Aux urgences, la crainte du manque de personnels soignants durant l’été

Une enquête de l’ARS d’Ile-de-France révèle que les démissions de médecins urgentistes dans les hôpitaux publics de la région ont très fortement augmenté en 2018.

Par Publié aujourd’hui à 03h29, mis à jour à 14h16

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Des membres des services d’urgence des hôpitaux publics manifestent à Paris, le 6 juin, pour de meilleurs salaires et plus de personnel.
Des membres des services d’urgence des hôpitaux publics manifestent à Paris, le 6 juin, pour de meilleurs salaires et plus de personnel. AURORE MESENGE / AFP

L’été s’annonce de nouveau particulièrement tendu dans de nombreux services d’accueil des urgences (SAU). En plein épisode de canicule et à quelques jours d’une nouvelle manifestation nationale des infirmiers et des aides-soignants en grève pour dénoncer la dégradation de leurs conditions de travail, le 2 juillet, à Paris, une « enquête flash » menée par l’agence régionale de santé (ARS) d’Ile-de-France montre à quel point ces services fonctionnent en sous-effectif. Au 20 juin, dans les SAU des huit départements franciliens, de 458 à 728 plages médicales de douze heures n’étaient toujours pas pourvues pour juillet et de 567 à 892 ne l’étaient pas pour août.

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Ces résultats, établis à partir des réponses de la grande majorité des 92 services d’urgence franciliens (86 % ont répondu à l’enquête), sont du même ordre que ceux obtenus lors de la précédente édition, il y a un an ; à la même époque en juin, 531 plages n’étaient pas pourvues pour juillet et 711 pour août.

« La situation n’est pas plus inquiétante qu’il y a un an mais ce n’est pas pour autant qu’il faut s’en satisfaire, il va falloir trouver des solutions », explique Didier Jaffre, le directeur de l’offre de soins de l’ARS, qui assure « tout faire pour ne pas avoir à fermer de ligne de service mobile d’urgence et de réanimation (SMUR) » cet été.

Tous les hôpitaux ne sont pas touchés de la même façon par le manque de personnel soignant : en Ile-de-France, 41 % d’entre eux se disent concernés par une carence de médecins en juillet et 48 % en août. A l’origine de ces difficultés : un manque structurel de praticiens, qui s’aggrave pendant l’été, une période pendant laquelle les titulaires prennent leurs congés.

Démissions et recrutements

Fait marquant de cette troisième édition de l’enquête : la forte accélération du nombre de démissions de médecins urgentistes dans les établissements publics, avec 119 départs en 2018 (dont 46 dans les seuls hôpitaux de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, AP-HP), contre 73 en 2017 et 43 en 2015.

« Certains partent en province, certains abandonnent la médecine d’urgence et d’autres enfin prennent une activité d’intérim à 1 500-1 700 euros les vingt-quatre heures ou vont travailler dans le privé », constate Mathias Wargon, le chef des urgences de l’hôpital Delafontaine, à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis). « Notre système d’information ne permet pas de dire où ils sont allés », note M. Jaffre.

La bonne santé de l’emploi facilite la mobilité des cadres

La majorité des cadres envisagent de changer de poste ou d’entreprise d’ici à 2022, indique le baromètre annuel de l’Association pour l’emploi des cadres (APEC), publié mercredi 26 juin.

Par Publié le 26 juin 2019 à 00h15

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« En 2018, 30 % des cadres ont réellement bougé, contre 25 % en 2015 et 24 % en 2013 »
« En 2018, 30 % des cadres ont réellement bougé, contre 25 % en 2015 et 24 % en 2013 » Monty Rakusen/Cultura / Photononstop

Plus de six cadres sur dix (64 %) envisagent une mobilité dans les trois ans à venir, révèle l’Association pour l’emploi des cadres (APEC) dans son baromètre annuel, publié mercredi 26 juin. Leur intention est d’abord (41 %) de changer de poste, puis (39 %) d’aller voir ailleurs et enfin (12 %) de créer une entreprise. Mais quelle que soit la motivation de la mobilité, depuis dix ans que l’APEC mesure les intentions et la réalité de la mobilité professionnelle du secteur privé, la tendance est à la hausse.

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En 2018, 30 % des cadres ont réellement bougé, contre 25 % en 2015 et 24 % en 2013. 21 % ont changé soit de poste, soit de service, soit de département, soit de contenu de poste au sein de leur entreprise et 9 % l’ont quitté. Mais ceux qui bougent dans l’entreprise ne le font pas pour les mêmes raisons que ceux qui en sortent. L’APEC explique la progression de la mobilité externe par « la dynamique du marché de l’emploi cadre ».

Avec un taux de chômage à 3,8 %, dont 100 000 chômeurs de longue durée, les cadres sont aujourd’hui quasiment au plein-emploi. Les entreprises qui n’avaient recruté que 143 700 cadres en 2009 en ont embauché 266 400 en 2018 ! Un record qui ne devrait pas s’arrêter là. Pour 2019, l’APEC a annoncé une nouvelle hausse des recrutements de 2 % à 10 %. Mais les motivations « défensives » déclarées par les cadres modèrent tout enthousiasme.

Occasion à ne pas manquer

La première est le besoin de « quitter un environnement difficile (stress, difficultés relationnelles) » et la deuxième est « l’absence de choix ». La bonne santé du marché de l’emploi se transforme dès lors en occasion à ne pas manquer. La mobilité interne dépend, quant à elle, davantage des réorganisations et des restructurations. Elle est en majorité (52 %) décidée à l’initiative de l’employeur. Les motivations le plus souvent avancées par les cadres sont : une opportunité à saisir, un gain en responsabilité ou l’absence de choix.

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En 2018, au sein de l’entreprise, 8 % des cadres ont ainsi changé de poste et 13 % ont connu d’autres types de changements. C’est cette deuxième composante qui augmente depuis 2014, précise l’APEC. Dans le cas d’une mobilité interne, 65 % des cadres ont vu leur charge de travail alourdie.

Cadres jeunes plus mobiles et moins fidèles

Des emplois et de l’eau pure : les promesses d’Anne Hidalgo pour les Jeux olympiques

Les anneaux olympiques devant l’hôtel de ville de Paris, le 23 juin 2018.
Les anneaux olympiques devant l’hôtel de ville de Paris, le 23 juin 2018. LUCAS BARIOULET / AFP

Des emplois par milliers, de l’eau pure, des quartiers durablement accessibles aux personnes handicapées… A Paris, les Jeux olympiques (JO) et paralympiques n’apporteront pas seulement un peu de spectacle et d’agitation durant l’été 2024. Anne Hidalgo, la maire socialiste de la capitale, entend faire en sorte que cette manifestation sportive soit l’occasion d’« accélérer la transformation de la ville », avec des effets positifs avant, pendant et après la compétition.

Tel est le sens des vingt mesures présentées, mardi 25 juin, par ses adjoints Jean-François Martins et Célia Blauel. Un programme qui tombe à point nommé, à neuf mois des élections municipales, à l’issue desquelles Anne Hidalgo espère bien être réélue.

Parmi les nouvelles promesses figure l’ouverture de 10 000 formations gratuites dans les domaines du BTP, de la sécurité et de la restauration. Les Parisiens non qualifiés qui sont visés pourront ainsi travailler durant les jeux, par exemple pour filtrer les entrées dans les stades ou servir dans les restaurants éphémères, et faire valoir ensuite ces nouvelles compétences. La mairie entend également « insérer 20 000 personnes dans l’emploi » en améliorant leur bagage grâce aux structures d’insertion par l’activité économique.

Des quartiers « 100 % accessibles »

Autre projet : la création, à l’occasion des jeux, de plusieurs quartiers 100 % accessibles aux personnes handicapées, qu’il s’agisse d’accéder aux logements, aux transports, aux commerces, aux équipements sportifs ou encore aux écoles. Ces quartiers pilotes devraient se trouver autour des sites olympiques et paralympiques, mais leur localisation exacte n’est pas encore connue.

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Pour que les jeux ne bénéficient pas qu’aux athlètes olympiques, l’équipe d’Anne Hidalgo promet, par ailleurs, de créer « un nouvel équipement sportif par arrondissement », ainsi que deux parcours sportifs. Elle s’engage aussi à rénover quatre centres sportifs, qui seront mobilisés pour les entraînements olympiques, comme la piscine Georges-Vallerey (20e arrondissement).

Plusieurs autres promesses étaient déjà connues, et sont confirmées, comme la construction, porte de la Chapelle, d’une arène de 8 000 places pour les épreuves de badminton, d’escrime-fauteuil et de parabadminton. Elle pourra, en principe, accueillir dès 2022 des compétitions sportives ainsi que des concerts et des spectacles, et devrait « contribuer à la métamorphose » de ce quartier en grande difficulté.

Rendre la Seine à la baignade

La mairie confirme également son engagement d’améliorer suffisamment la qualité de l’eau de la Seine pour que le fleuve soit « rendu à la baignade » à l’issue des épreuves. Depuis 1923, il est interdit de s’y baigner, en raison notamment de la présence de bactéries de type Escherichia coli. Tenir cette promesse nécessite en particulier d’équiper les stations d’épuration de Valenton (Val-de-Marne) et Noisy-le-Grand (Seine-Saint-Denis) de nouveaux systèmes de dépollution.

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Anne Hidalgo entend aussi profiter des JO pour faire de Paris une ville « sans plastique jetable » d’ici à 2024. Cela passerait par la suppression des articles jetables en plastique au sein de l’administration en 2020, puis de tous les services publics parisiens (crèches, cantines, musées, etc.) en 2022. A terme, la mairie aimerait convaincre l’Etat d’obtenir l’interdiction pour tous de l’usage du plastique jetable.

Sur le front de l’écologie, Anne Hidalgo et son équipe souhaitent, en outre, que la « voie olympique » réservée sur le périphérique aux sportifs et aux délégations durant les jeux soit conservée par la suite. Elle pourrait alors être utilisée par les transports en commun, les véhicules propres et ceux comptant plusieurs passagers.

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« Les jeux créent une contrainte doublement positive, commente Jean-François Martins, l’adjoint chargé des sports. Cela met une pression forte pour que les équipements, les projets se concrétisent en 2024, sans perdre de temps. Et cela suscite un supplément de bonne volonté chez tous nos partenaires, les entreprises, l’Etat, les autres collectivités, etc. »

D’autres restent beaucoup plus critiques. « L’urgence écologique devrait dicter à Anne Hidalgo de renoncer aux Jeux olympiques », juge Danielle Simonnet, qui sera la tête de liste de La France insoumise aux prochaines municipales.

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Fin des examens écrits, pourcentage de boursiers : Sciences Po Paris bouleverse son choix

Sciences Po Paris va annuler ses examens écrits d’entrée en première année, en faveur d’une sélection sur dossier, notes du bac et entretien.

A partir de 2021, les postulants à Science Po Paris seront jugés à partir de leurs notes au lycée et au baccalauréat, et par un oral.

C’est un carambolage dans le monde de l’enseignement supérieur : la fin du concours allégorique d’une grande école, et son entrée dans une nouvelle ère de la sélection, plus particularisée, où l’oral prend aussitôt la place de la sacro-sainte dissertation.

Sciences Po Paris a informé, le 25 juin, un remodelage de sa procédure d’admission en première année, à partir de 2021. Finies les examens communes d’entrée, emblématiques du « concours à la française ». Achevées la dissertation d’histoire, l’épreuve en sciences économiques ou en philosophie et l’épreuve de langue vivante, trio sur lequel ont examiné en 2019 plus de 5 000 lycéens.

Dorénavant, comme dans les universités anglo-saxonnes, la sélection s’accomplira principalement sur dossier : notes remportées pendant le lycée, dissertation d’un « essai » personnel, résultats du bac. A ce tiercé s’additionnera un oral, auquel seront conquis tous les candidats présélectionnés, et qui mêlera un entretien de motivation et une discussion autour d’un document.

L’instruction sera semblable pour tous, y compris pour les lycéens issus d’établissements étrangers (qui disposent actuellement d’une procédure parallèle), ainsi que pour les jeunes des 106 maisons défavorisés avec lesquels Sciences Po a signé des « conventions éducation prioritaire » (CEP). Ce concours spécifique, créé en 2001 et basé sur des oraux, a permis à 160 jeunes d’assimiler Sciences Po en 2018 (environ 10 % de la promotion).

CSP+ en majorité

« Nous faisons face à une crise globale de la pertinence des élites, qui nous amène à reconnaître sur la profession toute notre procédure, déclare Frédéric Mion, le directeur de l’établissement. Nous voulons plus de diversité des parcours et des origines, et nous voulons aussi prendre en compte plusieurs critères d’excellence, pas uniquement académiques : l’ouverture d’esprit, la persévérance, la capacité d’invention ou de résilience d’un candidat. » Il inscrit aussi cette réforme…

A partir de 2021, les candidats à Science Po Paris seront estimés à partir de leurs notes au lycée et au baccalauréat, et par un oral.

Violences, Sursollicitation, manque de moyens: les pompiers alertent un été de grève

A la décision de sept syndicats qui ont mandaté leur antécédent directement à Christophe Castaner, les sapeurs-pompiers doivent commencer, mercredi 26 juin, une grève entrevue pour durer jusqu’au 31 août. Au ministère de l’intérieur, on se veut tranquillisant : « Le mouvement n’aura pas d’impact sur la prise en charge de nos concitoyens. » Tenus de garantir un service minimum, les grévistes se contenteront d’inscriptions sur les casernes, les véhicules et les tee-shirts, ou de brassards lors des interventions.

Les signataires – qui évoquent 85 % des 40 500 pompiers professionnels de France, et nomment les 195 000 pompiers volontaires à les maintenir – sollicitent notamment « le retrait du projet de loi de transformation de la fonction publique », « une revalorisation de la prime de feu à 28 % » – comme la prime de risque des gardiens de la paix – contre 19 % maintenant, et un « recrutement massif » pour combler les besoins. Les 12 500 pompiers de Paris et de Marseille, ayant le statut de militaires, ne sont pas concernés par le mouvement.

André Goretti, président de la Fédération autonome des sapeurs-pompiers professionnels (FA/SPP-PATS), premier syndicat du métier, explique :

« Il s’agit surtout d’exprimer le ras-le-bol général. On nous demande chaque année d’assurer de plus en plus de missions avec de moins en moins d’effectifs. Le service public de secours est malade. »

« De 2003 à 2018, rappelle Sébastien Delavoux (CGT), on est passé de 3,5 à 4,6 millions d’interventions par an », un chiffre en hausse de 7 % chaque année. Le « secours aux personnes » représente 84 % des interventions, contre à peine plus de 50 % au début des années 2000. « On nous appelle trop souvent pour des choses qui ne sont pas dans notre périmètre, déplore Sébastien Delavoux. Parce que si vous appelez le 18, il y aura toujours quelqu’un pour vous répondre. »

« En cas d’ivresse sur la voie publique par exemple, la police devrait verbaliser l’individu et le placer en dégrisement, expose André Goretti. Mais comme la police manque d’effectifs, on nous appelle pour emmener l’individu aux urgences. » Les syndicats dénoncent en chœur une « sursollicitation » due aux « carences de l’Etat », révélatrice des déserts médicaux, du vieillissement de la population, et d’une organisation défaillante entre le SAMU, qui dépend du ministère de la santé, et les pompiers.

Pas d’« embauche massive »

Place Beauvau, on garantit « partager » ce constat : « Des groupes de travail pensent aux moyens de faire baisser la pression au niveau de la prise en charge des personnes, comme le rapprochement entre les ARS [agences régionales de santé] et les SDIS [services départementaux d’incendie et de secours], ou la limitation du temps d’attente des pompiers aux urgences. »

Pas de « recrutement massif » au programme, néanmoins. « La solution consiste plutôt à ne faire sortir les pompiers que quand c’est nécessaire, déclare Olivier Richefou, président de la Conférence nationale des SDIS, et représentant de l’Assemblée des départements de France – lesquels paient les salaires des pompiers. La mise en place d’un numéro unique et de plates-formes d’appels départementales communes aux acteurs de l’urgence – SAMU, pompiers, police et gendarmerie – permettrait de réduire le nombre d’interventions. »

La hausse de la prime de feu ne semble pas plus à l’ordre du jour, six mois après les augmentations consenties aux policiers et gendarmes lors du mouvement des « gilets jaunes », et quelques jours après le délivrance de 70 millions d’euros pour des urgentistes en grève. « Cela coûterait 130 millions d’euros, calcule Olivier Richefou, et les départements n’ont pas 130 millions d’euros pour cela. »

Les pompiers essaient d’autre part l’attention sur les violences à leur égard, qui éprouvent une hausse inquiétante : en 2015, 1 939 déclaraient avoir été victimes d’une agression. Ils étaient 2 813 en 2017, selon l’Observatoire national de la criminalité et des réponses pénales. Le ministère de l’intérieur a sollicité, en mars, à tous les préfets « d’établir un diagnostic sur la sécurité des pompiers », et lancera en septembre « une campagne nationale de sensibilisation » sur le sujet.

 

Varier les profils et “démocratiser” les embauches en renforçant les principes républicains

Plutôt que de « retirer l’ENA », l’accès des « formations d’élites » à des publics plus divers doit passer par l’exploration d’autres compétences dans les concours d’accès, défendent les participants à l’Institut de l’engagement.

Annuler l’ENA ? Changer nos élites ? La discussion actuelle a ouvert grand la porte aux envies de pousser la formation de la jeunesse. Concours pénibles d’accès, esprit de compétition et de classement, barrières sociologiques infranchissables, représentation sociale et entre-soi : un big bang est nécessaire. Pendant longtemps, on a cru que le concours était l’infranchissable garant de l’idéal républicain d’égalité. On a mis énormément de temps à se rendre compte que le concours pouvait lui-même entretenir la reproduction des élites ou éloigner insidieusement une partie des jeunes, en fonction de leur origine sociale, voire ethnique.

De ce constat certains retranchent qu’il faut glisser des ségrégations positives au sein des concours existants, voire supprimer les écoles dont les concours s’affirment si peu ouverts. Il existe pourtant une voie pour répondre vite à cette revendication de démocratisation, pour délier ce problème sans détruire, sans abandonner à nos principes républicains, sans tomber de Charybde en Scylla.

La mutation de paradigme passe par la mise en avant d’autres valeurs, celles de la gratitude. L’esprit d’entraide, de solidarité, de coopération doit pouvoir avoir tout autant qu’une bonne note en maths. Il faut faire évoluer l’accès aux formations les plus glorieuses et varier les profils de ceux qui dressent des responsabilités. Cette voie a été délacée discrètement mais solidement par l’Institut de l’engagement et les 150 établissements d’enseignement supérieur qui en sont collaborateurs. De quoi s’agit-il ?

Valoriser la reconnaissance

Pour améliorer la promesse, l’Institut a procréé un concours ouvert à tous les jeunes qui ont accompli leur service civique ou un bénévolat soutenu, mais c’est un concours sur les projets, sur les motivations, sur les parcours. Il a été avéré, avec l’appui de la Conférence des présidents d’université et celui de la Conférence des grandes écoles, comme l’adéquat de leur acceptabilité par des établissements aussi divers que huit instituts d’études politiques (dont Sciences Po Lille), des écoles de management (dont Skema, l’EM Lyon, Audencia, TBS, ESCP-Europe, GEM), des universités (dont Paris-Nanterre).

L’Etat lui-même a ouvert cette parité par des arrêtés ministériels, pour l’accès aux formations des instituts du travail social. Toutes ces universités ouvrent leurs portes à des jeunes qui ne sont pas passés par les voies traditionnelles : ils arrivent d’autres horizons culturels, d’autres origines sociales et ont souvent pris des chemins de traverse dans leur parcours scolaire. Et c’est tant mieux !

La profession des réalisateurs de documentaires est fragilisée par un financement déstabilisé par les chaînes.

Au festival Sunny Side of the Doc, à La Rochelle, en 2016.
Au festival Sunny Side of the Doc, à La Rochelle, en 2016. XAVIER LEOTY / AFP

Le mouvement de réclamations des opérateurs de documentaires poussait depuis plusieurs semaines sur les réseaux sociaux. Il s’interprétera bientôt par la création du premier syndicat professionnel, alors qu’il ne présentait jusqu’à actuellement qu’une multitude d’associations.

Cette « Guilde », dont la naissance à l’automne doit être proclamé le 25 juin au festival du documentaire Sunny Side of the Doc à La Rochelle, a montré fin mars sur Facebook, en réaction à la proposition par des syndicats de producteurs d’un salaire minimum – exigé de longue date par les documentaristes – de 120 euros par jour, un montant jugé « méprisant » par ces derniers. Le 20 mai, 500 réalisateurs ont voté pour la formation de ce syndicat.

« Notre rémunération, mais aussi le temps de tournage, baisse depuis plusieurs années, alors qu’on nous demande de faire des films toujours plus exigeants », regrette Elizabeth Drévillon, membre du comité provisoire de la Guilde et coréalisatrice de Religieuses abusées, l’autre scandale de l’Eglise, dispensé sur Arte en mars.

« Réaffirmer les bonnes pratiques »

Ce futur syndicat entend peser dans les négociations avec les producteurs pour « réaffirmer les bonnes pratiques », déclare Mme Drévillon. Parmi les premiers griefs que la Guilde soutiendra : la rémunération systématique du travail d’écriture en amont, des forfaits moins déconnectés du temps de travail effectif du réalisateur ou encore une transparence sur la répartition du financement du documentaire.

« Le service juridique pourra aussi jouer un rôle de conseil en fournissant des contrats types et des grilles de salaires selon le programme, pour savoir quoi demander à certains producteurs qui fonctionnent parfois à la tête du client », déclare le journaliste Stéphane Bentura, en accentuant être « bien conscient que la production va mal elle aussi ».

La fragilisation du secteur s’est pressée avec le foisonnement des chaînes de télévision au budget modeste

De fait, le bouleversement du secteur s’est accéléré avec le foisonnement des chaînes de télévision au budget modeste. « Le volume de la production de documentaires a été démultiplié avec les chaînes thématiques ou de la TNT, qui ont des capacités financières moins grandes que les chaînes historiques », déclare Stéphane Le Bars, délégué général de l’Union syndicale de la production audiovisuelle (USPA). Pour un documentaire de 52 minutes, un réalisateur est ainsi rémunéré en moyenne 17 090 euros sur les grandes chaînes publiques, contre 9 805 euros sur la TNT, d’après une étude de la Société civile des auteurs multimédia (Scam) de 2018.

Une action d’enchantement entre entrepreneurs et chercheurs dans le Forum BIOTechno

A l’accès, l’affiche annonce un atelier « jeux de rôle », qui peut paraître occasionnel dans un très sérieux Forum BIOTechno consacré à soutenir les étudiants en biologie à adopter une carrière. En poussant la porte, on aperçoit plusieurs jeunes gens, âgés de 25 à 30 ans, tous sur leur trente et un, exceptionnellement accumulés, maniant un langage pas forcément accessible pour le commun des mortels, où l’on capte qu’il est question de « paillasses », de « patents » ou de « biomarqueurs ». Ici ce ne sont pas des luttes ou des grands faits historiques que l’on simule, mais des entretiens d’embauche. Et c’est dans la peau de recruteurs et de candidats qu’on se glisse.

Ces jeunes font partie de l’embellissement de l’université française dans le domaine de la biologie. Ils sont doctorants (en cours de thèse), docteurs (titulaires d’un doctorat, bac + 8) ou postdocs (jeunes chercheurs diplômés, recrutés en CDD dans un laboratoire de recherche). Ils parviennent de consacrer trois années ou plus de leur vie à la recherche scientifique. Mais s’ils sont dans cette pièce en ce vendredi de juin, c’est qu’ils envisagent, comme disent certains, de « passer du côté obscur » : quitter le monde académique – parcours considéré comme classique, menant à des carrières de chercheur et d’enseignant – et entrer dans celui de l’entreprise.

Pour cela, ils doivent apprendre à « se vendre », et ce n’est pas une évidence. « Les doctorants et docteurs sont extrêmement capés, ce sont de vrais spécialistes de leurs thématiques de recherche, explique Charlène Planchenault, animatrice de cet atelier et consultante chez Kelly Scientifique, un cabinet de recrutement. En revanche, ils ne vont pas naturellement mettre en avant leurs compétences transversales, tout simplement parce qu’ils n’en sont absolument pas conscients. Alors qu’en trois ans ou plus de doctorat ils ont acquis d’énormes qualités, surtout en gestion de projet et en recherche de partenaires. On leur apprend à s’en prévaloir face aux recruteurs. »

« Les années de thèse sont actuellement considérées comme de réelles expériences professionnelles. » Charlène Planchenault, animatrice de cet atelier et consultante chez Kelly Scientifique

Perles rares

Depuis plusieurs années, la cote des bac + 8 a éclaté sur le marché du travail. Eux que les entreprises ont souvent vus comme des rats de laboratoire inadaptés aux contraintes du privé sont aujourd’hui de plus en plus recherchés. « Ce sont vraiment des profils très complets, très autonomes et très créatifs, assure Charlène Planchenault. Les années de thèse sont actuellement considérées comme de réelles expériences professionnelles. »

Les employeurs potentiels viennent donc complimenter les docteurs dans les événements qui leur sont simulés. Au Forum BIOTechno, entre les ateliers de CV et d’entretiens et les tables rondes sur les différents métiers abordables, une dizaine d’entreprises ont décidé d’investir dans des stands – payants – pour avoir accès à ces perles rares. Les deux cofondateurs de Neoplants, « jeune pousse » en biologie synthétique des plantes, attardent bien y recruter plusieurs de leurs futurs assistants. « Nous allons embaucher six personnes, dont quatre docteurs, explique Patrick Torbey, lui-même docteur de l’Ecole normale supérieure. C’est un vrai choix stratégique. Ils sont les meilleurs pour innover, pour résoudre des problèmes qui n’ont jamais été résolus jusque-là. Et ils sont très curieux, y compris dans les domaines qui ne sont pas les leurs. »

« Quand on crée une petite entreprise, on passe son temps à devoir dénouer des problèmes, augmente son associé Lionel Mora. Or 90 % du temps d’une thèse consiste à être apprécié à des embûches. Ça a une valeur inappréciable ! Mais tout le monde n’est pas adapté au monde de l’entreprise. Les expirations sont beaucoup plus agressives, ce n’est pas la même gestion du temps. Moi qui ne suis pas issu de ce milieu, ça m’a toujours fasciné de voir à quel point les chercheurs ont besoin de temps pour lire de la bibliographie et pour penser, tout simplement. Il faut juste réussir à combiner cela avec la réalité du privé. »

Nouvelle esprit

L’intérêt est mutuel. Ce jour-là, les jeunes chercheurs font la queue, CV en main, discours de motivation en tête, pour tenter de séduire ces employeurs potentiels. Maya (les prénoms ont été changés à la demande des intéressés), qui a effectué sa thèse sur le diagnostic des maladies infectieuses il y a cinq mois, s’en développe : « Je veux changer le monde, participer à l’innovation concrète, faire des découvertes qui vont agiter la vie des gens. Et je ne pense pas que ce soit dans l’académique que je peux y arriver. On perd trop de temps avec toutes les contraintes administratives et de publications. C’est dans le privé qu’on a effectivement les moyens et le contexte propices à la découverte. Mais, attention, pas n’importe quel privé ! Je suis très attachée à l’éthique, je ne veux pas être une machine à produire de l’argent. »

Pour Allan, spécialisé dans les prothèses, ce sont des attentions réalistes qui ont guidé son choix : « En poursuivant dans l’académique, je me préparais à quatre, dix, voire quinze ans de CDD, d’incertitude, de précarité et de pression avant, peut-être, d’obtenir un poste. Ce n’est pas ma conception de l’existence. J’adore la science et la recherche mais ce n’est pas toute ma vie. Je veux édifier une famille, profité et non m’imposer encore des années de sacrifices. Et je pense qu’on peut faire un travail tout aussi passionnant en entreprise. Evidemment, je ne vais pas me précipiter. Je choisirai le poste qui me fera vibrer. »

Parmi les ateliers les plus affectionnés, ceux de l’Association Bernard Gregory (ABG), qui conduit les docteurs dans leurs évolutions de carrière depuis près de quarante ans. Et a vu apparaître, ces dernières années, ce nouvel esprit. « Pendant longtemps, le renoncement à une carrière académique était considéré comme un échec, reconnaît Vincent Mignotte, directeur d’ABG. Actuellement, le privé n’est plus forcément un choix contraint. Certains débutent même leur thèse en sachant déjà qu’ils ne resteront pas dans la recherche fondamentale. Ils sont de plus en plus conscients des débouchés captivants qui peuvent exister dans le monde de l’entreprise. C’est évidemment le cas pour les sciences dures et naturelles, mais également pour les sciences humaines et sociales. Par exemple, pour le développement de la voiture autonome ou des objets connectés, on a besoin de sociologues et d’anthropologues pour travailler sur les réactions de la population. »

Sarah doit entretenir sa thèse d’immunologie à la fin de l’année et sait depuis plus d’un an qu’elle rejoindra ensuite le secteur privé. Mais elle redoute d’informer son directeur de thèse…

Reste à persuader les plus récalcitrants : les encadrants des jeunes chercheurs. Sarah doit entretenir sa thèse d’immunologie à la fin de l’année et sait depuis plus d’un an qu’elle rejoindra ensuite le secteur privé. Mais elle redoute de prévenir son directeur de thèse : « Deux de mes camarades ont été transparents avec leurs directeurs. Ceux-ci, bien plus âgés, avec une mentalité “à l’ancienne”, ont été rebutés par ce choix et se sont totalement désintéressés d’eux pour la fin de leur doctorat. Ça a été très violent. J’admire beaucoup mon encadrant et je ne veux vraiment pas le décevoir. L’informer va être une épreuve. Rien que d’y penser, j’ai une boule au ventre ! Mais je ne peux quand même pas choisir ma carrière en fonction de lui… »