« Nous nous opposons avec vigueur à toute idée d’une directive européenne sur les salaires minimums »
Tribune. Depuis quelques années, la France s’est lancée dans un vaste programme de réforme, en particulier sur le marché du travail. C’est un projet ambitieux dont l’un des objectifs est de rendre les relations entre les partenaires sociaux plus fortes mais aussi plus flexibles, dans le but de renforcer la compétitivité et la capacité d’adaptation au changement du pays. Le président Emmanuel Macron a cité les pays scandinaves en exemple.
En tant que représentants des organisations syndicales et patronales du secteur privé en Suède, nous sommes surpris et très préoccupés par le fait que la France ne s’oppose pas au projet de la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen de présenter une proposition juridiquement contraignante portant sur les salaires minimums dans l’Union européenne (UE). Cette proposition devrait être rendue publique le 28 octobre.
L’intention de la Commission est bonne. En Suède, les organisations syndicales et patronales collaborent depuis longtemps pour faire évoluer et améliorer les conditions des travailleurs et des entreprises. Il reste naturellement encore beaucoup à faire, mais notre modèle a fait ses preuves.
Ce n’est pas l’ambition, mais la méthode choisie par la Commission qui nous préoccupe. Les employeurs, les syndicats et les gouvernements des pays scandinaves membres de l’UE sont tous d’accord sur ce point : une directive européenne, instrument juridiquement contraignant pour les Etats membres, est une voie très mal choisie.
Innovation et cohésion sociale
En 2017, la France et la Suède ont conclu un partenariat stratégique pour l’innovation, où figurent des objectifs de prospérité durable, de création d’emplois et de cohésion sociale. Ce partenariat s’étend aussi au développement de stratégies communes au niveau de l’UE. Sur la base de ce partenariat, il serait étrange que la France agisse à l’opposé du point de vue du gouvernement suédois en ce qui concerne les salaires minimums ; une question qui joue un rôle très important quant à la capacité d’innovation, à la création d’emplois et à la cohésion sociale.
En 2019, Emmanuel Macron et Ursula von der Leyen ont annoncé dans une déclaration commune que l’UE devait aller vers l’articulation de salaires minimums. Selon eux, ces salaires devaient être « fixés chacun selon ses règles » dans les vingt-sept Etats membres. Ceux qui connaissent le modèle du marché du travail dans les pays nordiques comprennent que cette condition exclut automatiquement une directive. Pour respecter l’ambition déclarée du président Macron – renforcer le dialogue entre syndicats et patronat –, les partenaires sociaux doivent disposer d’une grande autonomie.
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