L’intelligence artificielle, cet « ogre numérique » qui angoisse les travailleurs

L’intelligence artificielle, cet « ogre numérique » qui angoisse les travailleurs

Le jour où elle a découvert les images que le générateur Midjourney était capable de produire en s’appuyant sur l’intelligence artificielle (AI), Catherine est restée « bouche bée ». Une question est rapidement venue à l’esprit de la graphiste parisienne : « Comment arriver, encore, à exister ? » Face à ces créations de qualité, produites instantanément et quasi gratuitement, elle s’est sentie « dépossédée de [son] expertise. Sur un plan psychologique, c’est dévastateur, on perd confiance en soi ». Elle se dit « pessimiste pour l’avenir de [son] métier ».

Le sentiment d’« angoisse » ressenti par Catherine est le même que celui qui bouscule aujourd’hui Chloé, une chargée de communication, qui pense que son travail n’aura, d’ici à quelques années, « plus de valeur ». Ou celui qui amène Pierre, comptable, à réfléchir à une reconversion professionnelle. L’intelligence artificielle sera-t-elle cet « ogre numérique », comme la surnomme Chloé, qui absorbera les emplois dans certains secteurs d’activité ? La question reste aujourd’hui en suspens, tant les projections sur le sujet s’avèrent délicates. Nombre d’organisations reconnaissent d’ailleurs qu’en la matière, le flou domine, depuis des mois maintenant.

« L’impact direct de l’IA sur nos métiers demeure à ce jour énigmatique », résume Valérie Decaux, DRH du groupe La Poste. Les entreprises françaises en sont aujourd’hui essentiellement au stade de l’expérimentation. Et l’usage d’outils d’IA générative pour créer des contenus (ordre du jour d’une réunion…), s’il a rapidement progressé, reste encore peu structuré.

Impression de déclassement

Pour autant, le recours à des solutions basées sur l’IA (et plus généralement à des outils d’automatisation des tâches) trouble une part non négligeable des collaborateurs. Aux côtés des curieux, voire des enthousiastes, « un grand nombre de travailleurs (trois sur cinq) s’inquiètent de perdre leur emploi du fait de l’IA au cours des dix prochaines années, en particulier ceux qui travaillent déjà avec [elle] », selon une étude de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) parue en juillet 2023 et centrée sur les secteurs de la finance et de l’industrie manufacturière.

Qu’il s’agisse d’une vision réaliste ou fantasmée, la peur d’être remplacé par la machine est là. Mais elle n’est pas la seule. De fait, l’arrivée des outils d’automatisation peut activer différents mécanismes psychiques chez les collaborateurs concernés. C’est le cas par exemple dans l’industrie, où des systèmes d’IA sont testés pour automatiser le contrôle de la qualité des pièces produites. Des solutions que les salariés jusqu’alors chargés de cette mission voient souvent arriver avec crainte.

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LJD

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