« Les recruteurs se trouvent dans la situation inconfortable de devoir concilier l’obligation de ne pas discriminer avec celle de promouvoir la diversité »
Une douzaine de dirigeants de grandes entreprises se sont récemment engagés à promouvoir des femmes aux postes de pouvoir, dans une tribune au journal Les Echos. A juste titre, ils ont souligné la nécessité d’améliorer la mixité et la diversité de genre à tous les échelons des organisations, et donc aussi à leur tête, tout en pointant le chemin qu’il reste à parcourir.
La prise de conscience est collective. Elle a notamment permis, en 2021, le vote de la loi visant à accélérer l’égalité professionnelle et l’autonomie économique des femmes, dite « loi Rixain », qui impose des quotas de femmes dans les instances de gouvernance des grandes entreprises à l’horizon 2030. Cette législation part du constat que les femmes sont sous-représentées dans les postes de direction et de gouvernance.
En instaurant des quotas, elle a pour objectifs de corriger ce déséquilibre et de promouvoir une diversité de genre au sein des conseils d’administration. Les entreprises de plus de 1 000 salariés devront compter au moins 30 % de femmes cadres dirigeantes et membres d’instances dirigeantes à partir du 1er mars 2026, puis 40 % au 1er mars 2029. A défaut, elles risqueront une pénalité financière pouvant aller jusqu’à 1 % de leur masse salariale, à compter du 1er mars 2031.
Ce mouvement sociétal s’observe notamment dans les processus de recrutement, lors desquels des dirigeants demandent expressément à leurs partenaires (cabinets de recrutement ou de chasse de têtes) d’identifier des profils uniquement féminins. Mais les acteurs du recrutement se heurtent alors à un obstacle, et de taille : la loi ! L’article L. 1132-1 du code du travail interdit en effet toute discrimination à l’embauche, y compris les discriminations dites « positives ».
Faire cohabiter deux lois opposées
Concrètement, le sexe, le genre ne peuvent être retenus pour écarter un homme d’une procédure de recrutement. Le risque est pénal. Les acteurs du recrutement qui accompagnent les entreprises ont le devoir de le rappeler, si besoin, à leur client, en adoptant résolument – et malgré les pressions parfois insistantes – une position de conseil conforme à la législation en vigueur.
Ne sommes-nous pas, dans ce cas, face à une injonction paradoxale ? Comment favoriser une plus grande mixité, une meilleure égalité femmes-hommes, sans tenir compte du sexe ? Et, sur tous les sujets de diversité, comment bâtir des entreprises plus inclusives, en passant sous silence les critères qui fondent cette diversité ? Les entreprises ne se retrouvent-elles pas dans une situation inconfortable où elles doivent concilier l’obligation de ne pas discriminer avec celle de promouvoir activement la diversité ?
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