 % de son activité depuis le début de la pandémie, a présenté un projet de PSE qui concernerait jusqu’à 245 personnes en France. Le site toulousain, fort de 400 ingénieurs, devrait être alors sévèrement touché, avec à la clé des licenciements secs et des départs volontaires en retraite non renouvelés.

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Dans les sociétés d’ingénierie, il y a urgence

Si le secteur du transport aérien ne redécolle pas, avertit un porte-parole de la direction, des « mesures d’adaptation des effectifs à la nouvelle réalité du marché » seraient appliquées pour ses filiales allemande, britannique et espagnole. En clair, il pourrait y avoir une saignée plus importante dans cette entreprise familiale fondée en 1962, et propriété de Philippe Robardey, par ailleurs président de la chambre de commerce de Toulouse.

Dans les sociétés d’ingénierie, il y a urgence. Car, si ce sous-traitant subit des pertes, il n’est pas le seul. CMT+, filiale du groupe Scalian, fait aussi les frais de cette crise inédite et violente. Dépendante de l’aéronautique à plus de 70 %, cette PME de 200 salariés installée à Colomiers (Haute-Garonne) vacille. Compte tenu de l’effondrement du plan de charge, le sureffectif est chiffré à 140 collaborateurs. Un PSE est en discussion avec les représentants du personnel.

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Les Etats-Unis créent 4,8 millions d’emplois en juin

Visite de Donald Trump dans une usine automobile Ford, à Ypsilanti (Michigan), le 21 mai 2020.

La reprise de l’économie s’est accélérée en juin aux Etats-Unis, le pays ayant créé le mois dernier 4,8 millions d’emplois. C’est mieux que les 2,5 millions de mai, qui avaient provoqué la surprise et qui ont même été révisés à la hausse (2,7 millions). De fait, le taux de chômage est tombé à 11 % en juin, après avoir atteint un plus haut de 14,7 % en avril, selon les chiffres très attendus publiés jeudi 2 juillet par le ministère fédéral du travail. Immédiatement, Donald Trump a convoqué une conférence de presse à la Maison Blanche pour saluer une hausse « historique » tandis que la Bourse américaine a ouvert en hausse de 1,5 % pour cette dernière journée avant le long week-end de l’Independance Day.

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Si ces chiffres attestent d’un fort rebond, supérieur aux attentes, les dégâts causés par le Covid-19 sont loin d’être effacés. L’Amérique est au tiers du parcours : avec 142 millions d’emplois en juin, elle a récréé 8,8 millions de jobs depuis le plus bas touché en avril, mais elle se trouve toujours 15 millions d’emplois en deçà du niveau de février. Le taux de chômage, qui avait atteint les plus bas historiques de la fin des années 1960, a triplé.

Restauration et tourisme

Surtout, l’enquête du ministère du travail a été réalisée mi-juin. Son bon chiffre ne prend pas en compte les emplois sans doute perdus depuis une dizaine de jours, alors que de nombreux Etats frappés par l’épidémie du Covid-19, tels le Texas, la Californie, l’Arizona et la Floride, ont dû refermer leur économie qu’ils avaient trop vite déconfinée. Le nombre de nouveaux cas a dépassé pour la première fois les 50 000 mercredi 1er juillet.

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Comme en mai, l’emploi a été recréé notamment dans la restauration et le tourisme au sens large, qui après avoir perdu la moitié de ses effectifs rouvre progressivement ses portes (2,1 millions d’emplois créés en juin), mais accuse encore un recul de 30 % de ses emplois.

Le rebond est net dans l’industrie manufacturière, qui a récupéré la moitié du terrain perdu (500 000 emplois recréés en juin, soit un recul réduit à 6 % des effectifs). Ce segment est politiquement très important pour l’élection de novembre : les ouvriers firent en 2016 l’élection de Donald Trump dans les Etats dits de la « ceinture de la rouille ». En revanche, le pire est encore à venir pour les compagnies aériennes, qui disent avoir 20 000 salariés de trop.

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Le débat sur les chiffres du chômage est perturbé par les enjeux électoraux, les détracteurs de Donald Trump acceptant mal qu’un bon chiffre macroéconomique puisse être publié tandis que le soutien du Congrès à l’économie, inédit et massif (2 700 milliards de dollars, soit 13 points de PIB), va à l’encontre des préjugés sur le non-interventionnisme américain.

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