Bart Gruyaert, ose la relance d’Ascoval
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Coactionnaire d’Altifort, l’industriel reprend l’aciérie de Saint-Saulve, en redressement judiciaire depuis janvier 2018. A lui de trouver des clients sur un marché quasi saturé.
« Après le 19 décembre, j’ai passé trois semaines au lit. J’étais vidé ! » Ce jour-là, la chambre commerciale du tribunal de grande instance de Strasbourg a autorisé Altifort à reprendre Ascoval, l’aciérie de Saint-Saulve, dans le Nord, et ses 281 salariés. « Les négociations ont été si compliquées qu’une fois le jugement passé, confie Bart Gruyaert, le copropriétaire du groupe Altifort, tout est retombé. »
Six semaines après, l’industriel flamand est requinqué. Il doit obtenir publiquement les clés d’Ascoval vendredi 1er février. « C’est maintenant qu’il va devoir se révéler pour trouver les clients qu’il a promis », prévient un bon connaisseur du dossier. L’aciérie est un gros morceau, avec un chiffre d’affaires de 135 millions d’euros en 2017, alors qu’Altifort prétends environ 200 millions de revenus.
Surtout, il va devoir trouver des clients pour écouler 500 000 tonnes d’aciers, la capacité de l’aciérie, quand le marché est presque saturé et que Vallourec et Schmolz + Bickenbach, qui achetaient jusqu’à présent sa production, sont désormais de redoutables concurrents. Mais pas de quoi effrayer le quadra. « Pourquoi faudrait-il avoir peur ?, interroge-t-il, mi-janvier, dans les bureaux de son groupe à Bourg-la-Reine (Hauts-de-Seine). Je suis sûr que nous pouvons réussir à trouver les clients pour faire tourner l’aciérie et la forge. Ce sera dur, mais nous nous accrocherons. Et puis, n’oubliez pas. Je viens de Courtrai, en Belgique. Là-bas, nous sommes à la fois travailleurs et têtus. Surtout têtus. Nous ne lâchons rien ! »
« C’est un fonceur, un bosseur »
« Et il a démontré qu’il était résistant face à Vallourec, l’ancien propriétaire, et l’Etat », confirme Xavier Bertrand, le président de la région Hauts-de-France qui l’a soutenu sur ce dossier. « Il a été courageux, voire téméraire », confirme Philippe Jeannerot, l’administrateur judiciaire qui a supervisé le redressement de l’aciérie. « C’est un fonceur, un bosseur qui ne s’attarde pas sur les petits détails et qui ne regarde pas dans le rétroviseur », déclare Nathalie Delabre, 51 ans, responsable du service achats d’Ascoval qui l’a croisé ces dernières semaines.
Durant les négociations de reprise, Vallourec a refusé d’aider Altifort, tandis que Bercy n’était pas très allant pour le supporter. Le petit groupe de 1 500 salariés, construit en moins de cinq ans, est financièrement fragile. Certains officiels ont plusieurs fois conseillé à l’entrepreneur de se désister, tandis que ses filiales subissaient des contrôles de la part de l’administration. « En interne, on m’a même demandé de laisser tomber », déclare-t-il.