Reconfinement : la soudaine portée symbolique des librairies

Reconfinement : la soudaine portée symbolique des librairies

La librairie Mollat à Bordeaux pratique le click and collect pour le deuxième confinement, le 30 octobre.

Analyse. Les libraires sont devenus le symbole du deuxième confinement. Ils prétendent incarner l’injustice puisque le gouvernement, en excluant le livre de la liste des biens à caractère essentiel, bafouerait le postulat de l’exception culturelle française. Un dogme sacro-saint depuis André Malraux. Déjà, l’arrêté du 14 mars 2020 n’incluait pas les librairies dans la liste des commerces indispensables.

Cette décision avait certes choqué, mais n’avait pas fait des libraires des sacrifiés sur l’autel de la culture. Emmanuel Macron lançait le 16 mars aux Français : « Lisez, retrouvez ce sens de l’essentiel. » Un appel hédoniste à la lecture, donc. « Comme si tout le monde, plongé dans l’oisiveté, allait voir ses habitants tourner négligemment des pages, se perdre dans les rayonnages de sa bibliothèque et, pourquoi pas, relire ses classiques », s’amuse Tanguy Habrand dans Le Livre au temps du confinement (Les Impressions nouvelles, 144 pages, 14 euros).

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Pourtant, Bruno Le Maire, le ministre de l’économie et des finances, avait proposé le 19 mars un déconfinement des librairies, afin qu’elles puissent fonctionner normalement et recevoir des clients. Cette main tendue avait été sèchement refusée par le Syndicat de la librairie française (SLF). Son ­président, Xavier Moni, affirmait alors que les livres ne constituaient pas une marchandise vitale et que la santé des salariés primait. A ses yeux, les conditions sanitaires n’étaient pas réunies pour assumer un tel risque. Ce rejet permettait aussi aux libraires de mettre tout leur personnel au chômage technique en profitant des aides de l’Etat, ce qui n’aurait pas été possible si une partie travaillait aux commandes et aux livraisons.

Les libraires ont changé d’avis

Seule une minorité de libraires – 400 sur les 3 300 que compte l’Hexagone – s’était alors lancée dans la livraison à domicile et le « click and collect ». Une violente querelle avait opposé dans la profession partisans et opposants à cette pratique, adoptée sans difficulté par nos voisins européens. Les ventes de livres s’étaient effondrées de 95 % par rapport à 2019 entre mi-mars et le 11 mai, jour de la réouverture des librairies, selon l’Observatoire de la librairie. Mais un plan d’aide gouvernemental de 230 millions d’euros annoncé début juin pour sauver la librairie et l’édition avait calmé les esprits.

Plus organisé, le Syndicat de la librairie française s’est assuré du soutien de toute la chaîne du livre, des éditeurs et des auteurs les plus renommés

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