« C’est un métier ! » : Leur profession étant souvent associée au risque de chute, les couvreurs veulent changer d’image
Régulièrement, depuis vingt ans, Michel Bianco prend des photos des travailleurs sur les toits de sa région : « On voit les couvreurs se balader sans aucune protection, ce sont souvent des précaires qu’on a fait monter pour remplacer des tuiles, en quelques heures. Il n’y a pas de nacelle, l’échafaudage n’est pas aux normes. » Le 2 août 2006, son fils Jérôme, qui installait une baie vitrée sur un immeuble, a chuté mortellement d’un échafaudage, et l’entreprise a été condamnée. « Les couvreurs sont le symbole d’une culture où l’on a conscience du risque, mais où l’on grimpe sans harnais ni ligne de vie, comme si c’était anodin. »
Entre 17 % et 19 % des 738 salariés du secteur privé morts au travail en 2022 ont pour origine une chute de hauteur. Le métier de couvreur en est régulièrement le symbole : sa mission principale consiste à réaliser, réparer et entretenir les toits des constructions. Il pose des couvertures étanches et isolantes, installe les systèmes d’évacuation des eaux de pluie, parfois des fenêtres de toit voire des panneaux solaires. « 43 % des accidents graves et mortels de couvreurs sont dus aux chutes de hauteur », explique Sébastien Terrier, responsable d’opération à la direction technique de l’Organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics (OPPBTP), qui a publié en septembre une étude sur les conditions de travail des couvreurs.
L’accident type survient souvent sur un chantier géré par une petite entreprise, qui fait de la rénovation pour des particuliers, à la suite d’un problème d’échafaudage inadapté ou à cause d’une toiture en matériau fragile. Exposés aux aléas climatiques, sur des toits à chaque fois uniques, les risques sont démultipliés. Les obligations de sécurité aussi, et le nombre d’accidents pour mille salariés a été presque divisé par deux entre 2016 et 2021, mais les petites entreprises – plus de 90 % des employeurs en couverture – manquent souvent de temps et d’argent.
Bonnes pratiques
« Quand il y a un confort de travail, on gagne de l’argent, met pourtant en avant Cyril Guy, chef d’entreprise en Dordogne. Mais le client ne voit pas toujours l’intérêt de mettre en sécurité les couvreurs. » « Les chantiers de couverture sont courts. Certains patrons expliquent que mettre des filets de sécurité prend deux jours, pour une intervention d’une heure, confirme Frédéric Mau, président de l’OPPBTP et secrétaire général de la CGT-Construction, bois et ameublement. Tant que la maîtrise d’ouvrage ne sera pas impliquée dans les suites judiciaires en cas de drame, on n’y arrivera pas. »
Il vous reste 54.8% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.