Archive dans mai 2024

« Nous ne percevons pas d’urgence à la mise en œuvre d’une nouvelle réforme de l’indemnisation du chômage »

La ministre du travail, Catherine Vautrin, a annoncé, le 17 mai, les grandes lignes proposées par l’exécutif pour réformer à nouveau l’assurance-chômage, reprenant ainsi la main aux organisations syndicales et patronales.

L’objectif fixé à l’évolution des règles est l’atteinte du plein-emploi. Le lien ainsi fait entre réforme des droits à indemnisation et plein-emploi tient en deux hypothèses. Premièrement, les règles d’indemnisation du chômage auraient un effet majeur sur les comportements des demandeurs d’emploi en matière de reprise d’une activité professionnelle. Deuxièmement, une accélération du retour au travail des chômeurs aurait un effet majeur sur le volume d’emplois disponibles.

Si elles peuvent paraître vraisemblables, ces deux hypothèses n’ont en réalité rien d’évident : les comportements de recherche d’emploi et d’embauche ont bien d’autres déterminants que les règles d’indemnisation du chômage (besoins de l’économie, formation, situations personnelles).

De même, une accélération du retour à l’emploi peut certes se traduire par une baisse du chômage, mais celle-ci peut être de courte durée en raison d’une modification des conditions de rotation de la main-d’œuvre (contrats plus courts, moins bonne adaptation entre les missions du poste et les compétences des salariés, allers-retours plus fréquents entre emploi et chômage). Entre différents mécanismes possibles aux effets potentiellement contradictoires, seule une analyse précise du marché du travail peut permettre de trancher.

Délai incompressible

Or, le marché du travail français vient de connaître des réformes majeures dont les effets sur l’emploi ne sont pas encore évalués. Les effets sur le niveau d’indemnisation sont certes connus (baisse du nombre d’indemnisés et de l’indemnisation moyenne) ; il existe quelques indices de changements sectoriels (notamment dans le cas des saisonniers). Mais les effets d’ensemble sont encore à déterminer.

Or, des évaluations de la réforme 2019-2021 sont précisément en cours. Commandées par le ministère du travail, elles sont réalisées par des équipes de chercheurs indépendants, sous le contrôle d’un comité scientifique chargé d’en attester la qualité. Les caractéristiques de l’assurance-chômage expliquent un délai incompressible de plusieurs mois pour que les données soient disponibles avant de pouvoir être analysées. La publication des premiers résultats est prévue à la fin de l’année 2024.

La nécessité de réaliser des évaluations avait été présentée comme un élément central au moment de la discussion de la loi sur l’assurance-chômage. Bien sûr, la politique publique a son autonomie propre et ne nécessite pas toujours une validation scientifique préalable, mais une action publique raisonnée, tout comme le débat démocratique, ne peut se satisfaire d’une accumulation successive de réformes dans un temps très court, sans même prendre le temps de tirer les enseignements des réformes précédentes.

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PFAS : les pompiers sont « aux premières loges » dans la contamination aux « polluants éternels »

Lors d’une manifestation de pompiers à Paris, le 16 mai 2024.

Nul ne se faisait d’illusion sur les résultats des analyses. Ils seraient inévitablement positifs, pressentaient le 16 mai, place de la République à Paris, les pompiers venus de toute la France pour réclamer une meilleure prise en compte de la dangerosité de leur métier. A commencer par les dix-neuf volontaires prêts à se faire prélever des mèches de cheveux afin de mesurer leur exposition aux très toxiques substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS).

Les résultats sont « alarmants », ont révélé mardi 28 mai lors d’une conférence de presse commune les neuf organisations syndicales des services départementaux d’incendie et de secours (SDIS) et Les Ecologistes (ex-EELV), alliées dans cette opération alors que la proposition de loi visant à protéger la population des risques liés aux PFAS, adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale le 4 avril, arrive au Sénat jeudi 30 mai.

Sur les vingt échantillons analysés – les cheveux des 19 pompiers et ceux de Marie Toussaint, tête de liste écologiste aux élections européennes, qui s’est aussi prêtée au test –, tous sont positifs à au moins un des douze « polluants éternels » recherchés, dix-neuf à au moins deux. Trois sont positifs à quatre polluants, deux à cinq, et un affiche même le score de six PFAS.

Tous les prélèvements capillaires des pompiers révèlent en outre la présence de PFOA, une substance interdite depuis 2019 et classée « cancérogène pour l’humain », et plus de la moitié présentent des traces de PFOS, molécule interdite depuis 2009 et classée « cancérogène possible ».

« Renforcer notre suivi médical »

Le plus jeune des pompiers testés, Florian Dallant, 23 ans, s’est aussi révélé l’un des plus contaminés, avec un total de cinq polluants identifiés. « Alors que je ne suis pompier que depuis six ans ! Je me doutais que j’étais exposé, mais ça prend une tout autre dimension de voir les résultats noir sur blanc, explique-t-il, sous le choc. Ça me fait réfléchir aux risques que je prends et m’interroge même sur la suite de ma carrière… »

Testé positif à trois PFAS, Arnaud Decosne, 45 ans, pompier à Blaye (Gironde), ne peut s’empêcher une pensée pour son père et son grand-père. « Ils étaient pompiers tous les deux et sont morts d’un cancer, l’un à 63 ans, l’autre à 67 ans. Bien sûr, il n’y a pas de fatalité mais si je fais la moyenne ça veut dire qu’il me reste vingt ans à vivre… On se met en danger pour les gens, mais une fois qu’on a fini notre carrière, on a envie de vivre ! »

« Je me pose sérieusement la question de continuer à former les agents de mon SDIS sur feu réel en caisson, qui m’expose davantage… Je me sens un peu à un tournant de ma carrière », réagit Laure Moriot, 39 ans, de la caserne d’Elbeuf (Seine-Maritime), positive à trois PFAS.

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La rémunération des grands dirigeants, un débat perdu d’avance

Gouvernance. Le montant des rémunérations des grands dirigeants d’entreprise revient désormais dans l’actualité avec la régularité de ce que le langage journalistique appelle un « marronnier ». Autrement dit, une information aussi récurrente et sans conséquence que la chute des feuilles en automne. Les termes du débat, les arguments convenus et les indignations résignées sont connus d’avance. On sait qu’ils ne changeront rien.

Ainsi la rémunération extravagante de 36 millions d’euros obtenue pour l’année 2023 par Carlos Tavares, dirigeant du groupe Stellantis, n’a pas longtemps intéressé le public, et la courte sidération de certains a été finalement oubliée dans l’indifférence fataliste de beaucoup.

Réalité brutale

C’est qu’il semble désormais admis que la gratification des grands dirigeants relève du contrat privé, supposé conclu avec les seuls actionnaires, et que ceux-ci l’ont accordée à M. Tavares par une majorité de 70 % lors de l’assemblée générale. La critique s’essouffle alors comme si elle devenait inconvenante quand elle n’est pas interprétée, dans les termes fréquents d’un psychologisme primaire, comme le fruit de jalousies inassouvies ou d’un supposé complexe des Français à l’égard des grandes fortunes.

Finalement, savoir si M. Tavares mérite un tel niveau de revenu plutôt qu’un autre soulève des questions morales et politiques vues naguère comme essentielles à l’ordre social, mais qu’il semble inutile de poser encore. Car la réalité brutale est que cette rémunération a été obtenue parce que Carlos Tavares bénéficie d’un rapport de force favorable dans la gouvernance de son entreprise :

– D’une part, les succès économiques de Stellantis lui permettent d’influer sur les critères définissant le calcul de son bonus (qui intègre par exemple les performances financières mais pas les impacts écologiques à long terme de sa stratégie) ;

– d’autre part, pour les actionnaires qui le valident, son montant reste dérisoire relativement au coût d’une protestation visant à l’efficacité. M. Tavares fait payer sans réticence le prix spectaculaire d’un privilège de situation.

Un débat pipé

Mais il n’est pas le seul. Des acteurs le font partout, comme l’a montré l’actualité récente. Ainsi les personnels de la SNCF ont-ils réussi à négocier une adaptation de leurs conditions de départ à la retraite plus favorable que celles que la loi de 2023 impose à l’ensemble des salariés : ici encore, savoir si la pénibilité de leurs métiers mérite un traitement d’exception ouvre un débat pipé.

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Paris 2024 : l’Etat accroît d’« une dizaine de millions d’euros » son soutien à la sécurité privée pour l’aider à recruter

L’Etat a amplifié son « coup de pouce » à la filière de la sécurité privée afin que celle-ci soit en mesure de fournir 17 000 agents en moyenne quotidienne – 22 000 au pic – durant les Jeux olympiques et paralympiques cet été. Ce sont tout d’abord les sommes engagées pour les formations aux métiers de la sécurité, notamment à destination des demandeurs d’emploi, afin de les faire embaucher par les entreprises du secteur pour les Jeux, qui ont été augmentées.

« L’Etat, sous l’autorité de la ministre du travail, vient de remettre une dizaine de millions d’euros », a déclaré le préfet de la région Ile-de-France, Marc Guillaume, le 24 mai sur le plateau de Figaro TV. Le soutien de l’Etat s’élève ainsi désormais à « plus d’une cinquantaine de millions » d’euros.

Initialement, ce sont 46 millions d’euros qui avaient été débloqués (dont 31 millions sur la seule année 2023) pour acheter 20 000 formations relatives aux métiers de la sécurité. Soucieux d’anticiper les possibles no show, c’est-à-dire le défaut de présentation des agents de sécurité sur leur lieu de travail, le gouvernement a revu à la hausse, en avril, les objectifs de formation et de recrutement. C’est ce qui a conduit à accroître les financements.

Pour la seule région Ile-de-France, où se concentrent les sites olympiques et paralympiques, et donc les besoins de sécurité, « nous devions faire 20 000 formations. Nous sommes à 23 000 réalisées, pour [un objectif de] 25 000 à fin juin », selon le préfet de région. Sur le plan national, 28 000 entrées en formation et 20 000 recrutements sont prévus.

Une « aide exceptionnelle » pour attirer les candidats

Le soutien de la puissance publique à la filière de la sécurité privée ne se borne pas à proposer des formations « gratuites ». Pour attirer des candidats vers ces métiers, où les conditions de travail et les rémunérations ne sont pas des plus attractives, une « aide exceptionnelle » a été instituée afin de favoriser les recrutements.

Il s’agit d’une prime de 600 euros, proposée depuis le début d’avril par l’Etat. Acté le 29 mars par le conseil d’administration de France Travail, ce soutien financier vise aussi bien les demandeurs d’emploi que les étudiants volontaires, à la condition qu’ils ne résident pas en Ile-de-France.

Le conseil régional d’Ile-de-France a, en effet, lui-même mis en place une prime de 600 euros pour celles et ceux qui s’engagent dans une formation – avec possibilité d’un versement de 1 400 euros supplémentaires en cas de contrat de travail (sans condition de durée) conclu avant le 30 septembre.

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Assurance-chômage : une réforme au goût amer

Le durcissement des règles de l’assurance-chômage constituera l’un des principaux marqueurs des deux quinquennats d’Emmanuel Macron. Avec en ligne de mire l’atteinte du plein-emploi en 2027, le président de la République a multiplié les changements de règles, qui se sont traduits par trois réformes en moins de cinq ans. Les détails de la dernière ont été précisés, dimanche 26 mai, par le premier ministre, Gabriel Attal, dans un entretien à La Tribune Dimanche. Il s’agit d’un nouveau tour de vis, qui entrera en vigueur le 1er décembre.

La rhétorique du gouvernement consiste à convaincre que, pour préserver notre modèle social, il est indispensable de s’attaquer à sa générosité. Les chômeurs sont d’importants contributeurs à cette logique. Jugeant que les règles actuelles d’indemnisation ne sont pas suffisamment incitatives à la reprise d’activité, l’idée consiste à rogner sur les droits des sans-emploi. La France se rapprocherait ainsi des standards en vigueur en Europe.

Le temps de travail nécessaire pour prétendre à une allocation est sensiblement allongé, la durée d’indemnisation, elle, est raccourcie. Et, en cas d’amélioration du marché du travail, les règles seront encore durcies. L’Etat resserre ainsi un peu plus son emprise sur un régime qui est théoriquement géré par les partenaires sociaux, mais dont la gouvernance relève de moins en moins du paritarisme.

Finalité discutable

Les modalités par lesquelles le gouvernement compte atteindre ses objectifs posent néanmoins des questions en termes de cohérence, de finalité et de justice. La cohérence manque cruellement. Ce nouveau durcissement intervient au moment où le marché du travail marque le pas. Le principe de contracyclicité qu’a voulu instaurer le gouvernement se trouve donc en porte-à-faux. Par ailleurs, cette réforme est annoncée alors que l’impact des deux précédentes n’a pas été pleinement évalué. La méthode donne le sentiment que le gouvernement avance à tâtons sans nécessairement prendre en compte les conséquences sociales, qui laisseront un goût amer à nombre de chômeurs.

La finalité est également discutable. Les nouvelles règles doivent permettre de pourvoir 90 000 postes. L’objectif paraît bien peu ambitieux au regard des enjeux financiers affichés. Les économies attendues se chiffreraient à 3,6 milliards d’euros par an, soit plus de 10 % du montant total des allocations versées en 2023. De quoi interpréter cette réforme davantage comme une façon de trouver dans l’urgence des marges de manœuvre budgétaires, plutôt que d’apporter des solutions pérennes au chômage de masse.

Enfin se pose la question de la justice sociale d’une réforme qui va affecter en premier lieu les jeunes et les plus précaires (intérimaires, saisonniers, salariés en contrats courts). S’attaquer à la prétendue « générosité » du système, c’est aussi oublier qu’un peu moins de la moitié des personnes sans emploi ne touchent aucune indemnité. En contrepartie, l’effort demandé aux employeurs pour apporter leur contribution à l’amélioration du marché du travail n’est à ce stade qu’une promesse. L’éventuel durcissement des sanctions contre l’abus des contrats courts est renvoyé à un futur texte dont les contours restent flous.

Quant au dispositif consistant à préserver le salaire des chômeurs les plus âgés acceptant de reprendre un emploi moins bien payé que leur ancien poste, il risque d’inciter les employeurs à recruter des salariés expérimentés à bon compte, le tout financé par la collectivité. Le gouvernement accélère sur la route du plein-emploi au risque de confondre vitesse et précipitation.

Lire aussi le portrait | Article réservé à nos abonnés Catherine Vautrin, ministre du travail à temps partiel

Le Monde

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Semaine décisive pour l’avenir d’Ascometal, en redressement judiciaire

Dans l’usine Ascométal de Hagondange, en mai 2014.

En Lorraine et dans la Loire, l’annonce a fait l’effet d’une bombe. Dans un courrier très argumenté, le sidérurgiste italien Acciaierie Venete a fait savoir, jeudi 23 mai, à l’administrateur chargé du redressement judiciaire d’Ascometal qu’il se retirait des discussions sur la reprise du pôle automobile, qu’il négocie pourtant depuis des mois. Une catastrophe pour les 627 employés des sites de Hagondange (Moselle), qui abrite le siège social, le centre de recherche sur les aciers spéciaux et une usine, de Custines (Meurthe-et-Moselle) et du Marais à Saint-Etienne. Venete est le seul repreneur déclaré. Et la date limite de dépôt des candidatures est fixée à lundi 27 mai à minuit, le tribunal de commerce de Strasbourg devant se prononcer jeudi 30 mai.

En redressement judiciaire depuis le mois de mars, après le désengagement de son actuel actionnaire Swiss Steel, le sidérurgiste Ascometal (1 125 emplois répartis sur cinq sites) joue son avenir devant le tribunal de commerce de Strasbourg, et les doutes de ces derniers jours n’augurent rien de bon. Sa vente à la découpe pourrait connaître des fortunes diverses. Si les discussions autour du pôle automobile sont au point mort, celles pour la reprise des sites de Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône) et Dunkerque (Nord) ont bien avancé.

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Sur le sujet épineux – celui du pôle automobile – une des conditions suspensives de son offre, depuis plusieurs mois, n’a toujours pas été levée. Elle exige que le désamiantage et le dépoussiérage de l’usine de Hagondange, chiffrés à 11 millions d’euros, soient pris en charge par Swiss Steel. Alessandro Banzato, président de Venete, émet aussi des doutes sur les financements publics en complément de son apport en capital de 30 millions d’euros. Selon lui, ils ne suffiraient pas à compenser « la dégradation de contexte du marché, [à répondre aux] préoccupations sur la véritable valeur des stocks et moins encore [à] financer les coûts de désamiantage et de dépoussiérage ».

« Un cataclysme incroyable »

L’annonce a agité lors du dernier week-end de mai les services de l’Etat et plus précisément le comité interministériel de restructuration industrielle chargé d’accompagner cette transition, qui se voulait en douceur. Gabriel Attal devait recevoir, lundi après-midi, Franck Leroy, président de la région Grand-Est. « L’échec de cette reprise serait un cataclysme incroyable pour le territoire. Hagondange possède de vrais atouts avec des équipements rares et à la pointe. On doit trouver une solution. On y travaille avec Roland Lescure, le ministre de l’industrie, la région Grand-Est et les collectivités locales », martèle le député Renaissance messin Belkhir Belhaddad. Il veut remettre tout le monde autour de la table des négociations. « On a besoin d’encore un peu de temps. La priorité est d’obtenir une prolongation du redressement judiciaire afin d’arriver à un accord sur cette question du désamiantage. L’Etat italien étant déjà présent au côté de Venete, cette offre doit aussi être renforcée par une prise de participation de l’Etat français. Il faut obtenir un co-investissement, notamment en mobilisant Bpifrance et la Caisse des dépôts et consignations, et pas juste une garantie d’emprunt », poursuit l’élu de Moselle.

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Réforme de l’assurance-chômage : la durée d’indemnisation va baisser

De tous les tours de vis infligés aux demandeurs d’emploi depuis l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron en 2017, celui prévu pour 2024 est particulièrement serré. Le premier ministre, Gabriel Attal, a officiellement dévoilé, dans un entretien à La Tribune Dimanche du 26 mai, le contenu de la réforme de l’assurance-chômage. « Nous avons montré que nous n’étions pas condamnés au chômage de masse », a expliqué le locataire de Matignon, jugeant que « si nous ne réformons pas l’assurance-chômage aujourd’hui, nous risquons de caler sur la route du plein-emploi ».

Les mesures, dont l’entrée en vigueur se fera le 1er décembre, feront l’objet d’un décret publié le 1er juillet. L’essentiel du projet du gouvernement était connu depuis mercredi 22 mai, à la suite de rencontres entre la ministre du travail, Catherine Vautrin, et les partenaires sociaux.

Le principal changement concerne la condition d’ouverture des droits. Il faudra désormais avoir travaillé huit mois sur les vingt derniers pour pouvoir toucher une allocation, contre six sur les vingt-quatre derniers actuellement. Un changement qui a de lourdes conséquences. Outre le fait de compliquer la situation des jeunes et des plus précaires (salariés en contrats courts, saisonniers, intérimaires), cette mesure va également faire baisser la durée d’indemnisation maximale de toutes les personnes privées d’emploi de moins de 57 ans, passant de dix-huit mois aujourd’hui, à quinze mois.

Règles durcies pour les seniors aussi

Car depuis l’entrée en vigueur du principe de « contracyclicité » en 2023, la durée d’indemnisation maximale correspond à 25 % de la période d’affiliation tant que le taux de chômage est inférieur à 9 %, soit, avec cette réforme, quinze mois de droits maximum pour quelqu’un qui aurait travaillé sans interruption sur les vingt derniers mois précédant son inscription. Le gouvernement va d’ailleurs « renforcer » ce mécanisme de contracyclicité : si le taux de chômage baisse en dessous de 6,5 % – il est à 7,5 actuellement – la durée maximale d’indemnisation sera alors réduite de 40 % pour passer à douze mois.

Les règles resteront différentes pour les séniors mais elles seront, elles aussi, moins favorables qu’actuellement. C’est désormais à partir de 57 ans, contre 55 actuellement, que les conditions d’indemnisation seront plus avantageuses que le droit commun, s’adaptant ainsi au report de deux ans de l’âge légal de départ à la retraite. Les chômeurs d’au moins 57 ans auront droit à une indemnisation pendant maximum vingt-deux mois et demi, contre vingt-sept aujourd’hui. Gabriel Attal a également confirmé la création d’une mesure dans les cartons depuis des mois : si un demandeur d’emploi de plus de 57 ans retrouve un travail moins bien rémunéré que son précédent salaire, un « bonus emploi senior » permettra de combler le manque à gagner.

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Alexandra Roulet, lauréate du Prix du meilleur jeune économiste 2024 : « L’assurance-chômage comporte un aléa moral  »

Alexandra Roulet, lauréate du Prix du meilleur jeune économiste 2024, dans les locaux du « Monde », le 22 mai 2024.

Lauréate du Prix du meilleur jeune économiste 2024, Alexandra Roulet revient sur ses travaux ainsi que sur son expérience en tant que conseillère économique à l’Elysée et à Matignon.

Comment êtes-vous venue à la recherche économique et à vous spécialiser dans la question du travail ?

J’ai hésité entre une carrière académique ou administrative. C’est la rencontre avec mes professeurs, Daniel Cohen à l’Ecole normale, puis Philippe Aghion à Harvard, qui a été déterminante par leur enthousiasme communicatif. Quant à la question du travail, je l’ai abordé avec Lawrence F. Katz, professeur à Harvard. Il est vrai que beaucoup de Français sont attirés par ce thème, peut-être poussés par l’importance de la question du chômage dans notre pays.

Vous avez travaillé sur l’assurance-chômage, un thème d’actualité. Que vos recherches ont-elle apporté ?

L’assurance-chômage est destinée à atténuer un choc, celui de la perte de revenus. Mais elle doit aussi aider à la recherche d’un nouvel emploi. Comme toute assurance, elle comporte un aléa moral, si elle n’incite pas à retrouver suffisamment rapidement un travail.

Avec Thomas Le Barbanchon et Roland Rathelot, nous avons regardé si avoir droit à une durée d’indemnisation plus longue induisait aussi une durée plus longue de recherche d’emploi. Nous avons constaté que, si l’on augmente de 10 % la durée d’indemnisation, la durée au chômage augmente de 3 %. Ce chiffre est cohérent avec les études qui ont été menées à l’étranger sur le même sujet. On serait sûrement plutôt autour de 2 % si on avait pu regarder la durée de non-emploi, certaines sorties du chômage n’étant pas nécessairement vers l’emploi. Mais, surtout, nous nous sommes interrogés sur l’interprétation de ce constat : les gens restent-ils plus longtemps au chômage parce qu’ils ont le temps ou parce qu’ils cherchent un meilleur emploi ?

Nos travaux, qui ont porté sur la période 2006-2012, montrent qu’une durée d’indemnisation plus longue ne modifie pas les critères de recherche d’emploi (salaire de réserve, type de contrat, etc.) et, donc, n’amène probablement pas à trouver un meilleur emploi.

Les adversaires de la réforme de l’assurance-chômage et de celle de 2023, qui s’appuie sur ce genre d’étude, peuvent souligner que cet ordre de grandeur de 3 % est minime au regard des effets sociaux négatifs que cela induit…

C’est toute la question. Est-ce que les gains sont suffisants au regard d’autres critères, comme le risque d’induire pour certains un basculement dans les minima sociaux ? C’est là que les économistes divergent et que les politiques arbitrent. Notre papier en lui-même n’était pas un conseil de politique publique.

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Réforme de l’assurance-chômage : Gabriel Attal confirme un durcissement des règles

C’est à partir du 1er décembre 2024 que les règles d’indemnisation de l’assurance chômage seront durcies, a annoncé le premier ministre, Gabriel Attal, dans une interview à La Tribune dimanche, le samedi 25 mai. L’objectif, selon lui, est d’« aller vers le plein-emploi » et « valoriser encore plus le travail ».

La durée d’indemnisation sera réduite de dix-huit à quinze mois « dans les conditions actuelles », c’est-à-dire si le taux de chômage se maintient en dessous de 9 %, pour les chômeurs de moins de 57 ans. Et il faudra avoir travaillé huit mois sur les derniers vingt mois pour être indemnisé, contre six mois au cours des vingt-quatre derniers mois actuellement, a précisé le chef du gouvernement. Ces éléments confirment les pistes données cette semaine aux partenaires sociaux par la ministre du travail, Catherine Vautrin.

Gabriel Attal a précisé que le gouvernement allait prendre un décret le 1er juillet pour que la réforme « puisse entrer en vigueur le 1er décembre ». Changer les règles d’indemnisation nécessite une mise à jour des systèmes d’information de France Travail (ex-Pôle Emploi) qui ne peut être faite du jour au lendemain.

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Un examen sur l’extension possible du système de bonus-malus sur les contrats courts

Le premier ministre a également confirmé la création d’un « bonus emploi senior ». Grâce à cette mesure « un senior au chômage qui reprendra un emploi moins bien rémunéré que son emploi précédent pourra cumuler son nouveau salaire avec son allocation de chômage » et « retrouvera ainsi sa rémunération initiale, pendant un an », a expliqué Gabriel Attal. Les syndicats avaient rapporté que les salaires seraient ainsi compensés jusqu’à 3 000 euros.

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Le système de bonus-malus sur les contrats courts, critiqué par le patronat et aujourd’hui limité à sept secteurs d’activité, fera l’objet d’un examen sur « l’opportunité de l’étendre en fonction de l’évaluation à conduire ». « Je charge Catherine Vautrin de mener une concertation pour identifier les secteurs qui auront vocation à entrer dans ce système et à quel rythme », a détaillé le chef du gouvernement.

Reçu par la ministre du travail cette semaine, le président du Medef, Patrick Martin, avait affiché son « soutien à la réforme » tout en se disant opposé « à une généralisation ou même à une simple extension du bonus-malus ».

Diminution de la durée d’indemnisation en cas de baisse du taux de chômage

Enfin, le premier ministre a confirmé l’ajout d’un nouveau seuil pour diminuer la durée d’indemnisation, déjà réduite de 25 % depuis février 2023, encore davantage si le taux chômage tombe en deçà de 6,5 %. Il n’a pas précisé de combien. La CGT avait rapporté que cette durée serait diminuée dans ce cas de 15 points de pourcentage supplémentaires, soit 40 %, ce qui la ramènerait à 12 mois.

« Pour préparer le rebond économique de 2025 que nous annoncent les prévisionnistes, je souhaite que les règles soient encore plus incitatives quand la croissance repartira davantage et que le taux de chômage diminuera », a encore dit Gabriel Attal. Pour le premier ministre, « ce n’est pas une réforme d’économie, mais de prospérité et d’activité ».

« Le gain se mesurera par un nombre plus important de Français qui travailleront. Et donc plus de financements pour notre système », a-t-il assuré.

Une réforme jugée « criminelle » par la CGT

Selon le ministère du travail, le gouvernement attend de la réforme 3,6 milliards d’euros d’économies et projette une augmentation « de 90 000 le nombre de personnes en emploi ».

Le durcissement de la condition d’affiliation générerait à lui seul 2,8 milliards d’économies, selon la CGT. « C’est vraiment une mesure antijeunes », a réagi Denis Gravouil, le négociateur sur l’assurance chômage de la centrale de Montreuil, pour qui l’absence de décision d’extension sur le bonus-malus montre que « le gouvernement est totalement aligné sur les intérêts du patronat ».

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Reprenant les mots utilisés selon lui par la secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet, devant Catherine Vautrin, il a jugé que la réforme était « criminelle », citant des études sur la santé des chômeurs et de leur entourage qui montrent « le taux de suicide des chômeurs en fin de droits est deux fois plus élevé que dans la population en emploi ».

Le Monde avec AFP

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Le Vatican en proie à un conflit social inédit

Un gardien des musées du Vatican, à Rome, le 13 février 2024.

Au Vatican, il s’agit d’une première. Le plus petit Etat du monde se trouve aux prises avec un conflit social inédit, une cinquantaine de ses salariés menaçent de traduire en justice les autorités ecclésiastiques faute d’un changement drastique de leurs conditions de travail. Tous sont employés par les musées du Vatican, un des lieux au monde qui concentrent le plus de chefs-d’œuvre, des trésors inestimables qui vont des fresques de la chapelle Sixtine aux toiles de la Renaissance exposées dans sa pinacothèque, en passant par sa collection de statues antiques. Dans une notification adressée fin avril au cardinal Fernando Vérgez Alzaga, qui préside le gouvernorat du Vatican, l’autorité de tutelle des musées, les employés dénoncent des méthodes de gestion du personnel qui menaceraient leur santé et leur « dignité ».

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Le contenu du document dont l’existence a été révélée par le Corriere della Sera, le 12 mai, témoigne d’un malaise profond, les employés s’y plaignant d’être traités « comme des marchandises ». Ils font, en effet, état d’heures supplémentaires sous-rémunérées, du caractère tout à fait discrétionnaire qui préside à l’avancement des salariés ou encore d’un système d’assignation à résidence de fait en cas de maladie, les inspecteurs du Vatican pouvant effectuer à tout moment de la journée leurs visites de contrôle.

D’après le texte porté par 47 gardiens, un restaurateur et un employé de la librairie, des salariés ayant à charge des parents souffrant d’infirmités graves ont aussi été victimes de discrimination.

Conditions de sécurité dégradées

De plus, le Vatican réclame à ses employés le remboursement des salaires qu’ils ont perçus lors de la pandémie de Covid-19. Comme tous les autres lieux de culture, les musées étaient alors fermés et leurs dirigeants estiment désormais que les heures payées et non travaillées à l’époque sont dues à l’employeur.

La notification adressée aux autorités vaticanes met par ailleurs l’accent sur des conditions de sécurité dégradées qui feraient courir des risques aux employés et aux visiteurs. Avec une jauge journalière oscillant entre 25 000 et 30 000, bien trop élevée pour la structure, les musées ne disposeraient pas d’un nombre suffisant de sorties de secours ni d’une climatisation adéquate, tandis que les protocoles ne seraient pas suivis à la lettre par les équipes chargées des détecteurs de métaux situés à l’entrée.

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Dans leur lutte, les employés du Vatican sont assistés par une personnalité singulière de la scène italienne, l’avocate Laura Sgro. Faisant partie des rares professionnels accrédités au Saint-Siège, elle est habituée à la confrontation avec la hiérarchie ecclésiastique, même si les affaires qu’elle suit par ailleurs relèvent de mystères bien plus épais que ceux du droit du travail pontifical. Mme Sgro est, en effet, le conseil de la famille d’Emanuela Orlandi, une jeune citoyenne du Vatican âgée de 15 ans au moment de sa disparition dans des circonstances troubles en 1983 et jamais retrouvée depuis.

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