La gérance de l’ère digitale par les responsables
L’essai « Mutation numérique et responsabilité humaine », codirigé par les philosophes Valérie Julien Grésin et Yves Michaud, appelle à réfléchir sur notre façon de vivre et de contribuer aux équilibres nécessaires pour gérer avec humanisme et pragmatisme les impacts de la révolution numérique.
Le évolution en cours du seul domaine de l’IA pourrait engendrer une croissance mondiale de 14 % d’ici à 2030, représentant la plus forte opportunité de développement commercial de l’économie actuelle, révèle une étude du cabinet PwC. En même temps, un rapport du CNRS sur le grand gâchis énergétique du numérique rappelle que l’ensemble des technologies numériques que nous utilisons représentent près de 10 % de la consommation mondiale d’énergie.
Et les outils numériques, souvent sous-utilisés, sont fabriqués avec des matériaux aux conditions d’extraction très inégales. Leur recyclage est difficile et limité. Médiateur du meilleur comme du pire, l’essor des technologies numériques questionne nos équilibres planétaires et l’évolution de notre propre manière de vivre. Les dirigeants d’entreprise devront de plus en plus fréquemment répondre de ses conséquences. Codirigé par Valérie Julien Grésin, docteure en philosophie et dirigeante du cabinet ASM Conseils, et le philosophe Yves Michaud, Mutation numérique et responsabilité humaine des dirigeants appel à réfléchir sur la manière de contribuer aux équilibres nécessaires pour gérer avec humanisme et pragmatisme les impacts de la révolution numérique.
En plus de ses effets sur la consommation énergétique, les inégalités sociales, l’ordre politique et économique mondial, la mutation numérique influence aussi la capacité de pensée : nous avons de plus en plus d’accès à une information toujours plus abondante, avec de moins en moins de possibilités d’en garder la mémoire. Nous avons l’impression d’être de plus en plus libres de nous exprimer, alors que tout ce qui aura été dit pourra éventuellement un jour se retourner contre nous…
Pour optimistes vigilants
L’ouvrage ne regrette pas du tout un irénique âge d’or de rapport sans risque de l’homme aux outils qu’il crée. Il a plutôt été conçu « pour des optimistes vigilants pour qui le pire n’est jamais sûr tant que la lucidité et la bonne volonté animées d’un amour de l’humanité prévalent sur les enjeux de domination de toutes sortes », déclare les auteurs.
Le numérique est aperçu sous l’angle d’une mutation dont nous pourrions encore orienter le cours pour en mesurer et limiter les risques : le livre propose au lecteur quelques repères pour éclairer les décisions, « en particulier de ceux qui conçoivent, financent, produisent, gèrent ces technologies, au premier rang d’entre eux, les décideurs du monde économique mais aussi chacun des laborieux que nous sommes, chacun des épargnants contributeurs à l’activité économique, nous tous dont la responsabilité est devenue sociétale, compte tenu de la perméabilité entre économique et politique ».