A un an des JO de Paris, le bilan contrasté des conditions de travail sur les chantiers d’Ile-de-France
Ce sont deux chantiers cruciaux parmi les grands travaux lancés en Ile-de-France : le projet Eole, qui vise à prolonger le RER E, et le bassin d’Austerlitz, censé assainir l’eau de la Seine d’ici aux Jeux olympiques et paralympiques. Ils ont en commun une major du bâtiment, le groupe de construction Fayat, et d’avoir été, chacun, le théâtre d’un accident dramatique.
En mars 2020, envoyé seul sur le toit d’un chantier de Pantin (Seine-Saint-Denis), dès sa première semaine de stage dans une filiale de Fayat, Jérémy Wasson, étudiant à l’Ecole spéciale des travaux publics de 21 ans, fait une chute mortelle en passant à travers une trémie – un trou laissé dans le sol en attente d’aménagement – mal protégée.
Le 16 juin 2023, c’est Amara Dioumassy, maçon de 51 ans dans une autre filiale du même groupe, qui meurt percuté par un camion sur un chantier le long de la Seine où les mesures de sécurité laissent à désirer. Un nouvel accident qui a consterné Frédéric Wasson, le père de Jérémy. « Je n’ai toujours pas le sentiment que la mort de notre fils ait servi à quelque chose et que Fayat ait changé quoi que ce soit dans ses processus de sécurité. Elle continue à recevoir des stagiaires de l’école de mon fils, alors que l’inspectrice du travail a constaté un déficit de formation et de sécurité », s’indigne-t-il. Contacté à plusieurs reprises, Fayat n’a pas donné suite.
« Ambition d’exemplarité »
Ces deux morts n’ont officiellement endeuillé ni les chantiers du Grand Paris Express (qui doivent livrer 200 kilomètres de nouvelles lignes de métro d’ici à 2030) ni ceux des Jeux olympiques. Malgré leur importance respective, les lieux où travaillaient Jérémy Wasson et Amara Dioumassy ne sont, en effet, pas labellisés comme tels, au grand dam du père du jeune homme.
Car ces deux opérations colossales bénéficient d’un traitement spécifique concernant la sécurité des salariés. « L’enjeu, c’est d’avoir des JO exemplaires en matière de conditions de travail, pour correspondre à l’ambition d’exemplarité portée par la France pour ces Jeux », rappelle à chacune de ses conférences de presse Gaëtan Rudant, directeur de la direction régionale et interdépartementale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités d’Ile-de-France.
Les Jeux olympiques sont un projet « exceptionnel », qui requiert « excellence et exemplarité », répète également la Société de livraison des ouvrages olympiques (Solideo), chargée de la maîtrise d’ouvrage de tous les chantiers Paris 2024. Une « charte sociale » en seize points a notamment été signée par les principales organisations syndicales et patronales. Un comité consultatif se réunit une fois par trimestre pour veiller à sa mise en œuvre, réunissant collectivités, représentants des salariés et des employeurs. Il est coprésidé par l’ancien secrétaire général de la CGT Bernard Thibault et Dominique Carlac’h, du Medef.
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