Dans la tourmente des contrats courts

Dans la tourmente des contrats courts

Des serveurs receptionnent les plats à servir à l'occasion d'une réception d'un grand restaurant

En 2017, 1,2 million de salariés occupaient, un contrat de moins de trois mois, en France d’après l’Insee. Le phénomène, avec ses effets sociaux et financiers, angoisse le gouvernement, qui  doit découvrir, prochainement, le contenu de sa réforme.

Il sait ce que le mot instabilité veut dire. Durant plusieurs années, jusqu’à la fin 2011, Bachir, qui affirme sous un prénom d’emprunt, fut employé comme maître d’hôtel par Lenôtre, l’un des traiteurs français les plus illustres. On faisait appel à lui pour des « extras » – de courtes périodes d’activité, parfois de quelques heures uniquement, sur une journée. Puis le rapport s’est éteint, dans un climat conflictuel. Actuellement âgé de 68 ans, Bachir a fait valoir ses droits à la retraite, tout en continuant à travailler, en tant que serveur dans un grand hôtel de l’hypercentre de Paris. Là encore, il exerce son métier dans le déséquilibre, en qualité d’intérimaire.

« Je fais six à sept jours dans le mois », déclare-t-il. Ça lui admet de terminer sa « petite pension » et de pourvoir aux besoins du foyer : ses deux filles sont encore à la maison, il a un emprunt sur le dos… Etre intérimaire implique de se mettre « à la disposition » de l’entreprise, rapporte Bachir : « “Ils” n’aiment pas qu’on refuse les missions. Si c’est le cas, ils vous oublient pendant une ou deux semaines et vous restez sur le carreau. » Pénible, dans ce contexte, « de prévoir quelque chose », de « mener une vie normale ». Des organisations sont certes distribués, « à l’avance », mais « parfois, ils rajoutent des jours où ils en retirent ».

Chaque année, ils sont des centaines de milliers à viser des contrats courts – c’est-à-dire d’un mois ou moins, selon la définition la plus courante. Cette forme d’emploi a été propagée par 2,5 entre 2000 et 2016. En 2017, 1,2 million de personnes – soit 5,1 % de la population salariée – occupaient un contrat court, d’après l’Insee, qui détient d’autres critères pour le caractériser (il dure moins de trois mois et prend en compte l’intérim).

Les enjeux sont de même d’ordre financier

L’ascension du phénomène préoccupe le gouvernement. Pour des raisons sociales, tout d’abord : « Les salariés concernés profitent moins que d’autres de formations qualifiantes, alors qu’ils sont moins qualifiés et plus éloignés du marché du travail, explique Gilbert Cette, professeur associé à l’université d’Aix-Marseille. De surcroît, ils ont plus de pénuries à avoir les prêts bancaires et aux logements locatifs. » Les enjeux sont de même d’ordre financier. Les personnes habituelles aux contrats courts passent régulièrement par la case assurance-chômage, ce qui a un coût : un peu moins de 2,9 milliards d’euros par an, en tenant compte des irréguliers du spectacle et des missions d’intérim de moins d’un mois, selon l’Unédic.

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LJD

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