Jacques Barthélémy : « Face à une récession, les entreprises peuvent utiliser trois stratégies »

Tribune. Comme vient de le révéler une étude de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), les deux mois de confinement en France se sont traduits par une perte de cinq points de produit intérieur brut (PIB). Une récession majeure s’annonce. Quelle stratégie les entreprises devront-elles adopter pour y faire face ?
En temps de crise, le premier réflexe des dirigeants est de réduire les effectifs. Comme le suggère l’exemple du transport aérien après les attentats du 11 septembre 2001, cette démarche est souvent contre-productive. Les attentats ont eu un impact dévastateur sur les compagnies aériennes américaines.
Quatre ans après, seules deux d’entre elles étaient revenues à un niveau de capitalisation boursière équivalent à celui de septembre 2001 (Southwest et Alaska). Alors que la plupart de leurs concurrents avaient licencié près du quart de leurs effectifs, celles-là n’avaient pas licencié un seul employé. D’après Herb Kelleher, le fondateur de Southwest : « Il n’y a rien de pire que les licenciements pour détruire la culture d’une entreprise… »
Les recherches sur les stratégies à adopter en temps de crise sont rares. L’une des plus intéressantes, quoique ancienne, porte sur près de 5 000 entreprises américaines du début des années 1980 au début des années 2000 (Ranjay Gulati, Nitin Nohria et Franz Wohlgezogen, « Roaring out of Recession », Harvard Business Review n° 88/3, 2010). Les résultats sont assez déprimants. Lors des différentes périodes de récession, 17 % des entreprises ont fait faillite. Parmi celles qui ont survécu, 80 % en sont sorties affaiblies, 11 % ont retrouvé leur niveau de performance pré-récession et 9 % en sont sorties plus fortes qu’avant.
Neuf combinaisons
Face à une récession, les entreprises peuvent utiliser trois stratégies. La stratégie défensive consiste à réduire les coûts et à geler les investissements. Comme on l’a vu avec l’exemple du transport aérien, elle est courante mais peu efficace. Les entreprises qui la mettent en œuvre ont seulement 21 % de chances, selon cette étude, de sortir d’une récession plus fortes qu’avant. L’explication : cette stratégie démobilise aussi le personnel qui a eu le privilège de ne pas être licencié. Elle détruit également une grande partie des ressources et compétences de l’entreprise. Lorsque la croissance est de retour, l’entreprise est affaiblie et ne parvient pas à « redémarrer ».
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