Etre délégué en période de distanciation sociale

Droit social. En cette période de distanciation sociale obligée, comment les représentants du personnel peuvent-ils prendre contact avec des salariés pour accomplir leur mission ? Si l’ordonnance du 1er avril 2020 s’est légitimement occupée du fonctionnement du comité social et économique (CSE) – visioconférence, messagerie instantanée –, rien de tel concernant les délégués.
Un bon dialogue social sous forme d’intelligence collective étant essentiel en ces temps de déconfinement, comment concilier les règles impératives d’urgence sanitaire avec la liberté de circulation, dont bénéficie tout représentant du personnel ?
Hier, l’ouvrier ou la vendeuse quittaient leur poste pour aller discuter avec des salariés sur leur temps et leur lieu de travail. Aujourd’hui, entre la banalisation du télétravail et le chômage partiel, c’est moins évident.
Il n’existe pour autant aucun « vide juridique ». Trois exemples. Pour le membre du CSE quittant hier son poste pour aller dans les bureaux prendre contact avec ses camarades, rien de nouveau. Entre éclatement des sites et collaborateurs nomades, bien avant la pandémie, la « liberté de circulation » de nombre de délégués s’exerçait déjà grâce aux autoroutes de l’information.
Alors le délégué télétravailleur prendra ses « heures de délégation » sur son temps de travail, échangeant de chez lui par téléphone ou messagerie instantanée. Il pourra même dépasser son quota d’heures mensuel, car cette pandémie constitue une « circonstance exceptionnelle ».
Le deuxième exemple expose la question du principe de « libre circulation » (physique) en période d’urgence sanitaire. Réponse avec l’ordonnance du tribunal judiciaire de Saint-Etienne (Loire) du 27 avril 2020, saisi par un délégué syndical CGT en télétravail s’étant vu interdire tout accès à une usine en chômage partiel.
Le code du travail doit s’adapter
Le juge rappelle d’abord l’obligation générale du strict respect des règles sanitaires : « La limitation de la liberté de circulation des représentants doit s’apprécier dans le cadre de l’ordre juridique exceptionnel et provisoire résultant de l’état d’urgence sanitaire limitant de façon générale la liberté de circulation. »
Le droit étant devenu la science de la conciliation, conséquence classique : les restrictions patronales « à cette liberté fondamentale étaient-elles proportionnées » ? En l’espèce non, car la communication syndicale sur la messagerie de l’entreprise était interdite (en l’absence d’accord collectif, la loi autorise seulement le syndicat à disposer d’un panneau sur l’intranet).
Il vous reste 28.72% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.