Archive dans 2024

Le télétravail est de plus en plus porté par les femmes, qui en veulent toujours plus

Le télétravail est de plus en plus porté par les cadres (61 % contre 45 % en 2021) et par les femmes (51 % contre 43 % en 2019). C’est ce que révèlent, mardi 5 novembre, deux études de la direction de l’animation, de la recherche, des études et des statistiques (Dares) du ministère du travail qui se sont penchées sur l’évolution de ce mode d’organisation du travail.

La part de ceux qui travaillent à distance, après s’être envolée pendant la pandémie, a régulièrement diminué ensuite, jusqu’à représenter un salarié sur quatre (26 %) en 2023, et un peu plus d’un actif sur trois, selon Eurostat. Ils étaient 6,1 millions de salariés à télétravailler en 2023.

Les télétravailleurs sont en fait majoritairement des télétravailleuses, que ce soit un jour par semaine (52 % de femmes) ou deux jours (53 % de femmes), mais pas au-delà (47 % de femmes contre 53 % d’hommes).

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Les conditions du télétravail se sont améliorées au point que les télétravailleurs ont globalement un meilleur environnement de travail que les non-télétravailleurs, qu’on parle d’autonomie, de reconnaissance ou d’exigences émotionnelles. « Les télétravailleurs déclarent moins fréquemment être sous pression, ils disent avoir plus d’autonomie », illustre le statisticien Mikael Beatriz, qui précise, concernant la charge mentale, que les femmes font tout autant de tâches domestiques qu’elles soient en télétravail ou pas. « Les écarts hommes-femmes de charge mentale liée au travail domestique sont ainsi accrus en cas de télétravail », analyse la Dares.

L’écart avec les hommes s’est accentué

Les télétravailleurs déplorent moins souvent (14 % en 2023) qu’auparavant (22 % en 2021), et moins souvent que les autres salariés (26 % en 2023), l’insuffisance de moyens pour travailler. Sauf les femmes qui « signalent un peu plus souvent [que leurs homologues masculins] des moyens insuffisants ou inadaptés », remarque la Dares.

Ce qui ne les empêche pourtant pas d’être proportionnellement plus nombreuses à souhaiter télétravailler davantage. En deux ans, l’écart avec les hommes s’est même accentué sur ce sujet. Ensemble, en 2023, plus d’un million de salariés souhaitaient télétravailler davantage, souligne la direction de l’animation, de la recherche, des études et des statistiques. « Le décalage est plutôt linéaire, le souhait exprimé est un jour de plus par rapport à l’existant », précise Louis-Alexandre Erb, chargé d’études sur les conditions de travail et la santé à la Dares. En 2023, la moitié des télétravailleurs pratiquaient un jour par semaine ou quelques jours ou demi-journées par mois. Les autres plutôt deux jours, voire trois ou plus (5 % des salariés).

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La directive européenne mise sur la transparence des rémunérations pour réduire les inégalités femmes-hommes

« Dans l’Union européenne, les femmes gagnent en moyenne 13 % de moins que leurs homologues masculins », à travail égal. L’écart de rémunération « a stagné au cours de la dernière décennie », et cette inégalité « expose davantage les femmes à la pauvreté » et pénalise leur retraite, « inférieure de 30 % à celle des hommes en 2018 ». Fort de ce constat, le Conseil de l’Europe ambitionne avec la directive du 10 mai 2023 de réduire les inégalités de rémunération aussi bien dans le secteur privé que dans le public, en amorçant son recadrage dès l’embauche.

Cette loi, transposable en droit français au plus tard le 7 juin 2026, introduit une obligation de transparence dans les offres d’emploi, qui devront mentionner des fourchettes de salaires. « Les candidats à un emploi ont le droit de recevoir, de l’employeur potentiel, des informations sur la rémunération initiale ou la fourchette de rémunération initiale, sur la base de critères objectifs non sexistes, correspondant au poste concerné ; et le cas échéant, les dispositions pertinentes de la convention collective appliquées par l’employeur en rapport avec le poste », précise le texte. Encore plus contraignant, les employeurs auront interdiction de demander aux candidats « leur historique de rémunération au cours de leurs relations de travail actuelles ou antérieures ».

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Autant d’éléments susceptibles de corriger les biais à l’étape du recrutement. Une disposition qu’approuve Mathilde Le Coz, directrice des ressources humaines du cabinet d’audit Mazars : « L’expérience montre que les femmes demandent moins que les hommes lors des entretiens. Si elles connaissent la fourchette, les candidates négocieront mieux leur rémunération. »

Directement ou par le biais de leurs représentants

Pour améliorer la transparence sur la politique de rémunération au fil de la carrière, la directive prévoit la mise à disposition de tous les salariés des « critères qui sont utilisés pour déterminer la rémunération, les niveaux de rémunération et la progression de la rémunération des travailleurs ».

Les salariés pourront prendre l’initiative de s’informer directement ou par le biais de leurs représentants. Ils seront en droit de demander et de recevoir par écrit « les niveaux de rémunération moyens, ventilés par sexe, pour les catégories de travailleurs accomplissant le même travail qu’eux ou un travail de même valeur que le leur ». Un principe d’égalité des rémunérations à un travail « de même valeur » salué par Myriam Lebkiri, chargée de ce sujet à la CGT.

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Construction, commerce, automobile… La France menacée par une vague de plans sociaux

Lors d’une assemblée générale des salariés de l’usine Michelin, à Cholet (Maine-et-Loire), le 5 novembre 2024.

Annoncés au début de la semaine, les plans sociaux d’Auchan (2 500 emplois) et de Michelin (1 250 emplois) ouvrent-ils une saison en enfer sur le front social ? Me Philippe Druon, associé chez Hogan Lovells, spécialiste des procédures collectives et des restructurations, admet avoir une vision « peu réjouissante » de l’avenir : « Nous sommes face à une crise profonde, structurelle, des modes de vie, de consommation, du travail. A cela s’ajoutent des mutations comme celle vers la voiture électrique. Cela touche presque tous les secteurs : la distribution, l’automobile, la construction, l’immobilier, la tech… »

Dans les cabinets tels que le sien, les dossiers d’entreprises en difficulté arrivent d’autant plus nombreux que les prêts garantis par l’Etat accordés pendant la pandémie de Covid-19 doivent désormais être remboursés, sur fond d’instabilité politique et sociale. Et ce n’est pas fini : « Si Trump applique son programme, on va déguster… », soupire Me Druon.

Le secteur de l’automobile est emblématique. Concentré de mutations structurelles et de fragilités plus conjoncturelles, il est frappé à la fois par la baisse des ventes de voitures particulières, toujours 15 % en dessous de leur niveau d’avant-Covid-19, la transformation technologique avec le passage à l’électrique et des prix de l’énergie plus élevés que ceux payés par les concurrents chinois.

Les constructeurs automobiles sous pression

Ajoutez à cela le durcissement de la réglementation européenne sur les émissions de CO2 en 2025, qui met les constructeurs sous pression et, souvent, un prêt garanti par l’Etat, obtenu pendant la pandémie, qu’il faut rembourser.

A l’arrivée, une cohorte d’entreprises se retrouve en grande difficulté. L’annonce de la fermeture de deux usines Michelin, à Vannes et à Cholet (Maine-et-Loire), avec plus de 1 250 emplois, mardi 5 novembre, montre que la situation n’épargne pas les groupes les plus solides et mondialisés. Valeo avait auparavant annoncé chercher des repreneurs pour trois de ses sites en France, avec 1 120 emplois à la clé. L’équipementier Forvia, autre géant français, a annoncé 10 000 suppressions de postes en Europe dans les cinq ans qui viennent.

Les petits équipementiers sont au cœur de la tourmente : dans les Ardennes, Walor, qui fabrique notamment des bielles pour poids lourds – avec 245 emplois sur deux sites – est en redressement judiciaire. Dans la Loire, Anderton Castings, qui usine des pièces en aluminium avec 53 salariés, vient d’être mis en liquidation judiciaire. Le groupe belge Dumarey aurait pu déposer une offre de reprise. Mais il est lui-même en difficulté. Il supprime 248 emplois à Strasbourg dans sa filiale Powerglide (ex-Punch) qui produit des boîtes de vitesses pour l’équipementier allemand ZF, lequel a mis fin à son contrat.

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Management dans la culture : en finir avec « une insoutenable légèreté »

Livre. « Le management dans la culture est un sujet “accessoire”. » « Création et management sont définitivement irréconciliables. » « La gouvernance dans la culture ne peut être raisonnable. » C’est un chapelet d’idées reçues et de lieux communs (43 au total) que nous propose l’ouvrage collectif En finir avec les idées fausses sur le management dans la culture (Editions de l’Atelier), sous la direction de Michel Barabel, professeur affilié à Sciences Po Executive Education, Pascale Levet, professeure associée à l’IAE Lyon School of Management, et Thierry Teboul, directeur général de l’Afdas (Assurance-formation des activités du spectacle), l’opérateur de compétences de la culture.

Cette accumulation de contrevérités vise tout à la fois à alerter sur les errances passées et actuelles du secteur de la culture, et aussi à souligner l’urgence de faire évoluer la gestion collective au sein de ses structures.

Les errances passées et actuelles tout d’abord. « Combien de fois n’a-t-on pas entendu que l’injonction managériale n’avait pas sa place dans un secteur qui puise sa force créative dans la disruption et la résistance à un certain conformisme économique ?  », résume M. Teboul. Introduire des règles managériales reviendrait ainsi à faire entrer le loup dans la bergerie culturelle, à pervertir, en quelque sorte, la pensée créatrice. En conséquence, le sujet a bien souvent été éludé et traité par le mépris.

Il y a pourtant urgence à « en finir une bonne fois pour toutes avec l’insoutenable légèreté du management dans la culture », soulignent les auteurs. Tout d’abord parce que, comme dans toute autre organisation, « le gérant (…) doit s’intéresser à la paix sociale, au bien-être et à la satisfaction de ses employés », précise Rémi Lourdelle, secrétaire national F3C-CFDT (Fédération Conseil, Communication, Culture). « L’ombre prestigieuse de l’artiste et de sa liberté ne peut nier la foule des anonymes travailleurs de la culture avec leurs savoir-faire, leurs règles et leurs procédures », note l’économiste Pierre-Yves Gomez, qui souligne que « ces lieux culturels (…) ont besoin d’être régulés. »

Exposition aux risques psychosociaux

C’est d’autant plus vrai que le secteur a pu souffrir de cette absence d’encadrement structuré. Une étude Prodiss/Audencia Business School de 2017 avait mis en lumière « les signes d’une attente non satisfaite des permanents », expose Malika Seguineau, directrice générale d’Ekhoscènes, un syndicat du spectacle vivant : « La moitié des salariés interrogés déclaraient ne pas avoir de fiche de poste (…), la grande majorité n’avaient pas accès à un plan de formation, ni même à un accord sur l’organisation et la durée du temps de travail ».

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Egalité femmes-hommes : les leçons des pays les plus avancés

« A partir du 8 novembre à 16 h 48, les femmes travailleront encore gratuitement cette année. Et ce jusqu’à fin décembre », alerte Rebecca Amsellem, fondatrice du collectif Les Glorieuses. Le constat se répète chaque année en novembre. En 2024, c’est un peu moins qu’en 2023, mais il reste encore près de deux mois de travail gratuit à résorber pour compenser les inégalités salariales entre les femmes et les hommes.

Ce calcul élaboré par l’économiste féministe Rebecca Amsellem est certes perfectible, mais incarne symboliquement le retard ou les avancées des politiques de réduction des inégalités. Pour obtenir la parité totale sans avoir à attendre cent trente quatre ans, comme le prédit le Forum économique mondial (« Global Gender Gap Index 2024 »), les femmes devraient-elles claquer la porte des DRH ou « se rouler par terre » ? « J’ai vu certains hommes le faire », confie le directeur général de l’Association pour l’emploi des cadres, Gilles Gateau.

L’efficacité de la méthode, c’est le sujet d’un rapport publié jeudi 7 novembre par Les Glorieuses pour mettre en lumière les actions qui ont permis des avancées significatives de réduction des inégalités, dans quelques pays de l’Union européenne (UE) et au-delà. Leur objectif ? « Que tous les expert·e·s, les femmes et hommes politiques et les dirigeant·e·s puissent répondre à cette question récurrente : “Qu’est-ce qui a réellement fonctionné pour réduire l’écart salarial ?” avec des enseignements pratiques », explique Mme Amsellem.

L’Espagne et la Suède

Ce rapport, qui est entre les mains de la secrétaire d’Etat chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, Salima Saa, depuis peu, n’est pas un recueil de recettes, mais plutôt un retour sur les expérimentations, les mobilisations collectives et les politiques publiques qui ont permis aux entreprises d’aboutir à des résultats au Rwanda, en Nouvelle-Zélande, aux Etats-Unis, en Islande, dans l’Union européenne, en Suède et en Espagne.

Les bons élèves de l’Union européenne que sont l’Espagne et la Suède se sont fortement appuyés sur les politiques publiques.

En Espagne, l’amélioration est à la fois récente et fulgurante. L’écart salarial a été réduit de 10 points en dix ans, en passant à 8,7 % en 2022 contre 18,7 % en 2012, indique le rapport qui reprend les chiffres de Funcas. Le centre d’analyse espagnol spécialiste de la recherche économique et sociale explique cette performance par « un niveau d’éducation plus élevé » des jeunes générations. « Parmi les moins de 25 ans, les femmes gagnent en moyenne plus par heure que les hommes du même âge », illustre le think tank.

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Emploi des seniors : les négociations butent sur l’idée d’un CDI réservé aux chômeurs âgés

Le président de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), François Asselin (à gauche), et le vice-président de l’organisation syndicale, Eric Chevée, arrivent à Matignon, à Paris, le 5 avril 2023.

Comme un air de déjà-vu. Lundi 4 novembre, les syndicats et le patronat ont, encore, étalé leurs divergences sur les solutions à appliquer pour réduire le chômage des salariés en fin de carrière. Réunis pour la troisième fois dans le cadre des négociations consacrées à l’emploi des seniors, les protagonistes ont consacré une bonne partie de leurs échanges au contrat dit de « valorisation de l’expérience ». Ce projet, qui déroge au droit commun afin de faciliter le recrutement des demandeurs d’emplois proches de l’âge de la retraite, est défendu par les mouvements représentant les chefs d’entreprise. Mais les organisations de salariés se montrent très réservées, comme au début de l’année, lorsque les acteurs sociaux avaient examiné une telle idée durant le cycle de pourparlers sur un « nouveau pacte de la vie au travail », qui s’étaient soldés par un échec, le 10 avril.

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Le dispositif mis en avant aujourd’hui est très proche de celui que le patronat avait proposé il y a un peu plus de six mois. Il s’agit d’une expérimentation, sous la forme d’un contrat à durée indéterminée qui est ouvert aux chômeurs ayant au moins 60 ans – 57 ans si un accord de branche le stipule.

Pour l’entreprise, le système imaginé recèle plusieurs avantages. D’abord, elle a la possibilité de mettre fin à la relation de travail si son collaborateur a le droit de partir à la retraite et s’il a atteint l’âge qui lui permet de toucher une pension à taux plein. Dans ce cas de figure, la société n’a pas à payer la « contribution patronale spécifique » de 30 % sur le montant de l’indemnité de mise à la retraite. En outre, elle bénéficie d’une « exonération progressive de cotisations d’assurance-chômage » (qui augmentent à mesure que son salarié prend de l’âge).

« Incompréhension »

Quant au titulaire du contrat, une règle en sa faveur est prévue : si sa rémunération est inférieure de 30 % à celle qu’il percevait dans son précédent poste, une compensation lui est versée, en tenant compte des droits à l’assurance-chômage qui lui restent.

A l’issue de la rencontre, les représentants des syndicats ont fait part, face à la presse, de leurs réticences à l’égard d’un tel mécanisme, notamment à cause des allègements de cotisations qu’il instaure au profit des patrons. Olivier Guivarch, secrétaire national de la CFDT, y a vu « une brèche » dans le régime d’indemnisation des demandeurs d’emploi, qui est censé être « solidaire et mutualisé ». Au nom de la CGT, Sandrine Mourey a exprimé son « incompréhension » : pourquoi faudrait-il des dispositions particulières pour une catégorie de travailleurs, « alors qu’on ne veut pas stigmatiser [les seniors] » ? Secrétaire confédérale de FO, Patricia Drevon a déclaré que son organisation restait défavorable à cette option, tout comme au moment des tractations en vue d’un « nouveau pacte de la vie au travail ». Pour sa part, le chef de file de la CFTC, Frédéric Belouze, a manié l’euphémisme : « Ça nous pose une vraie question », a-t-il dit, en relevant que la mesure n’était « pas chiffrée ».

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Les subtilités juridiques des transferts de savoir-faire

Droit social. « Il sera libre à toute personne de faire tel négoce ou d’exercer telle profession, art ou métier qu’elle trouve bon. » Le décret d’Allarde du 17 mars 1791 voulait lutter contre les puissantes corporations et (déjà) fluidifier le marché du travail.

Décret aujourd’hui encore évoqué par la Cour de cassation, censurant des clauses de non-concurrence portant une atteinte excessive au « principe fondamental de libre exercice d’une activité professionnelle ». A la liberté du travail pour un salarié, à la liberté d’entreprendre pour celui voulant se mettre à son compte : en interdisant ces clauses, la Californie a ainsi facilité la création de start-up par d’anciens salariés des GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon).

Hier destinées à interdire un transfert de « savoir-faire » manuel ou technique, ces clauses ne doivent pas être confondues avec les secrets de fabrication, soit « tout procédé offrant un intérêt pratique ou commercial mis en usage par un industriel, et tenu caché ».

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Ils bénéficient toujours d’une protection pénale : « Le fait pour un directeur ou un salarié de révéler ou de tenter de révéler un secret de fabrication est puni d’un emprisonnement de deux ans et d’une amende de 30 000 euros » (L. 1227-1 du code du travail), y compris de la part des prestataires.

Hier un peu naïve

Ils sont l’objet d’un intérêt renouvelé dans la guerre économique qui est la nôtre, du fait de services étrangers s’intéressant de près aux entreprises sensibles (« Les débauchages, vecteur de déstabilisation pour les entreprises », DGSI, décembre 2023, Flash n° 98).

Hier un peu naïve, la Cour de cassation ne s’en laisse plus conter.

Côté chambre sociale, l’arrêt du 25 septembre 2024 met en scène une collaboratrice senior ayant recopié sur cinq clés USB personnelles des données sur des processus de fabrication auxquelles elle n’avait pas accès. Une telle copie de données, même non divulguées à des tiers (du moins pas encore) « constitue en elle-même une faute grave ».

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Côté chambre commerciale et donc concurrence déloyale, selon un arrêt du 7 décembre 2022 : « Le seul fait, pour une société à la création de laquelle a participé l’ancien salarié d’un concurrent, de détenir des informations confidentielles relatives à l’activité de ce dernier et obtenues par ce salarié pendant l’exécution de son contrat de travail constitue un acte de concurrence déloyale. »

« Obligation » et « clause »

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L’équilibre entre distanciel et présentiel, clé de l’avenir du télétravail

Qu’y a-t-il de commun entre Amazon, Ubisoft, Publicis, Black Tiger et Wopilo ? A peu près rien, hormis le télétravail, sur lequel le géant américain de l’e-commerce a jeté l’opprobre en annonçant, en septembre, le retour à 100 % en présentiel des 300 000 employés administratifs du groupe à partir de 2025. De quoi inquiéter tous les salariés français qui, depuis la pandémie de 2020, ont intégré le télétravail dans leur mode d’organisation. « Les salariés ne se sont pas vraiment battus pour. Le Covid a forcé le patronat sur le sujet, mais c’est un acquis social », pointe Marc Rutschlé, le délégué syndical de Solidaires informatique d’Ubisoft.

Le 15 octobre, 700 salariés du numéro un français du jeu vidéo se sont mis en grève à Paris, Lyon, Montpellier et Annecy pour s’opposer à la nouvelle obligation de revenir au bureau au moins trois jours par semaine. D’un point de vue purement juridique, « il n’y a pas de droit acquis au télétravail. Il s’agit d’une organisation collective qui n’est pas irréversible », précise Anne Vincent, avocate associée du cabinet Voltaire Avocats. Mais pour le syndicaliste, comme pour les télétravailleurs qui l’ont clamé en 2023, « les salariés doivent avoir le choix ».

Il y a un an déjà, la question du retour au bureau s’était posée, lorsque s’est amorcé un vaste mouvement de régulation du télétravail à l’occasion du renouvellement des accords signés pendant la pandémie. C’était alors Publicis et Google qui avaient restreint le travail à distance. Et même – quel paradoxe ! – Zoom, le chef d’orchestre des visioconférences, leur avait emboîté le pas. Le mouvement se poursuit aujourd’hui. Ceux qui s’étaient contentés d’une charte unilatérale, comme Ubisoft, en profitent pour ouvrir des négociations afin de graver la nouvelle donne dans un accord.

Pas de réaction du marché financier

Mais pourquoi restreindre à nouveau ce mode d’organisation, toujours plébiscité par les salariés ? La dernière édition du Global Survey of Working Arrangements, publiée en octobre, estime que le télétravail concernerait entre 30 % et 40 % des actifs en France en 2023, précisément 33,5 % selon Eurostat. Et que certains seraient prêts à échanger 5 % de leur salaire contre deux ou trois jours de télétravail par semaine.

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L’impact sur la productivité n’est ni évident ni uniforme. Si des études américaines, présentées lors de la conférence sur le télétravail qui s’est tenue à l’université Stanford du 9 au 11 octobre, estiment entre 10 % et 20 % la perte de productivité des salariés qui sont à 100 % en télétravail, elles démontrent aussi que le retour au bureau n’est pas indolore. « Une politique de retour au bureau trop stricte peut entraîner une baisse de la rétention des employés [c’est-à-dire des départs] ou nécessiter des salaires plus élevés, une politique trop souple pourrait nuire à la productivité », notent les chercheurs. Pour leur étude « Déterminants et conséquences des politiques de retour au bureau », Sean Flynn (université Cornell), Andra Ghent et Vasudha Nair (université de l’Utah) ont analysé plus de 900 groupes cotés en Bourse : le marché financier ne réagit pas aux annonces de fin du télétravail. « Ce qui peut indiquer qu’il n’y a pas de consensus parmi les investisseurs sur le sujet », concluent les universitaires.

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« La triple cotation issue de Vivendi placerait les actionnaires minoritaires dans des juridictions moins protectrices de leurs droits »

L’annonce par le conseil de surveillance de Vivendi, mardi 29 octobre, du projet de scission visant à « libérer pleinement le potentiel de développement des différentes activités de Vivendi » n’est pas sans poser plusieurs questions, notamment sur le capitalisme que nous voulons et sur l’avenir de la place financière de Paris.

Si la séparation des trois entités du groupe est censée permettre de réduire la décote de holding dont elles pâtiraient, on voit mal en quoi le choix des trois places de cotation que sont Londres pour Canal+, Amsterdam (avec une fondation) pour Havas et Euronext Growth pour Hachette contribuerait à cet objectif.

Pour Canal+, on conçoit les bénéfices d’accès au marché anglo-saxon, alors même que les deux tiers des abonnés se trouvent hors de France. On comprend également les mérites de l’opération au regard d’une réorganisation de l’empire Bolloré dans une perspective successorale, cette scission permettant de dégager quatre entités nouvelles.

En revanche, le groupe est peu disert sur les conséquences pour les actionnaires d’une cotation éclatée sur trois marchés financiers. Il ne justifie pas ce triple exode de cotation conjoint, sauf la volonté de préserver la future entité Havas NV contre une offre publique d’achat (OPA) hostile. L’objectif a le mérite d’être assumé, mais il n’est pas sans susciter des réserves. N’évoquons même pas l’objet d’Euronext Growth, qui est, selon la place elle-même, une plateforme consacrée aux PME de croissance et dont la capitalisation moyenne des entités cotées dépasse à peine 80 millions d’euros, sans rapport avec les 2 milliards d’Hachette.

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De façon plus fondamentale, cette opération soulève quelques interrogations cardinales que les actionnaires devront bien avoir à l’esprit, le 9 décembre, lors de la prochaine assemblée générale de Vivendi.

Des conséquences négatives

En effet, cette scission consistant à coter trois futures entités sur trois marchés réglementés, selon une ingénierie juridique complexe, aura pour conséquence de soustraire Vivendi à l’obligation de lancer une OPA résultant du franchissement de seuil de 30 % du capital ou des droits de vote. L’essence même de la réglementation imposant le lancement d’une telle offre est de garantir l’égalité de traitement entre actionnaires, notamment entre les actionnaires dits « de contrôle » et les autres. Cette triple cotation place donc les actionnaires minoritaires dans des juridictions moins protectrices de leurs droits.

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« C’est un métier ! » : la cybersécurité, tantôt ingénieur, tantôt juriste, une fonction multifacettes

NIS2, REC et DORA : ces directives et ces règlements européens, visant à harmoniser le niveau de cybersécurité des entreprises à l’échelle du continent, sont très attendus par le secteur numérique, et font l’objet d’un projet de loi du gouvernement présenté le 15 octobre. NIS2, qui s’applique depuis le 17 octobre, doit en effet être transposée en droit français.

« Ces nouvelles législations vont poser une nouvelle feuille de route avec une notion d’amende et un risque pénal pour les dirigeants, ce qui va obliger notamment près de 15 000 PME et collectivités à monter en compétences sur le sujet et recruter pour s’y conformer », explique Benoît Fuzeau, président du Clusif, une association qui promeut la sécurité numérique.

C’est peu de dire que les entreprises manquent cruellement de compétences pour analyser les risques et répondre aux attaques de leurs systèmes d’information. « Environ 15 000 professionnels manquent en cybersécurité, alors que c’est un secteur avec 30 000 à 35 000 professionnels en poste aujourd’hui », illustre Nolwenn le Ster, présidente de la commission cybersécurité de Numeum, syndicat patronal du numérique.

Diversification très rapide

Ces difficultés s’expliquent notamment par la diversification très rapide des métiers du secteur. La plupart des formations peinent à suivre les besoins des entreprises. « On pense trop ingénieur, technique, mais ce n’est pas toujours le cas. Il n’y a pas besoin d’être un expert pour piloter la politique cyber d’une entreprise, pour faire de la conformité », décrit Benoît Fuzeau.

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A titre d’exemple, les métiers techniques de pentester – qui consistent à contrôler la sécurité d’une application ou d’un système – ou de « hacker éthique », qui font l’image du métier auprès du grand public, ne concernent que « 2 % ou 3 % de l’activité », selon Guillaume Collard, cofondateur de la CSB School. Ils sont, pour la plupart d’entre eux, en voie d’automatisation.

Cette école s’est spécialisée sur la gouvernance pour répondre à ce besoin croissant de profils moins « experts ». Comme il est devenu difficile d’éviter toute attaque, il faut dorénavant des profils pour réagir une fois que l’incident a eu lieu : « 50 % de nos diplômés ont une posture de management et sont proches des autres métiers, explique M. Collard. Il y a des anciens juristes qui viennent se former, se spécialisent dans nos métiers. Ça devient une nouvelle fonction support obligatoire pour les boîtes, une sorte de médecin généraliste qui a une vue d’ensemble. »

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