« L’état d’urgence sanitaire doit pousser l’Etat à prendre des mesures qui protègent sanitairement les seniors et économiquement les jeunes »
Tribune. La gestion de la crise du Covid-19 est particulièrement difficile : comme elle est inédite, les expériences passées ne peuvent aider que très partiellement à la décision publique. Il faut décider sur la base de projections imaginées par des chercheurs, dont la crédibilité se fonde davantage sur la rigueur des modèles théoriques utilisés que sur leur pertinence empirique, aujourd’hui encore non vérifiable. Toutefois, la première vague de l’épidémie ainsi que les réponses contrastées entre les pays fournissent un petit nombre de certitudes, au milieu d’un océan de questions ouvertes.
D’abord, l’opposition entre santé et économie n’a qu’un sens limité. Lors de la première
vague, l’Allemagne a eu quatre fois moins de décès par habitant. Pour autant, elle n’a pas « payé » cette performance par une plus forte chute du produit intérieur brut (PIB) que la France (– 2 % puis – 9,7 % aux premier puis deuxième trimestres pour l’Allemagne, contre – 5,9 % puis – 13,8 % pour la France). Il est donc possible d’être efficace sur les deux tableaux en protégeant la santé sans porter de sérieuses atteintes à l’activité économique.
Par ailleurs, l’impact de l’épidémie est fortement inégalitaire, notamment sur le plan
sanitaire. Certes, des facteurs de risque, souvent des comorbidités, sont associés
à un risque accru de décès chez les patients les plus jeunes. Mais les plus de 65 ans sont les plus touchés : ils représentent 92 % des décès (50 % avaient plus de 84 ans).
Confinement inégalitaire
Les entrées en service de réanimation augmentent très clairement dès 50 ans, les risques de décès à partir de 60 ans et plus encore au-delà de 64 ans. Si les différences selon l’âge sont bien plus marquées que celles entre les territoires, pourquoi ne sont-elles pas prises en compte dans la politique de couvre-feu ?
L’impact du confinement est fortement inégalitaire sur le plan économique. Les restrictions d’activité touchent en priorité les jeunes (– 4 points pour le taux d’emploi des moins de 24 ans depuis le dernier trimestre 2019, contre « seulement » – 0,4 point pour les 50-64 ans) et, parmi eux, les moins diplômés, dont les activités sont concentrées dans certains secteurs particulièrement touchés : 25 % des salariés du secteur de l’hébergement-restauration étaient au chômage partiel au deuxième trimestre 2020, secteur où l’âge moyen des salariés est de 37 ans, contre 42 ans pour l’ensemble des salariés français.
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