A la SNCF, climat social tendu et menace de grèves
Il n’aura fallu que quelques semaines à Philippe Bru, nommé DRH de la SNCF le 1er octobre, pour se faire un surnom. Depuis la table ronde du 8 novembre au cours de laquelle il a discuté des salaires pour 2024, il a été rebaptisé Philippe « Brut » ou « Brute ». Le jeu de mots est facile, mais révèle un changement de style par rapport à son prédécesseur, François Nogué, en fonction pendant vingt ans.
Pour sa première négociation annuelle obligatoire (NAO) des salaires, portant sur les augmentations pour 2024, il a montré qu’il ne s’en laissait pas conter, pas même par la CGT, que son prédécesseur ménageait. « Pendant la réunion, il s’est “embrouillé” avec Thierry Nier, le successeur de Laurent Brun à la CGT-Cheminots », raconte un participant. C’était quelques jours avant le congrès de cette fédération, à Tours du 14 au 17 novembre, au cours duquel Laurent Brun, devenu administrateur de la confédération dans l’équipe de Sophie Binet, a passé la main à son numéro deux.
Le nouveau DRH et le PDG du groupe, Jean-Pierre Farandou, auraient commis une deuxième maladresse aux yeux des syndicats, en écrivant dans une lettre aux salariés : « Sur trois ans, entre 2022 et 2024, les cheminotes et les cheminots auront bénéficié d’une augmentation inédite de leur rémunération de 17 % en moyenne et jusqu’à 21 % pour les premiers niveaux de salaires, alors que l’inflation cumulée sur la même période est projetée à 13,2 %. »
Les chiffres ne sont pas faux et sont calculés sans la prime de partage de la valeur de 400 euros, qui sera versée en fin d’année. Mais « ces moyennes intègrent tout : les mesures d’ancienneté, les mesures individuelles, et ne correspondent pas du tout au ressenti », prévient Olivier Armand, porte-parole de l’UNSA-Ferroviaire, le deuxième syndicat. Il craint qu’elles n’alimentent « le “cheminot bashing” », la critique systématique des cheminots, en occultant les huit années de gel des salaires avant 2022, et surtout « la productivité sur les effectifs massivement entreprise depuis 2018 ».
Accusé de « faire du chantage »
Enfin, les syndicats reprochent au nouveau DRH de « faire du chantage », car Philippe Bru a prévenu, fermement, que la proposition ne s’appliquerait pas si elle n’était pas signée par un accord majoritaire, donc au moins par deux organisations. Pour lui, la discussion doit payer plus que le conflit. En 2022, il n’y avait pas eu d’accord, seule la CFDT ayant signé, mais la direction avait tout de même accordé une hausse moyenne de 6 % des salaires.
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