« La culture masculine de la tech est aussi un frein à l’embauche… des hommes »
Tribune. Selon le cabinet de recrutement Urban Linker, 84 % des salariés de la tech sont des hommes. Et pourtant. Nos recherches menées dans le secteur de l’intelligence artificielle montrent que les offres d’emploi qui mettent en avant des caractéristiques « féminines » de l’entreprise, emportent aujourd’hui beaucoup plus l’adhésion des candidats, que les offres émises par des sociétés qui promeuvent des valeurs plus « masculines ».
Nous avons demandé à de jeunes chercheurs d’emploi, hommes et femmes, de ce secteur d’activité particulièrement dynamique, de repérer, dans des annonces de postes publiées sur Linkedn, les éléments de vocabulaire qu’ils estimaient attractifs et ceux qui les rebutaient.
Ils ont affirmé que des mots considérés comme masculins, tels que « efficace », « puissant », « excellent », « concurrentiel », « contrôle », leur donnaient une impression de climat organisationnel froid, stressant, ne donnant pas le droit à l’erreur. Ce dernier point étant particulièrement sensible pour les femmes, globalement moins confiantes dans leurs capacités techniques.
Des repoussoirs
Les chercheurs d’emploi se voyaient mal travailler et avancer dans de tels climats masculins. Ils étaient plus attirés en revanche par des termes qu’ils jugeaient davantage associés à un univers féminin comme « empathie », « créatif », « collaboratif », « expression »…
Nous avons réitéré ce type d’expérience avec des hommes et des femmes de différentes classes d’âge, en leur proposant des annonces dans lesquelles nous changions volontairement certains termes. Avec à chaque fois des résultats similaires. Les climats chaleureux, soutenants, féminins, sont nettement plus appréciés dans ce secteur que les climats masculins mettant davantage l’accent sur la compétition.
Notre étude, menée avec plus de cinq cents participants, montre que l’intention de postuler à une annonce dans le high-tech augmente de 60 % lorsque les candidats ressentent, à travers l’offre d’emploi, que l’entreprise a une culture « féminine ». En revanche, si le vocabulaire employé leur fait percevoir une culture « masculine », la probabilité qu’ils postulent diminue de 30 %.
Dans un contexte de recrutement très tendu, ces résultats interpellent. Les valeurs traditionnellement masculines prônées dans l’industrie semblent en réalité des repoussoirs pour le secteur de la tech, et singulièrement de l’intelligence artificielle.