« Un nouvel agencement de notre société du travail est d’ores et déjà à l’œuvre »

« Un nouvel agencement de notre société du travail est d’ores et déjà à l’œuvre »

Tribune. Un nouvel agencement de la société du travail est à l’œuvre sans qu’aucune réflexion ne soit menée sur ce que nous souhaitons collectivement. Le débat de la campagne présidentielle, cristallisé autour de l’âge de départ à la retraite, témoigne de notre incapacité à repenser notre système, alors que l’urgence est à la réinvention d’un pacte social pour répondre aux évolutions de notre société.

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Dans le monde du travail, l’attention est en effet occupée par le phénomène des plates-formes ou, plus largement, par l’engouement pour l’activité entrepreneuriale et ses « start-uppeurs ». C’est pourtant dans l’univers salarié que tout change. Ne nous y trompons pas : entre la lassitude du lien de subordination, la crise sanitaire et l’efficacité des technologies de communication, l’évolution de la relation salariale et de ses modes d’expression doit être au centre des réflexions, bien plus que le statut juridique des travailleurs de plates-formes, qui n’est qu’un révélateur de perturbations dans une société du travail conçue pour le contrat à durée indéterminée (CDI).

Le CDI reste aujourd’hui la forme normale du travail. Il constitue la pierre angulaire des politiques de l’emploi, en garantissant aux salariés reconnaissance sociale et avantages réservés, tels que l’accès au crédit et au logement. Le CDI a été conçu comme la promesse et la condition d’une vie stable. Cependant, si aujourd’hui la France compte encore près de 80 % de salariés, ils ne sont plus tous titulaires d’un CDI à temps plein et le recours à des formes de contrats de travail atypiques s’est très largement développé.

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Depuis le début du siècle, les réformes du droit du travail ont évolué vers plus de flexibilisation pour répondre à la mondialisation et à la financiarisation de l’économie. Nous sommes alors peu à peu entrés dans une ère d’instabilité, dans laquelle s’impose l’injonction de l’adaptation permanente : le rapport au temps ne s’inscrit plus dans la stabilité. Cette rupture, en germe depuis de nombreuses années, s’est pleinement consommée avec l’essor du télétravail contraint.

Le carburant du siècle

La révolution technologique, les aspirations émancipatrices de l’individu et l’évolution du rôle de l’entreprise dans la société ont également très largement rebattu les cartes : l’individu s’interroge sur son propre rapport au travail et cherche à maîtriser son destin sans abdiquer la plénitude de ses droits en tant que personne et non plus en tant que simple travailleur. La crise résultant du Covid-19 a pesé sur le moral des citoyens et conduit au constat inquiétant d’« une société fatiguée » (rapport CFDT-Fondation Jean Jaurès du 26 novembre 2021). Ce changement de paradigme nous impose plus que jamais de repenser, collectivement, ce que travailler veut dire.

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