« Bâtissons une protection sociale pour tous les auto-entrepreneurs »

« Bâtissons une protection sociale pour tous les auto-entrepreneurs »

« Dans cet arrêt, c’est la connexion à la plate-forme numérique Uber, et donc à l’algorithme, qui crée le lien de subordination entre le chauffeur et la société » (Blocage du périphérique parisien à l’appel des VTC, en janvier 2019).
« Dans cet arrêt, c’est la connexion à la plate-forme numérique Uber, et donc à l’algorithme, qui crée le lien de subordination entre le chauffeur et la société » (Blocage du périphérique parisien à l’appel des VTC, en janvier 2019). Alexis Sciard / IP3 PRESS/MAXPPP

Tribune. La Cour de cassation a requalifié le 4 mars en contrat de travail la relation contractuelle entre la société Uber et un chauffeur aux motifs qu’il n’avait pas la possibilité de se constituer sa propre clientèle, ni la liberté de fixer ses tarifs, ni celle de définir les conditions d’exécution de sa prestation de service.

Partout dans le monde, les plates-formes sont mises à mal par les recours qui fleurissent en Europe et aux Etats-Unis, visant à requalifier tous les chauffeurs VTC (véhicules de tourisme avec chauffeurs) en salariés. Pourtant, souhaitons-nous collectivement que les plates-formes de VTC et de livraison ferment leurs portes, nous qui les avons intégrées à notre quotidien, en recourant massivement à la livraison à domicile ou aux transports avec chauffeurs ? Et les travailleurs de ces plates-formes, la plupart chauffeurs et livreurs, le souhaitent-ils aussi, eux qui nous disent qu’ils sont avant tout attachés à leur indépendance ?

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Après l’arrêt contre Uber, il faut « construire un nouveau droit social »

Et si la décision de la Cour de cassation provoquait un électrochoc, en nous faisant enfin réaliser qu’elle fait courir le risque de porter un coût d’arrêt aux plates-formes et à l’économie collaborative, mais aussi à leurs travailleurs devenus salariés, en renchérissant le coût du service de façon insupportable pour le client ?

Dans cet arrêt, c’est la connexion à la plate-forme numérique Uber, et donc à l’algorithme, qui crée le lien de subordination entre le chauffeur et la société, faisant pour la première fois rentrer dans les critères de requalification un élément objectif, l’algorithme, et non plus des pratiques individuelles d’entreprises.

Une intermédiation difficilement contrôlable

L’évolution des plates-formes et de leurs algorithmes a transformé le B2B (« business to business ») en B2B2C (« business to business to consumers »), créant une intermédiation difficilement contrôlable. La loi d’orientation des mobilités de 2019 a tenté d’y apporter des solutions mais, on l’a vu, de façon contestable, avec la tentative de mise en place de chartes censées offrir aux travailleurs des plates-formes des garanties en matière de conditions de travail et de protection sociale.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Uber : pour les chauffeurs, l’arrêt de la Cour de cassation « clôt le débat juridique » sur leur statut

Finalement, tout cela s’est vu justement sanctionné par le Conseil constitutionnel. Plus récemment, les annonces de regroupement de certaines plates-formes n’ont pas plus convaincu, car elles n’apportent pas de gages de leur capacité à répondre aux problèmes sociaux de leurs travailleurs. Car pour éviter les situations de requalification, l’objectif n’est pas de protéger les plates-formes, mais bien ceux qui y travaillent !

Avatar
LJD

Les commentaires sont fermés.