Aux Etats-Unis, les salariés en télétravail sont les premiers licenciés pour réduire les effectifs

Aux Etats-Unis, les salariés en télétravail sont les premiers licenciés pour réduire les effectifs

La Texane Christy Tabors, 35 ans, travaillait à distance pour un sous-traitant du groupe Meta. Au printemps 2023, elle a reçu un appel téléphonique. Son emploi était supprimé. Elle a appelé sa cheffe de service, qui n’était même pas au courant. La décision avait été prise dans les sphères supérieures. Le licenciement éclair de Mme Tabors n’a rien d’original. Sur TikTok, les témoignages d’employés remerciés qui travaillaient chez eux se multiplient. L’un n’avait pas frappé assez souvent les touches de son clavier d’ordinateur, un logiciel espion avait donc considéré qu’il n’était pas assidu. Une autre, commerciale de Cloudflare, avait « peu de chances de réussir », selon sa direction, qui l’a écartée.

Pendant la pandémie, les grandes entreprises du secteur du high-tech avaient beaucoup embauché. A la fin de la crise sanitaire a succédé une vague de suppressions d’emplois qui touche les cols blancs, et particulièrement les employés à distance. La probabilité d’être « remercié » est ainsi 35 % plus forte pour les salariés à distance que pour ceux qui fréquentent assidûment le bureau, indique un sondage de l’éditeur de logiciels Live Data Technologies, qui a interrogé deux millions de cols blancs en 2023, employés de bureau et travailleurs à domicile.

Leurs chances de promotion sont aussi réduites de 31 %. « C’est évident, il y a un a priori de proximité aussi bien pour l’employeur que pour l’employé, commente Jason Saltzman, directeur du développement de Live Data Technologies. Le manageur se sent plus proche de ceux qu’il voit en réunion ou autour de la machine à café. » C’est donc l’absent qui disparaîtra de l’organigramme, lorsqu’il faudra prendre des décisions difficiles.

Lire l’analyse de la chercheuse pour le projet du Liepp | Article réservé à nos abonnés « Le télétravail fait-il du bien aux salariés ? Ce que l’on a appris avec le Covid-19 »

Les groupes du high-tech n’aiment guère évoquer publiquement leur manque d’appétit pour le travail à distance. Ils ont trop peur d’être jugés rétrogrades par les nouveaux arrivants sur le marché du travail. Certains reconnaissent toutefois leur préférence pour le présentiel. IBM a ainsi demandé à ses cadres de se rapprocher d’un bureau de l’entreprise, dans un rayon de 80 kilomètres. Le senior vice-président John Granger a clairement fixé les règles du jeu. Dans un mémo de janvier 2024, il ajoute qu’il faut dorénavant pointer au moins trois jours par semaine, ou risquer son poste.

Le retour du balancier

Autre entreprise, même propos : le fabricant d’ordinateurs Dell exige une présence de trois jours par semaine en entreprise. En février, la direction s’est expliquée. Ceux qui n’adopteront pas ce nouvel agenda n’auront plus droit à une promotion ou à un changement d’orientation. Dell a ainsi institué un système de contrôle par couleurs. Les bleus sont fortement présents au bureau, verts et jaunes au milieu, les rouges se font très rares. Ce classement est pris en compte pour les futures promotions, les évaluations annuelles, ou encore d’éventuels plans de licenciement.

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LJD

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