La réforme des retraites à hauteur de PME : « On en parle dans l’usine, et parfois ça monte en température »

La réforme des retraites à hauteur de PME : « On en parle dans l’usine, et parfois ça monte en température »

Au sein de l’usine Bioseptyl, à Beauvais, le 13 juin 2017.

Dans le bassin d’emploi de Beauvais (Oise), La Brosserie française ne fait pas jeu égal avec le mastodonte Massey-Ferguson, qui étale ses tracteurs à perte de vue sur des parkings le long de la voie ferrée. Peu importe : la PME installée derrière la gare s’enorgueillit d’un autre titre de gloire, celui de produire chaque année huit millions de brosses à dents. Son ancien directeur industriel, Olivier Remoissonnet, 52 ans, a repris la société en 2012 alors qu’elle courait à la liquidation, fragilisée par la concurrence chinoise. Il a relancé l’activité grâce à l’expertise des salariés, au « made in France » et aux produits écoresponsables.

Chacun se fait l’écho des interrogations entendues ces dernières semaines dans le débat parlementaire et dans la rue

Les affaires vont bien – 6 millions d’euros de chiffre d’affaires aujourd’hui contre 3 millions en 2012 –, mais beaucoup, parmi les trente-quatre employés, voient d’un œil suspicieux la réforme des retraites qui pourrait chambouler leur carrière. Des ouvrières trimant sur les empoileuses – ces machines qui plantent à la vitesse de l’éclair de petits bouquets de fils de nylon dans la tête des brosses à dents – jusqu’au patron, chacun se fait l’écho des interrogations entendues ces dernières semaines dans le débat parlementaire et dans la rue : la réforme est-elle nécessaire ? Juste ? Bien pensée ? En un mot : opportune ?

« On en parle et parfois ça monte en température », s’amuse Julien, 36 ans (il ne souhaite pas donner son nom de famille), chargé de veiller à la maintenance et au réglage des machines. Le décalage de 62 ans à 64 ans de l’âge légal de départ à la retraite, associé à l’accélération de la hausse de la durée de cotisation, dégage ici un parfum d’injustice. D’abord parce que sur la chaîne, le travail est usant. Blouse blanche de rigueur et charlotte sur les cheveux, Sylvie Garçon fait le compte : « Bruit, gestes répétitifs, horaires décalés, posture debout. »

Horaires du soir et du matin d’une semaine à l’autre

Cette ouvrière de 59 ans, entrée à La Brosserie à 17 ans, touche 1 650 euros net sur treize mois. Elle alterne horaires du soir et du matin d’une semaine à l’autre. Ces derniers temps, l’embauche a été provisoirement avancée d’une heure, à 5 heures, ce qui permet de fermer l’atelier le vendredi après-midi afin de réaliser des économies d’énergie tout en préservant la productivité. Mais il faut quitter le lit au milieu de la nuit et « c’est dur ».

Sylvie Garçon doute que la réforme sauve le système de retraites

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LJD

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