Uber-Deliveroo : « La plupart des pays occidentaux cherchent à concilier le confort qu’apportent ces services avec la protection des travailleurs »
C’est une tache qui colle à l’économie numérique comme le sparadrap du capitaine Haddock. Et qui réveille le spectre de la fin du salariat. Pas pour tout le monde bien sûr, mais pour une partie de la force de travail, généralement la moins qualifiée, poussée à revenir à l’existence fragile des tâcherons du XIXe siècle, payés à la pièce et dépourvus de toute protection contre les aléas de l’existence. Avec, en première ligne, les livreurs et les chauffeurs appointés par les grandes plates-formes de services comme Uber ou Deliveroo.
Depuis l’apparition de ces plates-formes, il y a une dizaine d’années, la plupart des grands pays occidentaux tentent de trouver la formule qui concilie la liberté et le confort qu’apportent ces nouveaux services avec la protection de travailleurs souvent dans la précarité. En France, les premières modifications du code du travail datent de 2016 et le gouvernement entend d’ici à la fin de l’année ouvrir une concertation pour trancher cette question. C’est dans cette optique que le rapport du magistrat Jean-Yves Frouin a été remis au premier ministre, Jean Castex, ce mercredi 2 décembre.
Statut commun
Deux points de vue opposés s’affrontent. Celui des plates-formes, qui considèrent que les chauffeurs ou livreurs sont libres de leur temps, se connectent quand ils veulent et travaillent avec autant de concurrents qu’ils le souhaitent. Ils sont donc indépendants et méritent leur statut d’autoentrepreneur. Quitte à ce que l’employeur contracte pour eux des assurances couvrant les accidents du travail et cotise pour leur formation. De l’autre côté, des syndicats militent pour un salariat pur et simple. Ce qu’aucune plate-forme de transport ou de livraison ne se risque à faire. Leur modèle économique, déjà largement déficitaire, n’y survivrait pas.
Comme attendu, cette solution est jugée trop complexe pour les uns et insuffisante pour les autres
Le gouvernement français, comme ceux de la plupart des pays voisins, cherche une position médiane assurant à la fois développement économique, liberté et protection. Le rapport Frouin suggère une solution en apparence astucieuse, celle de passer par une société tierce, de type coopérative, qui salarierait les travailleurs. Ils toucheraient toujours un pourcentage sur leur course mais accéderaient à tous les avantages qui leur manquent – régime général de la Sécurité sociale, assurance-chômage, accès facilité au logement, etc. La crise sanitaire démontre aujourd’hui l’intérêt d’un tel statut.
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