Parité femmes-hommes : La ministre du travail averti 200 entreprises de punitions

La ministre du travail a certifié dimanche que 200 entreprises nécessitent encore remplir leur devoir légale de proclamer un index sur l’égalité, faute de quoi elles seront punies.

Plus de 200 entreprises traînent des pieds face à leurs nouvelles obligations en matière d’égalité femmes-hommes. Alors que la loi contraint depuis le 1er mars les structures de plus de 1 000 salariés de publier un index de l’égalité professionnelle, « on a 1 130 entreprises sur les 1 340 concernées » qui n’ont pas respecté cette obligation, a témoigné dimanche, Muriel Pénicaud, lors du « Grand Jury RTL-LCI-Le Figaro ».

« D’ores et déjà, pour ceux qui n’ont pas répondu, dans les entreprises de plus de 1 000 salariés, l’inspection du travail et la direction générale du travail sont en train de les contacter. S’ils ne se conforment pas très vite, ils vont être mis en demeure et ils pourront avoir des sanctions financières, même pour ne pas avoir répondu », a averti la ministre.

« Les sanctions peuvent aller jusqu’à 1 % de la masse salariale. Je dis souvent aux employeurs : “plutôt que de donner [cet argent] au Trésor public, donnez-le aux femmes !” », a-t-elle déclaré.

Une note sur 100 points en matière d’égalité femmes-hommes

L’index est une mention globale sur 100 points, décomposée en cinq critères : l’écart de rémunération femmes-hommes (noté sur 40 points), l’écart dans les aggravations annuelles (20 points), l’écart dans les promotions (15 points), les accroissements au retour de congé maternité (15 points) et, enfin, la présence de femmes parmi les plus gros salaires de l’entreprise (10 points).

« La grande majorité » des entreprises ayant publié leur index « a du travail à faire », a déclaré la ministre, et « 15 % sont en alerte rouge », c’est-à-dire sous la barre des 75 points. Ces mauvaises élèves, qui risquent des sanctions si elles n’amendent pas leur situation dans les trois ans, « ont des résultats vraiment mauvais » et « doivent tout de suite agir ».

A l’inverse, seule une « toute petite minorité » des entreprises examinées a obtenu la note maximale de 100 points, a défini la ministre.

Une fois confirmé par l’entreprise, l’index est « public », a par ailleurs accentué Mme Pénicaud. « Quand vous voulez postuler dans une entreprise, regardez s’ils sont bons ou nuls en égalité salariale », a-t-elle ajouté. Les entreprises de plus de 250 salariés seront, à leur tour, observées par l’obligation de publier cet index le 1er septembre, puis celles de plus de 50 salariés le 1er mars 2020.

 

Les pompiers alertent d’une grève

Un préavis de grève du 26 juin au 31 août a été posé par des syndicats.
Sept syndicats de pompiers, délégué 85 % de la profession, ont posé un préavis de grève du 26 juin au 31 août pour solliciter plus de moyens face à un accroissement de leurs interventions. « Le service public de secours est malade. On veut alerter les Français », a exposé à l’AFP André Goretti, président de l’organisation FA – SPP-PATS, premier syndicat chez les 40 000 pompiers professionnels.

Ces syndicats ont proclamé un courrier mercredi dernier au ministre de l’intérieur, dans lequel ils dénoncent « un déni de dialogue social » et « les politiques et projets néfastes du gouvernement ».

« Sur-sollicitation » et « violences verbales »

Ils sollicitent le retrait du projet de loi de modification de la fonction publique, la réévaluation de la prime de feu similaire aux autres métiers à risque, et « le recrutement massif d’emplois statutaires ». M. Goretti regrette un « profond malaise au sein de la profession » :

« Nous devons répondre à une sur-sollicitation avec de moins en moins d’effectifs et de moyens (…) Nous assumons de plus en plus de missions qui ne relèvent pas de nos compétences, à cause des manquements des services de l’Etat. »

A cela s’additionnent « de plus en plus de violences verbales et parfois physiques », suivant le responsable syndical.

Même s’ils se formulent en grève, les pompiers peuvent être astreints à un service minimum, en tant qu’« agents assurant le fonctionnement des services indispensables à la garantie de la sécurité physique des personnes ».

Assurance-chômage : un changement « mal reliée et trop craintif »

L’économiste François Fontaine regrette, que le cœur de la réforme – l’aboutissement des contrats courts – ait été contaminé par des termes annexes et « baroques ».

Il aura fallu deux  ans  au gouvernement pour faire achever la réforme de l’assurance-chômage. Il faut dire que le travail était infini. En détournement financière depuis le début des années 2000 et entassant plus de trente milliards d’euros de dette, elle était transformée délicat en cas de nouvelle crise économique et, dans le cadre des règles actuelles, la punition des comptes était illusoire.

Si nous en sommes arrivés là, c’est que les partenaires sociaux comme les pouvoirs publics n’ont longtemps pas compris que les règles de l’assurance-chômage ont un effet arrangeant sur le marché du travail. Ainsi, la rupture conventionnelle – départ sacrifié qui donne droit à indemnisation –, les modalités du cumul emploi-chômage, celles du rechargement des droits et, plus directement, celles du calcul du montant de l’allocation, ont été autant d’encouragements pour les entreprises à fractionner les contrats de travail.

Dans un même mouvement, elles ont rendu viable pour les travailleurs l’alternance rétablie entre emplois et courtes périodes de chômage et ont autorisé aux entreprises de soutenir une gestion irresponsable de leurs ressources humaines. Il y a bien eu quelques tentatives d’y atténuer, mais elles ont été tardives, timides et inopérants.

Revenu mensuel au chômage et en emploi

La réforme devait donc se concevoir autour d’une idée simple : puisque c’est l’envolée des contrats courts qui explique une part importante du déficit structurel de l’Unédic, il fallait mettre un coup d’arrêt à ce mouvement. Malheureusement, la réforme ne répond que partiellement à cet enjeu. Aux mesures utiles, elle en superpose d’autres, mal ficelées et un peu baroques. Enfin, quand il s’agit de responsabiliser les entreprises, elle se montre étrangement timide.

Certes, on y trouve bien de nouvelles solutions de calcul des droits. Le montant de l’allocation dépendra de la paye mensuelle et non du revenu journalier moyenne. C’est un point technique, mais c’est sans doute le plus important de la réforme : il évitera que le revenu mensuel au chômage ne dépasse le revenu en emploi. C’était le cas avant si, par exemple, le salarié n’avait travaillé qu’une semaine sur deux sur la période servant à calculer ses droits. Cette mutation devrait ainsi casser la principale incitation à fractionner les contrats.

C’est une mesure indispensable, mais elle aura des suites financières importantes pour les nouveaux solliciteurs d’emploi. Et pourquoi avoir allongé, dans un même mouvement, le nombre de jours besognés essentielles pour être éligibles ? Quel intérêt aussi d’introduire une dégressivité pour les allocations des cadres ? Elle ne touche pas au problème réel de l’assurance-chômage, tout en créant un régime à deux logiques de rémunération : allocations abaissantes pour les uns, constantes pour les autres.

Le géant du jeu vidéo américain convoité par un lourd plan social

Le stand d’Activision Blizzard à l’Electronic Entertainment Expo de Los Angeles, en janvier 2013.
Le stand d’Activision Blizzard à l’Electronic Entertainment Expo de Los Angeles, en janvier 2013. Jae C. Hong / AP

La maison-mère américaine veut suspendre 134 postes dans sa filiale française, où les arrangements sont ratés et le moral est au plus bas.

Sur une photo épinglée dans l’open space, 27 collaborateurs installent les uns à côté des autres. Sur le visage de la moitié d’entre eux, des petites gommettes ont été installées. Ce sont tous ceux qui, depuis le début de l’année, ont abandonné la « famille » Blizzard Entertainment, soit pour fuir sous des cieux plus cléments, soit parce qu’ils sont immobilisés pour burn-out ou dépression. Cette succursale européenne du géant du jeu vidéo Activision Blizzard, sise à Versailles, a abondamment été aperçue comme l’une des plus protégées et solidaires de l’industrie en France. Ses 450 travailleurs sont actuellement affectés par un plan de réduction de 30 % des effectifs annoncé le 12 février.

Ce jour-là, durant d’une réunion téléphonique avec ses actionnaires, Bobby Kotick, président d’Activision Blizzard, numéro un mondial de l’édition de jeux vidéo, établi aux Etats-Unis, annonce une réduction de 8 % des effectifs, soit approximativement 800 postes en moins dans le monde, principalement dans les métiers de l’édition, du support client et du marketing, pour s’ajuster sur la création. Avec 134 postes annulés, Blizzard Entertainment (nom de la structure versaillaise), filiale européenne polyglotte spécialisée dans l’animation de la communauté des joueurs, est le plus touché. Le lendemain, une réunion de crise est organisée. Depuis, plus rien ou presque.

« On travaille dans le noir »

Jeudi 20 juin, après quatre mois d’ambiguïté, les salariés de la principale antenne européenne de l’une des entreprises de jeu vidéo les plus mythiques (qui a créé World of Warcraft, Diablo, StarCraft, Hearthstone…) ont finalement été mis au courant par leur direction des contours du plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) illégal mis en place par le « top management ». Dans les grandes lignes : un package de quatre à cinq semaines de salaire par année d’ancienneté et dix mois de congé de classement, un plan de départs volontaires ouvert cet été et des licenciements économiques à la rentrée. Mais ils ignorent encore qui, effectivement, est concerné par le plan.

Depuis, les syndicats peignent les employés comme « stressés », « fatigués », « inquiets », « démotivés ». « A Blizzard, on se connaît tous depuis longtemps, les collègues finissent par devenir des amis, et voir des amis craquer, c’est dur », affirme l’un d’entre eux, les yeux dans le vague. Tous révoquent l’opacité dans laquelle se terre la direction. « En tant que manageur d’équipe, je n’ai aucune information sur rien, on est entièrement aveugle, on travaille dans le noir », se décourage Romain, représentant de la CGT. « Il y a un énorme sentiment de peur et un stress intense », confirme un cadre de l’entreprise.

En France le secteur bancaire perd des emplois depuis 2011

La Société générale a annoncé en avril  la suppression de plus de 700 postes en France.
La Société générale a annoncé en avril  la suppression de plus de 700 postes en France. PIERRE VERDY / AFP

 

En 2018, les effectifs des banques françaises ont perdu 3 400 postes d’emploi, soit un repli de près de 1 %.

Le secteur bancaire, l’un des primordiaux embaucheurs privés en France, est-il encore en mesure d’engendrer une autre fois de l’emploi, comme ce fut le cas avant la crise financière ? La désagrégation poursuit du nombre de salariés depuis le tournant des années 2010 ne porte pas à l’optimisme. En 2018, pour la septième année produite, l’industrie bancaire française a, en effet, restreint une nouvelle fois ses effectifs, selon les chiffres diffusés jeudi 20 juin par la Fédération bancaire française (FBF). En 2018, 362 800 personnes œuvraient dans les banques en France, soit une diminution de 3 400 postes par rapport à 2017, et un recul de près de 1 % des effectifs.

Tandis, la profession recrute. Les établissements ont recruté, l’an dernier, 42 300 travailleurs dans l’Hexagone, « un chiffre en constante hausse depuis cinq ans », note la FBF. Le secteur offre, en outre, des emplois stables. Les banques dites « commerciales » (par opposition aux établissements mutualistes), qui éditent plus de données, disent avoir embauché 69 % de leurs nouveaux salariés en CDI. La durée moyenne de l’ancienneté atteint quinze années. Les postes sont aussi plus qualifiés, puisque les 63 % des recrutements en CDI concernent des Bac + 4 ou Bac + 5 (contre 52 % en 2014).

Des départs nombreux

Ces recrutements ne punissent toutefois pas les départs, plus nombreux. Les démissions indiquent « désormais le principal motif de départ, en lieu et place des départs à la retraite [largement majoritaires en 2014] », montrait l’Observatoire des métiers de la banque dans une étude diffusée en décembre 2018. La banque ne parvient plus, autant que par le passé, à fidéliser ses commerciaux. Selon cet observatoire, « pour la première fois en 2017 », les métiers de la force de vente ont évoqué moins de la moitié des effectifs des établissements, non pas à cause d’un recul des embauches, mais d’« une augmentation du turnover, notamment chez les jeunes générations ».

Mais au-delà des obstacles à fournir certains types de postes, les banques françaises cherchent principalement à borner leurs effectifs pour accomplir des économies. Bien moins rentables qu’avant la crise financière, en raison des taux d’intérêt très bas qui rognent leurs marges sur les crédits et de leurs efforts pour consolider leur capital, la plupart des établissements réduisent leurs réseaux d’agences, automatisent les tâches qui peuvent l’être et délocalisent certaines activités. En avril, la Société générale prévenait encore la rupture de plus de 700 postes en France. Le « douzième plan de réduction d’effectif de l’ère Oudéa [du nom du directeur général, Frédéric Oudéa] », selon un représentant syndical de la CGT.

Le Medef veut réviser ses ressources

Geoffroy Roux de Bézieux s’est autorisé une hyperbole en publiant son dernier projet : « C’est la réforme la plus importante depuis la création du Medef, il y a vingt ans », a-t-il exprimé, le 19 juin, lors d’une conférence de presse. Le président de la première organisation d’employeurs précisait, une série de mesures pour « transformer » son mouvement. L’une d’elles, correspondante au financement, fait d’ores et déjà débat, au sein du patronat mais aussi chez les syndicats.

D’ici à la fin de son pouvoir, en 2023, M. Roux de Bézieux veut, en conséquence, que le Medef se passe des ressources que lui accordent nombreuses institutions paritaires – soit 4,4 millions d’euros, au total, ressemblant à 11 % de son budget annuel. Les sommes en question sont attribuées pour couvrir des dépenses reliées à l’implication de représentants du Medef dans la progression de structures telles que l’Unédic (assurance-chômage) ou Action logement (dispositif en faveur de l’habitat des salariés). Les autres organisations patronales et les centrales syndicales perçoivent, elles aussi, de tels subsides.

Le déplacement de M. Roux de Bézieux se lance dans une forme de sevrage, en nombreuses étapes. Un premier pas a été accompli cette année « sans que ce soit officialisé », a déclaré Patrick Martin, le président délégué du Medef, peu de temps après la conférence de presse : l’organisation a lâché à 1,2 million d’euros, en provenance notamment de l’Unédic. Un effort qu’il convient de relativiser, car « ils n’arrivent pas à consommer l’intégralité de leur enveloppe », d’après des syndicalistes.

« Facile et un peu démagogique »

En se distribuant de ces flux financiers, le numéro un du Medef déclare vouloir mettre fin à un système qui « nuit à [l’]indépendance » de son mouvement et « n’est pas déontologique » car il est « voté par les partenaires sociaux pour les partenaires sociaux ». Il ne va néanmoins pas aussi loin que l’ambition postée durant sa campagne pour remplacer à Pierre Gattaz : faire en sorte « que le MEDEF soit capable, à terme, de vivre des seules cotisations volontaires de ses adhérents ». On n’en est plus là, actuellement, car son organisation va continuer d’empocher l’argent distribué par l’Association de gestion du fonds paritaire national (AGFPN) – une autre source de financement pour le patronat et les syndicats (alimentée, en grande partie, par une contribution des entreprises). Il s’agit là d’un dispositif « légal, transparent et audité », a défendu M. Roux de Bézieux.

Les changements que la réforme de l’assurance chômage va apporter aux chercheurs d’emploi

Montant des allocations, conditions d’accès … voici comment la réforme du gouvernement diminuera les droits des chercheurs d’emploi.

Le gouvernement a publié, mardi 18 juin, une réforme de l’assurance-chômage en deux volets : d’un côté, de nouveaux droits à la formation et à l’accompagnement seront accordés aux solliciteurs d’emploi, et l’assurance-chômage sera ouverte aux salariés démissionnaires qui désirent se lancer dans un nouveau projet professionnel ; de l’autre, le régime de rémunération sera significativement durci.

Ce dernier volet, supposé dégager 3,4 milliards d’euros d’économies en deux ans, a provoqué l’ire des syndicats, qui y voient un coup dur pour de nombreux solliciteurs d’emploi. Voici en quoi il admette.

Assurance-chômage : le gouvernement envisage des économies drastiques

Combien de temps besogner pour déclencher ses droits au chômage ?

Pour aspirer à une allocation-chômage, une personne doit réhabiliter d’une certaine période de travail au cours de laquelle elle a contribué. Avec cette réforme, il faudra avoir travaillé encore plus pour avoir droit à l’allocation.

Comment recharger et reporter ses droits au chômage ?

Un allocataire chômage qui recouvre le travail avant la fin de sa période d’indemnité peut non seulement reporter ses droits non utilisés pour plus tard, mais aussi assembler de nouveaux droits au chômage. Ce système, baptisé « droits rechargeables », ne lui est abordable que s’il atteint un seuil minimum d’heures travaillées. La réforme va, là encore, durcir significativement l’accès au dispositif.

Quel montant pour l’allocation-chômage ?

Pour les salariés précaires

Le niveau de l’allocation-chômage saisie par le solliciteur d’emploi est actuellement compté à partir du salaire moyen perçu lors des jours où il a travaillé au cours des 12 derniers mois.

Le montant sera aussitôt calculé à partir du salaire mensuel moyen, quel que soit le nombre de jours travaillés.

Cette transformation n’aura pas de suite pour la plupart des salariés, qui sont en CDI. Il désavantagera en revanche les salariés précaires qui reliaient les CDD et les périodes de chômage, qui saisiront donc des allocations plus faibles. Le gouvernement témoigne avoir pris cette décision pour empêcher les cas où, grâce à ce mode de calcul, un solliciteur d’emploi gagnait davantage en étant au chômage que lorsqu’il travaillait.

Pour les hauts salaires

Le niveau de l’allocation-chômage est actuellement constant durant toute la période d’indemnisation.

Il baissera aussitôt de 30 % à compter du 7e mois d’allocation, mais seulement pour les chômeurs de moins de 57 ans qui encaissaient plus de 4 500 € bruts lorsqu’ils travaillaient (les 10 % les plus aisés).

Les syndicats enragés contre la modification de l’assurance-chômage

Laurent Berger et Véronique Descacq (CFDT), en août 2013.
Laurent Berger et Véronique Descacq (CFDT), en août 2013. BERTRAND GUAY / AFP
C’est introuvable de voir Laurent Berger taper si fort. « La CFDT est extrêmement en colère », lâche le numéro un de la centrale cédétiste, devant un essaim de journalistes, assemblés dans la cour de l’hôtel Matignon. Pas d’emphase, juste quelques mots âpres formulés en deux minutes, à l’issue d’une entrevue avec le chef du gouvernement, Edouard Philippe, et la ministre du travail, Muriel Pénicaud.

Reçu, en ce mardi 18 juin, avec d’autres leaders syndicaux et patronaux pour prendre connaissance de la réforme de l’assurance-chômage, M. Berger se dit « abasourdi » devant un projet « profondément injuste ». La « politique qui est mise en place (…) n’est pas du tout à hauteur de femmes et d’hommes », explique-t-il : elle « ne prend pas en compte la réalité concrète des demandeurs aujourd’hui qui subissent la précarité ».

Les mesures qui l’agacent le plus portent sur les « conditions d’entrée » dans le régime d’indemnisation : elles vont être durcies, puisque, pour avoir droit à une allocation, il faudra travailler plus (six mois au lieu de quatre) sur un laps de temps moins long (deux ans, contre vingt-huit mois). Autre innovation, que le secrétaire général de la CFDT a du mal à avaler : la dégressivité des prestations, pour les personnes percevant des salaires élevés à l’époque où elles étaient en activité – ce qui va avoir un gros impact sur les cadres. C’est « totalement inefficace pour le retour à l’emploi », déclare M. Berger, qui avoue que, au final, « on a une réforme archi-perdante pour l’ensemble des [chômeurs] ».

« Inique et inefficace »

Le plan du gouvernement aurait pu admettre des avancées, aux yeux du responsable cédétiste, avec le bonus-malus pour borner les recours aux contrats courts, qui simplifiera les cotisations des entreprises où la main-d’œuvre est stable et élèvera celle des employeurs dont les effectifs dirigent beaucoup. Mais le dispositif mis au point par l’exécutif est peu ambitieux, selon M. Berger, car il s’appliquera « simplement [à] sept branches professionnelles », entre lesquelles l’hôtellerie-restauration et le secteur de la fabrication des denrées alimentaires. Il y a tout de même un élément « positif », mais c’est le « seul » : le « renforcement de l’accompagnement » des inscrits à Pôle emploi.

En Parlant après le dirigeant de la CFDT, les délégués des autres confédérations de salariés tiennent un discours de la même eau. Avec ces dispositions « iniques », « inefficaces », « économiquement irresponsables », « moins d’un [chômeur] sur trois sera indemnisé demain », pronostique Catherine Perret, la numéro deux de la CGT. « Il n’y a que des perdants et les premiers d’entre eux sont les demandeurs d’emploi », ajoute Yves Veyrier, secrétaire général de Force ouvrière, qui mentionne, par ailleurs, une autre victime : « la négociation collective », foulée aux pieds par un exécutif bien peu respectueux des partenaires sociaux.

« Jour funeste »

« C’est un jour funeste pour l’assurance-chômage », ajoute François Hommeril, le président de la CFE-CGC – la centrale de l’encadrement. Le syndicaliste s’en prend, sans surprise, à la dégressivité des contributions pour les travailleurs les mieux payés. Avec cette nouvelle règle, le gouvernement fait « un procès d’intention aux cadres qu’il considère être des glandouilleurs qui profitent de l’allocation-chômage pour ne pas trouver du travail ». « C’est grave. (…) C’est travestir la réalité scientifique des choses et c’est vraiment indigne de le faire au nom d’une forme de justice sociale », déclare-t-il. Prenant la parole en dernier, le représentant de la CFTC, Eric Courpotin, révoque une logique dans laquelle « les demandeurs d’emploi sont considérés comme une variable d’ajustement financière ».

Il y a aussi de la contrariété parmi les organisations d’employeurs, à cause du bonus-malus. Une « idée un peu saugrenue », qui n’admettra pas de « juguler les contrats courts », examine François Asselin, le président de la Confédération des petites et moyennes entreprises. « Ça sera soit inefficace, soit, au pire, ça découragera l’emploi », découvre Geoffroy Roux de Bézieux, le patron du Medef. Mais leurs critiques résonnent mollement – sans doute parce que les attachés pensent avoir limité la casse, avec un système de modulation des cotisations circonscrit à sept secteurs et dont sont exemptées les sociétés employant jusqu’à onze personnes. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles M. Veyrier pense que les efforts sont surtout sollicités aux demandeurs d’emploi : c’est sur leur dos, dénonce-t-il en substance, que reposeront les 3,4 milliards d’euros d’économies établies de novembre 2019 à la fin 2021, puisque celles-ci seront synonymes de droits réduits.

Les syndicats affirment mais agissent, comme très souvent, en ordre disséminé. La CFDT appelle à un rassemblement le 25 juin. La CGT, de son côté, organise une mobilisation le lendemain, à l’occasion d’un conseil d’administration de l’Unédic – l’association paritaire qui gère l’assurance-chômage. Autant d’initiatives qui n’impressionneront guère le gouvernement, celui-ci étant persuadé d’avoir l’opinion avec lui sur un dossier où les premiers concernés sont peu organisés.

 

Assurance-chômage : la légitimité sociale négligée

Le premier ministre Edouard Philippe devant la ministre du travail Muriel Pénicaud, lors de la présentation de la réforme de l’assurance-chômage, à l’hôtel Matignon, le 18 juin.
Le premier ministre Edouard Philippe devant la ministre du travail Muriel Pénicaud, lors de la présentation de la réforme de l’assurance-chômage, à l’hôtel Matignon, le 18 juin. LUCAS BARIOULET / AFP
Si les objectifs du perfectionnement sont difficilement contestables, les traitements choisis sont notamment durs pour ceux qui vont s’inscrire à Pôle emploi et sont frappés du sceau de l’injustice.

Le Président de la République avait certifié, pour l’acte II de son quinquennat, « plus d’humanité ». En parlant, mardi 11 juin, devant l’Organisation internationale du travail (OIT), à Genève, le président de la République s’était procuré à une vibrante défense en faveur de la justice sociale, refusant que « l’ajustement économique et financier » prévale « sur les droits sociaux ». Il avait même fait l’éloge du tri­partisme – le fondement de l’OIT, qui recherche des arrangements entre l’Etat, les employeurs et les travailleurs –, formulant exiger s’en inspirer en France.

L’amélioration de l’assurance-chômage, sur laquelle l’Etat avait repris la main après l’échec des transactions entre les syndicats et le patronat, le 20 février, lui vendait l’occasion d’installer en pratique sur le dialogue social une transmutation de méthode. Peine égarée : la justice sociale est la grande omise du dispositif annoncé, mardi 18 juin, par le premier ministre, Edouard Philippe.

Les objectifs de la réforme sont difficilement contestables. Il s’agit d’abord de réaliser, entre novembre 2019 et la fin 2021, 3,4 milliards d’euros d’économies pour ne pas alourdir une dette déjà abyssale. Il s’agit ensuite, alors que le chômage est sur une courbe descendante, de réduire le nombre de chômeurs entre 150 000 et 250 000 d’ici à la fin du quinquennat. Mais les remèdes choisis sont particulièrement durs pour ceux qui vont s’inscrire à Pôle emploi et sont frappés du sceau de l’injustice.

Quand l’Etat se remplace aux partenaires sociaux, il ne fait que des mécontents. Cela avait déjà été le cas lorsque, le 24 novembre 1982, Pierre Bérégovoy, ministre (socialiste) des affaires sociales, devant l’inaptitude des syndicats et du patronat à se distinguer, avait pris un décret qui avait soutenu les différences de traitement entre chômeurs, donnant naissance à ce qu’on avait appelé « les nouveaux pauvres ».

« 100 % de perdants, rapidement »

Enveloppant le risque de se mettre à dos les syndicats, mais possédant que ces mesures sont habituellement bien reçues par l’opinion, le gouvernement a visiblement durci les règles pour bénéficier d’une indemnité. A l’avenir, il faudra avoir été en activité pendant six mois (au lieu de quatre aujourd’hui) sur une période de vingt-quatre mois (au lieu de vingt-huit) pour avoir une allocation dont les procédés de calcul ont aussi été revus à la baisse.

Lors du meeting entre les partenaires sociaux et le premier ministre, mardi, Laurent Berger, le secrétaire général de la CFDT, a exposé plusieurs cas concrets de solliciteurs d’emploi pour prouver que cette réforme va faire, selon lui, « 100 % de perdants, rapidement ».

  1. Philippe a aussi établi une dégressivité des prestations pour les cadres qui n’était pas sollicitée par le patronat et dont le rendement sur la reprise d’emploi est douteux. Les employés qui touchaient, lorsqu’ils étaient en poste, plus de 4 500 euros brut par mois supporteront, s’ils sont au chômage à moins de 57 ans, une baisse de contribution de 30 % au bout du septième mois.

Sur la lutte contre le déséquilibre, la promesse de campagne de M. Macron sur la création d’un bonus-malus pour punir les entreprises qui amplifient des contrats courts n’est que relativement tenu : il ne concernera que sept secteurs, le bâtiment et le médico-social étant particulièrement épargnés. La réforme comporte des mesures positives sur la formation et l’accompagnement des chômeurs, mais cela ne satisfait pas à la rééquilibrer dans le sens de la justice sociale.

Le turn-over des infirmiers aux urgences

Dans les hôpitaux parisiens, les infirmiers ne demeurent en moyenne que trois ans dans les services d’urgence, selon des estimations. Un déséquilibre des équipes qui brouille encore un peu plus le travail des soignants.

Ce sera la deuxième fois qu’elle immobilise les urgences. Mais cette fois, pour de bon. Anne-Claire Rafflegeau redonnera franchement sa blouse d’ici à la fin de l’année et changera de métier, après six ans aux urgences du Kremlin-Bicêtre, au sud de Paris. « Je voulais être infirmière depuis l’âge de 15 ans mais là, je suis à bout. Physiquement, psychologiquement. J’ai 31 ans, je suis célibataire, je ne gagne pas hyper bien ma vie. J’ai fait mon temps aux urgences. »

Quand elle sort diplômée de son école d’infirmières il y a huit ans, son ultime stage la projette aux urgences. Elle adore : « La proximité avec le patient, les différentes pathologies, l’adrénaline… on ne sait jamais ce qui va se passer ! » Mais déjà, les conditions de travail sont embrouillées et, au bout de trois ans, Anne-Claire fait un « burn-out » à la suite d’une attaque physique. « La direction ne m’a absolument pas accompagnée. J’étais dégoûtée. »

La jeune soignante abandonne alors son service pour atteindre une habitation privé. Mais au bout de deux ans, l’envie de récupérer les urgences l’emporte : revenue comme infirmière de nuit au Kremlin-Bicêtre, elle ne convient plus son service. 80 % de l’équipe qu’elle éprouvait est partie, dit-elle. Depuis, face à la détérioration des conditions de travail, Anne-Claire Rafflegeau s’est nommée et fait actuellement partie du collectif Inter-Urgences, qui a déterminé lundi 17 juin de continuer le mouvement de grève.

« Nous sommes les pièces d’une machine qui nous broie »

S’il n’existe pas de statistiques officielles sur le turn-over des paramédicaux dans les services d’urgence ; plusieurs déclarations font état d’une forte instabilité des équipes. Selon l’évaluation de Christophe Prudhomme, porte-parole de l’association des médecins urgentistes de France (AMUF), accomplie à partir d’attestations de cadres de santé, une infirmière demeure en moyenne trois ans dans un service d’urgence parisien. Certes, « c’est plus stable dans les petits services de province, mais dans tous les grands hôpitaux, il y a une très forte rotation, assure M. Prudhomme. A l’hôpital Lariboisière, où les conditions sont particulièrement difficiles, la moitié du personnel est partie en un an ! »