Un salarié peut-il cumuler son activité avec celle de microentrepreneur ?

Cumuler un emploi salarié avec une activité de microentrepreneur peut etre possible sous certaines conditions.

Question à un expert

Puis-je, en tant que salarié, cumuler mon activité avec celle de micro-entrepreneur ?

Oui, il est possible, sous conditions, de cumuler un emploi salarié avec une activité de microentrepreneur (ancien autoentrepreneur) à titre complémentaire pour doper ses revenus et diversifier ses activités. Cela suppose un accord contractuel et l’octroi d’un congé ou d’une période de travail à temps partiel tout en répondant aux conditions d’ancienneté prévues dans la convention collective. L’employeur peut refuser cette demande, notamment au regard de la taille de l’entreprise.

Chaque revenu fait alors l’objet d’une imposition dans la catégorie à laquelle il se rattache : salaire pour le premier ; bénéfice industriel et commerciau (BIC) ou bénéfice non commercial (BNC) pour la seconde. Le microentrepreneur peut toujours opter pour le versement forfaitaire libératoire.

Il est alors calculé sur le chiffre d’affaires ou les recettes selon un taux spécifique : 1 % pour les ventes, 1,70 % pour les prestations BIC et 2,20 % pour les prestations BNC. Dans ce cas, les revenus du microentrepreneur ne sont pas soumis au prélèvement à la source, contrairement aux salaires.

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Socialement, il y a une double affiliation, au régime général des salariés et à celui de la sécurité sociale des indépendants. L’affilié est doublement redevable de certaines cotisations (allocations familiales, invalidité-décès, maladie, maternité, CSG…). Cependant, il n’est pas possible de cumuler les prestations !

Ainsi, il cotise doublement pour la retraite et ne pourra pas cumuler plus de quatre trimestres par an. A terme, il bénéficiera d’une pension de retraite au titre de son activité salariée et une au titre de son activité de microentrepreneur.

Pour le remboursement des frais de santé, c’est la caisse auquel il est affilié au titre de sa première activité de salarié qui en a la charge, sauf option contraire.

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Le parquet de Paris enquête sur des fraudes « massives » au chômage partiel

Le parquet de Paris a annoncé, vendredi 10 juillet, enquêter sur des fraudes « massives » au chômage partiel, qui ont occasionné « plus de 1,7 million d’euros » de préjudice.

Selon les premières investigations, « les demandes frauduleuses de versement d’indemnités se faisaient par télédéclaration en usurpant la raison sociale et le numéro d’identification Siret d’entreprises existantes qui ne demandaient pas à bénéficier des aides à l’activité partielle », explique dans un communiqué le parquet, qui s’est saisi lundi 6 juillet de deux enquêtes à l’initiative des parquets de Toulouse et Limoges.

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Ces enquêtes concernent des chefs « d’escroqueries en bande organisée » et « de blanchiment en bande organisée de ces escroqueries », précise le parquet.

Selon une source proche du dossier, les enquêteurs soupçonnent « une organisation criminelle d’avoir monté une fraude depuis l’étranger ».

Ces investigations ont été lancées à Toulouse et Limoges après la découverte de similitudes entre de nombreuses demandes d’autorisation d’activité partielle.

Flux financiers internationaux

A Limoges, le siège de l’Agence de services et de paiement (ASP) – chargée de gérer l’indemnisation de l’activité partielle – s’est rendu compte que treize des seize directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte) étaient « confrontées à une fraude massive au versement des indemnités ».

Les premières investigations ont aussi permis d’identifier dans la région Occitanie plus de 160 entreprises victimes et plus de 110 comptes bancaires frauduleux.

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Toujours selon le parquet de Paris, plus de 1 740 opérations frauduleuses ont été identifiées sur l’ensemble du territoire national au nom de 1 069 sociétés demandant des versements de fonds sur plus de 170 comptes bancaires.

« Si plus de 1,7 million d’euros correspondant à des demandes frauduleuses auraient déjà été indûment versés par l’ASP, le versement de plus de 6 millions d’euros a pu être suspendu dès la découverte des infractions », précise le parquet.

De nombreuses investigations, qui s’annoncent « d’une très grande complexité et nécessitent une forte coopération internationale », devront notamment permettre d’identifier les flux financiers internationaux issus de ces « fraudes massives qui portent une atteinte importante aux finances publiques », ajoute le parquet.

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Dès le début du confinement et pour pallier l’arrêt d’activité, le gouvernement a élargi la possibilité de recourir au chômage partiel en France. Selon le ministère du travail, 7,2 millions de Français ont été en chômage partiel un ou plusieurs jours par semaine en mars, 8,7 millions en avril et 7,8 millions en mai.

A la fin de juin, la ministre du travail d’alors, Muriel Pénicaud, avait déclaré dans Challenges que les 3 000 premiers contrôles sur les demandes de chômage partiel avaient débouché sur « 850 suspicions de fraude » et quatre procédures pour « escroquerie ».

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Le Monde

Wells Fargo : « la banque retient son souffle »

Devant une agence Wells Fargo, à West Hollywood, en Californie, le 15 mai.

Pertes & profits. Combien de temps une pause peut-elle durer ? Aussi longtemps que l’on peut retenir son souffle. Pour Wells Fargo, cela aura tenu un trimestre. En mars 2020, la troisième banque américaine avait décrété une pause dans sa restructuration. A l’instar de ses collègues, elle avait reconnu que la situation sanitaire et économique justifiait de suspendre les plans de restructuration annoncés en 2019 et début 2020. Mais, aujourd’hui, la situation devient critique. Les pertes s’accumulent sur les crédits. Selon les analystes de Bloomberg, la banque pourrait annoncer un résultat net de 9 millions de dollars (8 millions d’euros) pour le deuxième trimestre, contre 6,2 milliards pour la même période en 2019. Alors le vernis craque. Selon Bloomberg, la banque se prépare à annoncer des milliers de suppressions d’emplois.

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Pris en étau entre la numérisation, qui fragilise la relation avec le client, et la baisse des taux, qui réduit la rentabilité de leurs opérations, les établissements bancaires changent de modèle économique et doivent réduire leurs coûts. D’où la cascade de restructurations annoncées ces dernières années. En 2019, une analyse de Wells Fargo projetait 200 000 disparitions de postes dans la banque américaine sur la décennie à venir.

L’érosion s’accélère

La situation est plus sévère en Europe, où les banques sont moins profitables et plus contraintes par la régulation. En 2019, plus de 50 000 suppressions de postes ont été annoncées sur le Vieux Continent, notamment de la part de Deutsche Bank et HSBC. Heureusement, la pyramide des âges aide à faire passer la pilule. En France, le nombre de départs dépasse désormais celui des embauches, qui tourne autour de 40 000 personnes par an. Mais l’érosion s’accélère.

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La crise ne va rien arranger à cette affaire. Les analystes s’attendent à une explosion des difficultés sur les prêts avec les faillites d’entreprises. Selon le Financial Times, les quatre principales banques américaines pourraient enregistrer pour 25 milliards de dollars de pertes sur crédit au deuxième trimestre. A cela s’ajoute l’accélération du comportement volage des clients. Selon une étude du cabinet Bain, les jeunes et les personnes aisées sont de plus en plus nombreux à changer d’établissement. Comme dans le cas du commerce en ligne, avec la crise sanitaire, le temps s’est accéléré brutalement. Selon l’étude, le taux d’attrition des plus jeunes a doublé en un an et pendant le confinement : « 50 % des clients ont réalisé des transactions à distance qu’ils effectuaient habituellement en agence et souhaitent conserver ce mode d’interaction. » Nous voilà désormais transportés en 2025, et les banques en ligne parviennent enfin à convaincre les utilisateurs.

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Alstom sacrifie son usine de Reichshoffen, vif émoi en Alsace

A l’usine Alstom de Reichshoffen( Bas-Rhin), en octobre 2019.

Pas question de rater une nouvelle union ; de revivre l’échec de la fusion Alstom-Siemens bloquée en 2019 par Bruxelles. Afin d’éviter de voir retoqué son projet de rachat (autour de 6 milliards d’euros) du canadien Bombardier Transport, dévoilé en février, l’industriel ferroviaire français Alstom a transmis, jeudi 9 juillet, à la Commission européenne plusieurs engagements censés lui éviter une position dominante sur certains marchés. Parmi ces concessions, la vente de son usine de trains régionaux de Reichshoffen (Bas-Rhin) provoque un vif émoi en Alsace.

Après avoir étudié le dossier plusieurs mois, la Commission vient donc de transmettre ses conclusions. Ses préoccupations concernent trois marchés où le poids du nouvel acteur (un nouveau numéro deux mondial à 15,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires) deviendrait problématique, selon elle : le matériel roulant à grande vitesse, la signalisation embarquée et surtout les trains régionaux, où Alstom-Bombardier pèserait, à terme, la moitié des ventes européennes et surtout 100 % du marché français.

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Alstom propose donc plusieurs remèdes en accord avec la maison mère de Bombardier Transport. Dans la grande vitesse, il s’agirait de se séparer de l’activité des V300 Zefiro de Bombardier, produits dans le cadre d’une coentreprise avec le japonais Hitachi, lequel apparaît comme un repreneur naturel. Concernant la signalisation, Alstom propose d’ouvrir à des tiers l’accès à sa technologie.

« Une douche froide pour les salariés »

Le gros sujet concerne donc les trains régionaux, avec la vente proposée d’une partie du site Bombardier d’Hennigsdorf, près de Berlin, et de l’ensemble des activités liées à la production des trains SNCF Régiolis (appelés « Coradia Polyvalent » dans le catalogue d’Alstom), dont l’assemblage final se fait à Reichshoffen, et qui occupe 780 salariés pour environ 400 trains à fabriquer d’ici à 2024.

Face à cette nouvelle inattendue, les réactions de stupeur et d’indignation n’ont pas tardé. « C’est une douche froide pour les salariés, qui ont été mis devant le fait accompli », estimait, jeudi 9 juillet, Daniel Dreger, délégué syndical CGT, à la sortie du CSE extraordinaire de l’entreprise. Guy-Dominique Kennel, sénateur LR du Bas-Rhin, a du mal à contenir sa colère : « On met en jeu un site avec une maind’œuvre extraordinaire et un carnet de commandes plein. Prendre une telle décision sans en avoir discuté au préalable est une pratique révoltante, c’est traiter les salariés comme du bétail. »

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Le groupe Beaumanoir reprend 40 % des salariés de La Halle

Devant l’entrepôt La Halle d’Issoudun (Indre), le 2 juin.

Le verdict est tombé. Sans surprise, le tribunal de commerce de Paris a décidé, mercredi 8 juillet, d’attribuer La Halle, enseigne placée en redressement judiciaire depuis le 2 juin, au groupe Beaumanoir. L’entreprise bretonne reprend 366 magasins et 2 520 salariés de la chaîne d’habillement qui exploite 820 boutiques en France. Le groupe, qui était le mieux-disant des 25 candidats à la reprise, a obtenu le soutien du gouvernement, notamment par le biais de l’obtention d’un prêt garanti par l’Etat. D’un montant de 41 millions d’euros, cet emprunt doit permettre à la société fondée par Roland Beaumanoir en 1985 de financer le rachat, les collections à venir et le plan de relance de l’enseigne. En tout, le groupe, qui emploie déjà 13 600 personnes dans le monde, assure vouloir investir 60 millions d’euros dans La Halle.

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« Nous avons pour cela conçu et proposé un projet global fort et engagé pour la marque qui va pouvoir bénéficier de tout notre savoir-faire et de nos technologies pour lui donner de vrais moyens de développement », a fait valoir Roland Beaumanoir, par communiqué, mercredi. Connu pour son enseigne Cache-Cache, ses jeans Bonobo et ses magasins Morgan, autre marque rachetée à la barre du tribunal, le groupe au 1,2 milliard d’euros de chiffre d’affaires avait précisé vouloir maintenir l’enseigne La Halle sur la majorité des points de vente repris. Et il entend transformer une trentaine d’entre eux en Vib’s, enseigne qui distribue plusieurs de ses marques en périphérie des grandes villes.

« L’ampleur inégalée de ces suppressions d’emplois »

Initialement, Beaumanoir s’était associé à la société Besson. L’enseigne de chaussures détenue par le groupe GPG fondé par Philippe Ginestet, repreneur de l’enseigne Tati en 2017, et Weinberg Capital s’était engagée à reprendre 42 magasins et 195 postes. Mais, finalement, les juges du tribunal de commerce de Paris ont choisi d’associer le groupe Beaumanoir à deux autres candidats : Chaussea, qui proposait la reprise de 181 magasins et 1 031 postes de travail et SuperChauss’34, intéressé par 23 points de vente, soit 150 employés. Le premier hérite finalement de 128 magasins, tandis que le second en décroche 14.

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Les élus du personnel de La Halle avaient précisément préconisé cette alliance pour « sauver davantage d’emplois ». En tout, d’après le décompte publié dans la décision du tribunal, ce sont près de 3 300 postes qui sont préservés grâce à ces trois repreneurs. « Près de 2 200 personnes seront licenciées », déplore Karim Cheboub, en soulignant « l’ampleur inégalée de ces suppressions d’emplois » dans le secteur de la distribution d’habillement. Faute de repreneur, les 289 salariés de l’entrepôt d’Issoudun (Indre) seront licenciés. A Châteauroux, le groupe Beaumanoir s’est engagé à reprendre 156 des 166 employés.

La décision du tribunal intervient après des semaines de négociations entre les administrateurs judiciaires et les repreneurs. Mise en redressement à la demande de son actionnaire, le groupe Vivarte présidé par Patrick Puy, La Halle a fait l’objet de nombreuses marques d’intérêt. Des chaînes d’habillement, mais aussi des enseignes alimentaires comme Lidl, Biocoop ou Franprix s’étaient manifestés. Sans succès. Elles pourraient cependant bénéficier de la cession ultérieure d’actifs.

La nomination de Brigitte Klinkert à l’insertion inquiète une partie des associations d’aide aux précaires

Sitôt désignée, sitôt mise en doute. L’entrée au gouvernement de Brigitte Klinkert est regardée avec appréhension par des responsables associatifs. Ils pointent du doigt les antécédents de la nouvelle ministre déléguée à l’insertion. Au cœur des griefs, l’un des volets de l’action sociale du conseil départemental du Haut-Rhin, dont elle est la présidente (divers droite).

En 2016, cette collectivité territoriale, pilotée par la droite, avait déclenché une vive controverse en adoptant une délibération qui conditionnait le versement du revenu de solidarité active (RSA) à la réalisation de sept heures de bénévolat hebdomadaire. A l’époque, Mme Klinkert n’était pas à la tête de l’assemblée départementale – le poste étant occupé par Eric Straumann (LR) –, mais elle y siégeait déjà.

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La décision du département avait été critiquée par les associations d’aide aux plus démunis. Portée devant le juge administratif, l’affaire était remontée jusqu’au Conseil d’Etat. Celui-ci avait validé le principe du dispositif, en faisant valoir que des actions de bénévolat pouvaient être demandées aux bénéficiaires du RSA. Mais il y avait mis des conditions : une telle mesure s’applique aux personnes « disponibles pour occuper un emploi » ; elle doit concourir à une meilleure insertion professionnelle, tout en étant cadrée par un contrat liant l’allocataire à la collectivité. Au fil du temps, les élus haut-rhinois avaient amendé le mécanisme, en le basant sur le volontariat – et non plus sur la contrainte.

« Stigmatisation »

Même si elle n’a pas été l’instigatrice de cette politique, Mme Klinkert en est coresponsable, car « elle était membre de la majorité départementale » en 2016, souligne Florent Gueguen, directeur de la Fédération des acteurs de la solidarité. « Sa nomination est une réelle inquiétude pour les associations de lutte contre l’exclusion, poursuit-il. Le risque est de voir resurgir les contreparties obligatoires aux allocations et la stigmatisation des personnes toujours accusées de ne pas faire d’efforts pour s’en sortir. »

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Ex-président de l’association alsacienne Espoir et personnalité toujours très impliquée dans le soutien aux publics fragiles, Bernard Rodenstein pose un autre regard sur Mme Klinkert : c’est une « humaniste », affirme-t-il, qui « cherche à arrondir les angles » et dont les valeurs sont éloignées du discours consistant à dicter des devoirs aux bénéficiaires de minimums sociaux. M. Rodenstein se sent d’autant plus à l’aise pour le dire qu’il avait vertement critiqué l’initiative du département du Haut-Rhin en 2016.

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« L’anonymisation du CV est une mesure efficace de lutte contre les discriminations raciales à l’embauche »

Tribune. En 2017, avec la promulgation de la loi égalité et citoyenneté, les pouvoirs publics enterrèrent définitivement le projet de rendre obligatoire le CV anonyme dans les entreprises de plus de cinquante salariés. En 2016 à l’occasion du rapport Sciberras, les entreprises, qui ne voulaient pas entendre parler d’obligation, avaient jeté la dernière pelletée sur ce projet moribond.

Mais ce fut la publication en 2011 d’une expérimentation conduite par des chercheurs du Centre de recherche en économie et statistiques (Crest), du laboratoire Abdul Latif Jameel Poverty Action Lab (J-PAL) et de l’Ecole d’économie de Paris en partenariat avec Pôle emploi qui servit d’abord de prétexte à l’abandon de cette mesure introduite par la loi du 31 mars 2006.

Paradoxe

En effet, à en croire l’écho médiatique, cette expérimentation – la première menée en France – révélait un paradoxe : elle montrait que les demandeurs d’emplois issus de l’immigration étaient défavorisés par l’anonymisation de leur CV. Ainsi Le Monde avec l’AFP titrait le 4 avril 2011 « Le CV anonyme pénalise les personnes issues de l’immigration ». Or les débats sur les résultats de cette expérimentation reposèrent sur un malentendu.

Car l’étude ne s’appuyait pas sur la méthodologie du « testing scientifique », qui consiste à construire des candidatures fictives similaires en faisant varier une caractéristique dont on veut tester l’influence.

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Mais alors que nous apprenait exactement cette expérimentation ? Selon cette étude, l’anonymisation des CV pénalisait les candidats issus de l’immigration parce que les signaux négatifs contenus dans le bas de leur CV (formations, expériences) ne pouvaient plus être interprétés – avec bienveillance – par les recruteurs privés de l’information contenue dans le haut du CV (patronyme, adresse, couleur de peau).

Cette expérimentation ne délivrait aucune information sur la variation, suite à l’anonymisation du CV, des chances d’accès à l’entretien d’embauche d’un candidat issu de l’immigration qui aurait une trajectoire professionnelle « sans trou ». Autrement dit, elle n’avait pas évalué l’efficacité du CV anonyme comme dispositif de prévention d’une discrimination raciale à l’encontre d’un candidat au CV qui serait semblable en termes de formation et d’expériences à celui d’un candidat sans origine migratoire.

Un premier pas

Cette expérimentation disait simplement que le CV anonyme était susceptible d’accroître, en certaines circonstances (la bienveillance du recruteur), l’impact des inégalités ethno-raciales dans l’éducation et l’emploi sur l’accès à l’entretien d’embauche.

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L’Europe face au risque des « emplois zombies »

Dans une vitrine d’un magasin H&M à Canterbury, en Angleterre, le 15 juin, alors que les commerces qui avaient été jugés non essentiels réouvrent leurs portes après trois mois de confinement.

L’heure est aux « décisions cruciales ». Dans ses « Perspectives de l’emploi 2020 » publiées mardi 7 juillet, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) prévient les gouvernements : pour piloter le redémarrage de l’activité tout en protégeant les secteurs fragilisés, pour réduire les aides d’urgence sans déclencher de faillites massives et, surtout, « pour éviter que la crise de l’emploi ne se mue en crise sociale », ils vont devoir procéder à des arbitrages difficiles. « Ils seront d’autant plus délicats que les incertitudes sont grandes : une deuxième vague de l’épidémie n’est pas exclue », souligne Stefano Scarpetta, spécialiste de l’emploi au sein de l’organisation.

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Selon ses dernières prévisions, le taux de chômage devrait grimper de 8,4 % en mai à 9,4 % fin 2020 dans l’ensemble des pays de l’OCDE, et de 8,1 % à 12,3 % en France. Dans le scénario sombre, où une circulation accélérée du virus contraindrait les Etats à prendre de nouvelles mesures pour la freiner, il flamberait jusqu’à 13,7 % dans l’Hexagone.

« Recalibrer ces mécanismes »

Les économistes sont pourtant unanimes : « Les mécanismes d’activité partielle adoptés en Europe ont efficacement limité l’envolée du taux de chômage », résume Gilles Moëc, chef économiste du groupe Axa. De fait, le contraste est fort avec les Etats-Unis, où le taux de demandeurs d’emploi a culminé à 14,7 % en avril, contre 6,6 % dans l’Union européenne (UE). Au total, près du tiers de la main-d’œuvre dans les cinq premières économies européennes, soit 45 millions de personnes, est passé par ces dispositifs. De quoi amortir une grande partie du choc de la récession, bien plus violente qu’en 2008.

« Maintenant que le confinement est levé et que l’activité repart, il est important de recalibrer ces mécanismes de soutien avec finesse », explique Daniela Ordonez, chez économiste à Oxford Economics. D’abord, parce qu’ils représentent un coût non négligeable pour les finances publiques, ainsi qu’un risque d’abus, lorsque des entreprises qui n’en ont guère besoin en profitent. Selon le ministère du travail, 850 cas de fraudes sont ainsi suspectés en France. « En outre, conserver trop longtemps le chômage partiel, conçu pour amortir des chocs sur le court terme, pourrait empêcher certains travailleurs de se déplacer vers des activités plus viables », ajoute M. Scarpetta.

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Faillites d’entreprises : malgré des « airbags économiques », Bercy et la majorité s’attendent au pire

Le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, à Bercy, le 7 juillet.

Des couloirs de l’Assemblée nationale aux différents étages de Bercy, la petite phrase revient, implacable. Les conséquences pour les entreprises de la crise sanitaire qui vient de frapper la France ? « On n’évitera pas les faillites. »

« On a le plus dur devant nous. Il va y avoir des difficultés sur l’emploi, les entreprises, l’industrie et les territoires. On le voit avec la multiplication des annonces [de suppressions de postes] », a admis le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, mardi 7 juillet, en marge de la passation de pouvoir à Bercy après le remaniement.

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Préparer au maximum la vague de plans sociaux qui risque de grossir à l’automne, alors que le produit intérieur brut (PIB) devrait plonger de 11 % cette année et que de nombreux secteurs (tourisme, hôtellerie, culture…) portent encore les stigmates du confinement, c’est le défi auquel va devoir s’atteler l’exécutif. « Pour les entreprises, cela a été un “blast” [effet de souffle] de tout arrêter pendant deux mois. On sait que la vague est monumentale. On ne peut pas dire qu’il y aura zéro licenciement. Le risque est réel à la rentrée, il faut dire la vérité aux Français », abonde Laurent Saint-Martin, député LRM du Val-de-Marne et rapporteur général du budget.

« Il faudra un nouvel élan »

Pour le moment, députés de la majorité et ministres estiment que les dispositifs en place ont porté leurs fruits. Plan massif de chômage partiel, fonds de solidarité pour les petites entreprises, annulation de cotisations sociales et fiscales, prêts garantis par l’Etat (PGE)… « On a mis des airbags économiques. On fait en sorte qu’il y ait le moins de plans possible », indique M. Saint-Martin.

Lire l’analyse : L’Etat est « vigilant » sur l’emploi… et soutient les restructurations

Et après ? « Après les mesures immédiates puis la relance ciblée pour les secteurs les plus sinistrés, le troisième volet de notre réponse, ce seront des mesures ambitieuses pour l’emploi », assure Bruno Le Maire, en référence aux annonces attendues la semaine du 13 juillet, notamment des primes à l’embauche ou des exonérations de cotisations pour les jeunes. « Puis, quand on entrera dans le dur de la crise, il faudra un nouvel élan », indique l’ex-LR. Le plan de relance doit être annoncé fin août. Bercy plaide plus que jamais pour une baisse des impôts de production, ces taxes sur le chiffre d’affaires des entreprises, collectées majoritairement par les collectivités. « Si on veut arrêter l’hémorragie industrielle, il faut s’attaquer aux impôts de production, notamment la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) », précise le ministre, pour qui le manque à gagner pourrait être « pris à leur charge par les régions pour attirer de l’industrie ».

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Entreprises : « Eriger les testings en méthode ultime de preuve est-il pertinent ? »

Tribune. Chaque mobilisation contre le racisme déclenche de nouvelles polémiques sur l’opportunité de réaliser des statistiques ethniques pour évaluer l’ampleur des discriminations. Comme pour mieux faire oublier cette idée, qui heurte les valeurs républicaines, le gouvernement propose alors de réaliser un testing [Le gouvernement a annoncé dans un communiqué le 17 juin le lancement d’une vague de testings sur les grandes entreprises]. Ce scénario vient à nouveau de se produire, en réponse aux manifestations contre les violences policières dirigées contre les populations d’origine immigrée.

Des vagues de testings déferlent ainsi périodiquement sur les entreprises françaises, afin d’évaluer les discriminations à l’embauche dont souffrent ces populations. S’il ne fait aucun doute que ces discriminations relèvent d’une actualité aussi permanente que scandaleuse devant faire l’objet de politiques réellement offensives, est-il pertinent d’en chiffrer la mesure de cette manière et de dénoncer publiquement les entreprises considérées comme de mauvais élèves ? Cela mérite amplement discussion, d’autant que l’on a tendance à ériger les testings en méthode ultime de preuve.

Des candidatures fictives sont envoyées deux à deux dans les entreprises, en réponse à de réelles annonces d’offre d’emploi. Elles sont semblables en tout point, sauf au regard d’une caractéristique que l’on cherche à tester : l’influence d’un nom à consonance étrangère (souvent maghrébine), d’un lieu de naissance, d’une domiciliation dans un quartier sensible, etc. La comparaison des taux de réponse obtenus par la candidature de référence (dite « hexagonale ») et celle que l’on teste, semble ainsi pouvoir donner directement la mesure recherchée.

Mais cela n’a rien d’évident, malgré toutes les précautions prises par les auteurs des expérimentations.

D’un côté, il leur faut multiplier les tests pour obtenir des résultats significatifs et les envoyer de manière rapprochée ; de l’autre, il faut éviter de se faire repérer pour ne pas fausser les résultats. Or les entreprises, et a fortiori les cent vingt que les pouvoirs publics ont choisi de tester, sont sur leurs gardes. Leurs offres ne sont pas si nombreuses et portent sur des emplois trop divers pour opérer des comparaisons rigoureuses. Même lorsque les candidatures élaborées sont bien ciblées, les taux de réponses restent bas.

Manque de représentativité

Faut-il assimiler les non-réponses à des refus d’embauche ? Pour contrer la rareté des convocations à un entretien en réponse à des annonces, les expérimentateurs ont imaginé d’envoyer des candidatures spontanées aux entreprises et finalement de formuler des demandes d’information plutôt que des demandes d’entretiens. Mais à qui les envoyer ? Et que comptabilise-t-on ainsi ?

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