Alors que le secteur peine à recruter et que les cyberattaques se multiplient, l’école d’ingénieurs Epita a ouvert une nouvelle formation à la Défense, sur un site où se côtoient tous les acteurs du milieu.
Tous les partenaires sociaux rassemblés autour d’une table aux côtés d’une ministre, qui, au sortir d’une réunion ponctuée d’applaudissements, paraphent un même document. La scène ne s’est pas déroulée dans un univers parallèle dénué de débat autour de la réforme des retraites. Réunies sous l’égide de France 2023, qui orchestre la Coupe du monde de rugby dans le pays (du 8 septembre au 28 octobre), les organisations syndicales et patronales ont signé, mercredi 5 avril, la charte sociale du Mondial en présence de la ministre des sports, Amélie Oudéa-Castéra.
Il n’a pas fallu longtemps pour que le ton soit donné : « Je suis particulièrement satisfait d’être ici, car dans un moment un peu compliqué dans le pays, avoir un aspect de ce que peut produire notre intelligence collective est absolument indispensable », expose Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT. « En ce moment, on ne signe pas beaucoup de beaux projets… donc on est fiers d’avoir signé celui-ci », prolonge son homologue de la CFTC, Cyril Chabanier. Quelques heures plus tôt, sur le perron de Matignon, les deux mêmes déploraient « l’échec » de la rencontre entre l’intersyndicale et la première ministre, Elisabeth Borne, au sujet de la réforme des retraites.
Au-delà de quelques références – parfois piquantes – à l’actualité, tous ont insisté, dans la bien nommée Maison de la mutualité où se trouvent les bureaux du Groupement d’intérêt public (GIP) France 2023, sur l’élaboration collective de cette charte, qui prévoit « d’assurer l’exemplarité sociale » de l’organisation de la compétition. A commencer par la ministre des sports : « Notre pays a toujours été innovant dans le sport, et j’ai l’impression qu’avec la charte sociale signée par le Comité organisateur des Jeux olympiques [Cojo, en 2018] et celle de la Coupe du monde de rugby, on a un nouvel exemple de la vision française derrière ces grands événements sportifs internationaux », a assuré Mme Oudéa-Castéra.
Le contre-exemple du Mondial au Qatar
Quelques mois après la Coupe du monde de football au Qatar, entachée de controverses sur les droits des travailleurs l’ayant permise, et son coût environnemental, la ministre a insisté sur l’exemplarité attendue du comité organisateur français. « J’ai souvent dit, au sujet des polémiques liées à l’organisation de la Coupe du monde au Qatar, qu’on avait besoin d’inventer un nouveau modèle de grands événements sportifs internationaux », a-t-elle précisé au Monde, en marge de la réunion.
Un jour après que la candidature de la France à l’organisation de l’Euro 2025 féminin de football a été largement recalée par l’Union des associations européennes de football (UEFA) et alors que les souvenirs du fiasco de la finale de la Ligue des champions 2022 restent dans toutes les têtes, la ministre des sports a mis en exergue le modèle français : « Dans un passé récent, on n’a pas toujours été très bons. Là, on a cette Coupe du monde et puis les Jeux [olympiques et paralympiques], il faut qu’on excelle pour démontrer qu’il peut y avoir cette nouvelle référence dans les grands événements sportifs internationaux, respectueux de l’ordre social et des engagements écologiques, environnementaux et de durabilité. »
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Le Conseil constitutionnel focalise tous les regards et il aura rarement été autant au centre de l’attention qu’en cette période. Ce n’est guère surprenant, tant les crispations sur la réforme des retraites furent grandes, au Parlement et au-delà. De surcroît, la bataille ne fut pas que politique, mais aussi juridique, à travers la mobilisation originale et exceptionnelle de nombreux mécanismes constitutionnels. Ainsi, l’attente qui pèse sur la décision du Conseil est importante sur le plan politique et de la destinée de cette réforme, mais elle l’est tout autant sur le plan juridique, car, quoi qu’il décide, elle constituera un précédent.
Cette attente et cette attention confirment, à n’en point douter, que le Conseil constitutionnel se dresse comme un dernier rempart face aux atteintes à notre norme fondamentale et aux droits et libertés qu’elle garantit. Elles ne justifient pas pour autant les multiples spéculations ou autres critiques dont l’institution fait l’objet. Selon un usage que tout juriste serait sage de s’appliquer à lui-même afin de préserver l’indépendance de la justice, une décision de justice ne s’annonce pas, elle se commente.
Si les décryptages, analyses et critiques sont ainsi utiles et nécessaires, ils deviennent plus pertinents lorsqu’ils portent sur l’existant, donc la décision rendue, plutôt que sur ce qui pourrait l’être, à savoir la décision à rendre. Dans ce dernier cas, ils s’apparentent davantage à un plaidoyer, qu’il est plus judicieux de porter devant le juge lui-même que dans l’arène médiatique, car, en s’adressant au premier, on s’efforce de le convaincre, mais, en s’adressant à la société, c’est davantage de pression plutôt que de conviction dont il est question.
Accusation incantatoire
Or l’exigence d’indépendance et d’impartialité du juge ne saurait admettre de telles pressions. Cependant, il s’agit là d’une critique vive et récurrente qui est adressée au Conseil : son manque d’indépendance, son manque d’impartialité, sa politisation. On en voudrait pour preuve le mode de nomination de ses membres, leur absence de formation juridique, leur proximité avec le pouvoir, qu’ils ont parfois exercé. Si, à l’instar de toute institution, voire de tout mécanisme juridique, le Conseil constitutionnel est évidemment perfectible, il ne mérite pas un tel réquisitoire, qui relève davantage de l’accusation incantatoire que d’une motivation fondée et justifiée.
Il est vrai que l’on pourrait attendre d’une telle institution qu’elle soit composée d’un collège de membres dont les compétences sont exemplaires. Faut-il, pour autant, qu’elle ne soit composée que de juristes aguerris ? Si des connaissances en droit sont évidemment nécessaires pour juger de la constitutionnalité de la loi, elles peuvent utilement être complétées par des expertises en matière économique, fiscale, sociale ou politique.
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L’une des choses que l’on pourra retenir de Maxime Wagner, c’est l’image de cette famille aimante, serrée sur un banc dans la salle d’audience.Il avait six sœurs et deux filles de 9 et 2 ans.Le 5 avril, devant le tribunal correctionnel de Créteil, se tenait le procès de la société Dodin Campenon Bernard et deux de ses salariés, après la mort de cet intérimaire de 37 ans, sur un chantier du Grand Paris Express. Le procès avait déjà été renvoyé deux fois, en raison d’une convocation tardive des parties.
L’histoire remonte au 28 février 2020. Vers 20 heures, Maxime Wagner travaillait dans le tunnelier – une énorme machine pouvant atteindre 112 mètres de long capable de creuser le sol, d’évacuer la terre et de poser les parois du tunnel – du prolongement de la ligne 14, à Villejuif (Val-de-Marne). Alors qu’il s’employait à déboucher et nettoyer une conduite en métal, dont la partie finale est souple, celle-ci, du fait de la pression, est venue heurter violemment sa tête.
Admis à l’hôpital la Pitié-Salpêtrière, dans le 13e arrondissement de Paris, il est alors «inconscient et présente de multiples blessures au visage ainsi qu’un traumatisme crânien sévère », précise Nathalie Dell’Ominut, présidente du tribunal. A cette évocation, sa mère et sa sœur jumelle Julie ravalent difficilement leurs larmes. Il décède dans la nuit du 19 au 20 mars 2020,dans le silence du premier confinement qui vient de mettre la France à l’arrêt.
Au cœur des débats : une enquête réalisée par l’inspection du travail en mars 2020. Elle met en évidence plusieurs manquements : une conduite qui aurait dû être attachée, un défaut de formation et le non-respect du plan de sécurité et de protection de la santé (PPSPS), jugé « lacunaire » par l’inspection du travail, alors même que le « risque de fouettement de ce type d’engin est largement reconnu », dit la présidente. Dans la salle, les prévenus ne nient pas et baissent la tête.
« Notre société est à la pointe en matière de prévention »
S’il était bien mentionné dans le PPSPS que les ouvriers ne devaient pas se trouver à proximité de la zone où la conduite devient flexible, Maxime Wagner était pourtant, d’après le rapport de l’inspection du travail, tout proche de celle-ci, et encore pire, accroupi. « Comment s’est-il trouvé là ? Un ordre a bien été donné ? », demande la présidente. Aucune réponse ne sera apportée par les prévenus, qui contestent tous le délit qui leur est reprochéet affirment « avoir fait leur travail ».
Le directeur juridique de la société va encore plus loin : « Je suis désolé pour les familles qui cherchent des coupables, mais nous avons fait tout ce que nous pouvions ». « Notre société est à la pointe en matière de prévention », ajoute-t-il. Le responsable juridique perd de sa superbe quand la présidente lui rappelle que la société a déjà été condamnée dans un autre cas d’homicide involontaire, le 28 mai 2015.
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Les manifestations qui auront mis la France à l’arrêt en ce début d’année, Lorraine (la personne ayant souhaité conserver l’anonymat, le prénom a été changé) les aura surtout vécues devant son poste de télévision.
En CDD de six mois dans une grande maison d’édition, cette jeune Parisienne n’a pas tout de suite envisagé de s’associer au mouvement contre la réforme des retraites : « De toute manière, c’est foutu pour notre génération. » L’utilisation de l’article 49.3 par le gouvernement – « un déni de démocratie » – l’a finalement fait sympathiser avec le mouvement. Mais la jeune femme, qui espère décrocher un contrat stable chez son employeur actuel, n’a jamais envisagé de poser une journée de grève pour aller manifester en semaine à l’appel des syndicats : « Avec mon CDD, ce n’est pas envisageable. »
Dans les rangs des cortèges qui ont défilé dans les rues ces dernières semaines, combien de CDD ou d’intérimaires ont fait valoir leur droit de grève ? « On ne pourrait même pas dire, même si j’ai l’impression qu’il y a plus de mobilisation depuis le 49.3, avoue Mathieu Maréchal, responsable de la branche FO-Intérim. Les intérimaires ne me parlent pas de la réforme des retraites, ils me parlent d’injustice. Ils sont jeunes : pour eux, la retraite, c’est abstrait. »
« Un intérimaire, ça ferme sa gueule »
Même s’ils sont sympathisants du mouvement, les travailleurs précaires préfèrent faire profil bas par peur des représailles, dénoncent à l’unisson les représentants syndicaux interrogés. « Un intérimaire, ça ferme sa gueule, déclare sans ambages Etienne Jacqueau, délégué syndical central CFTC-intérim Manpower. Dans l’intérim, la relation est tellement déséquilibrée que ceux qui lèvent la tête se la font couper. »
A Vesoul (Haute-Saône), sur le site de Stellantis, une dizaine d’intérimaires qui ont fait grève pour dénoncer la réforme des retraites puis obtenir une prime de participation n’ont pas vu leur contrat renouvelé, selon la section CGT PSA Vesoul. « Avant leur débrayage, les intérimaires avaient reçu un SMS comme quoi Stellantis voulait renouveler leur contrat, fait valoir Cédric Fisher, délégué syndical. Le jour du débrayage, ceux qui n’avaient pas signé électroniquement leur contrat ont reçu un autre SMS comme quoi Stellantis voulait arrêter leur mission ! »La direction de Stellantis a démenti ces allégations, faisant valoir qu’une partie des intérimaires grévistes travaillait encore sur le site, rapporte France Bleu.
« C’est assez régulier que les intérimaires aient des problèmes quand ils font grève, admet un membre de la CGT Intérim, qui souhaite rester anonyme. Il est aussi difficile de toucher cette population : souvent, les intérimaires ne sont pas conscients de leurs droits. »
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Le livre. Dans les années 1930, la philosophe Simone Weil (1909-1943) décide de travailler en usine. Au fil de ses expériences dans différentes sociétés industrielles (Alsthom, Renault), elle mène une observation attentive du monde ouvrier. Face à la condition des salariés, elle explique : « Une seule chose rend supportable la monotonie, c’est une lumière d’éternité, c’est la beauté. »« Pour elle, le beau est émancipateur, c’est un besoin social », analyse le sociologue Jean-Philippe Bouilloud.
Quelle place occupe la beauté dans le travail, dans l’entreprise ? Quelle est sa fonction ? Pourquoi représente-t-elle une attente des collaborateurs ? Les organisations s’en saisissent-elles ? A travers son essai Pouvoir faire un beau travail (Erès), il part à la recherche de la beauté, de ses expressions, de ses finalités, dans les ateliers d’artisans, les open spaces des sociétés de services, les chaînes des industries.
Le menuisier qui réalise une belle pièce, le mécanicien qui règle à la perfection un moteur, le scientifique qui résout un problème… Le beau peut apparaître partout, explique l’auteur, que ce soit dans l’esthétisme d’une production, la précision du geste, la satisfaction d’un travail bien fait ou même dans la bienveillance qui, parfois, transparaît dans les relations professionnelles.
Si ce concept de beauté est peu évoqué, M. Bouilloud y voit pourtant l’une des motivations des travailleurs, aux côtés de « la recherche de revenu, de statut social ou de liens avec autrui. [Notre activité] est traversée de part en part par une autre dimension, celle de nos sensations et de l’esthétique », assure-t-il. Une dimension qu’il assimile à un acte de résistance qui se veut libérateur pour le travailleur. C’est en effet, aux yeux de l’auteur, une manière de s’opposer : « Le travail bien fait contre la course à la rentabilité ; la “belle ouvrage” contre la standardisation à bas prix, le beau geste comme acte critique de la part d’un manageur ou d’un dirigeant. »
Sens et valeur
Face à des conditions de travail que l’on déplore, le travail bien fait peut permettre de « s’affranchir de l’intérêt », parfois au mépris des règles. Ce peut être le cas du « soignant qui passe plus de temps que prévu avec un malade pour lui tenir brièvement compagnie », ou de « l’opératrice de plate-forme téléphonique qui résiste aux injonctions de sa hiérarchie pour vraiment résoudre le problème du client qu’elle a en ligne, ou pour lui vendre un service qui correspond vraiment à son intérêt ».
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Le 23 juillet 2008, une révision constitutionnelle majeure a voulu remédier, au moins en partie, à la critique lancinante du déséquilibre de nos institutions. Elle n’a pas empêché que la très impopulaire loi sur les retraites soit adoptée d’un coup de menton présidentiel, sans majorité parlementaire, ni soutien populaire. A observer ce résultat, on pourrait penser que la modification de la Constitution en 2008 fut vaine. Il n’en est rien. Nous avons assisté non pas à son échec, mais à sa violation, laquelle devrait être bientôt sanctionnée par le Conseil constitutionnel.
Depuis 2008, l’article 49 alinéa 3 ne peut plus être utilisé que pour les « projets de loi de finances ou de financement de la Sécurité sociale » et une fois par session parlementaire pour les autres textes. Depuis 2008, une procédure parlementaire accélérée est réservée aux « projets de loi de financement de la Sécurité sociale » (art. 47-1), afin que les objectifs de dépenses de l’année soient votés à temps. Si l’article 49.3 a pu être utilisé à propos de la loi sur les retraites et si le débat parlementaire a pu être à ce point tronqué, c’est seulement parce que la loi sur les retraites s’intitule « loi de financement rectificative de la Sécurité sociale pour 2023 ». Or, ce titre est un faux-semblant.
L’article 34 de la Constitution définit « les lois de financement de la Sécurité sociale » : elles « déterminent les conditions générales de son équilibre financier et, compte tenu de leurs prévisions de recettes, fixent ses objectifs de dépenses ». Le même article 34 fixe le domaine de la loi ordinaire : elle « détermine les principes fondamentaux (…) de la Sécurité sociale ». La distinction entre loi de financement et loi ordinaire est une distinction entre questions financières de l’année et principes fondamentaux. Celle-ci n’est pas toujours facile. Mais, en l’occurrence, elle existe.
Il apparaît clairement à tous, y compris au gouvernement, que l’actuel projet traite des principes fondamentaux du droit des retraites : il modifie l’âge de la retraite, supprime les régimes spéciaux, prévoit des dispositions qui ne seront applicables qu’à partir de 2030, vise à protéger les générations futures… Ce projet n’est pas une simple loi de financement pour 2023. Et ce, d’autant moins que la loi est une loi « rectificative » pour 2023. Prévue pour n’entrer en vigueur qu’à partir de septembre, elle n’a qu’un gros trimestre d’application sur l’année budgétaire qui, soi-disant, fait son objet.
Une manœuvre grossière
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« Personne ne m’a appelée, on n’a même pas eu les condoléances d’Eiffage ou de la Société du Grand Paris. Pas un mot. » Karine Michel a perdu son frère Franck le 7 mars 2023, sur l’un des chantiers de la ligne 16 du métro francilien, s’inscrivant dans le projet du Grand Paris Express (GPE).
Chauffeur de 58 ans, envoyé par son entreprise des Hautes-Vosges, mandatée par un fournisseur du groupement d’entreprises mené par Eiffage, il est décédé au Blanc-Mesnil (Seine-Saint-Denis) des suites d’un choc avec une charge lourde. « Alors qu’il rebâchait son camion après avoir déposé sa livraison, une personne qui n’était pas habilitée à le faire a utilisé un engin élévateur et la charge est tombée. Je n’ai pas envie que mon frère soit un fait divers de plus, que l’entreprise ne réagisse pas et qu’un jeune de 20 ans meure l’an prochain. »
Tandis que les accidents graves se comptent en dizaines (dix-huit depuis 2020 selon l’inspection du travail), le décès de Franck Michel est le quatrième sur les chantiers du GPE, lancés en 2016. Les très nombreux métiers présents sur ces chantiers colossaux cumulent pénibilité et risques. Ali Tolu, délégué syndical CGT et traceur chez Vinci, cite pêle-mêle les « problèmes de dos, de tendinite, le froid l’hiver, la chaleur l’été, la pollution, le stress des délais, le risque de chutes de hauteur, le travail le samedi, qu’on appelle maintenant “vendredi bis” tellement c’est fréquent d’y travailler ».
« Au moins un audit annuel par chantier »
Pourtant, la construction de 200 kilomètres de nouvelles lignes de métro, faisant travailler près de 8 000 personnes, se voulait exemplaire. « La sécurité de ces chantiers a été d’emblée une priorité, assure Bernard Cathelain, membre du directoire de la Société du Grand Paris (SGP), avec notamment une charte de sécurité, actualisée onze fois depuis 2016, que s’engagent à respecter toutes les parties prenantes, sous peine de pénalités. Il y a au moins un audit annuel par chantier, afin de faire remonter d’éventuels dysfonctionnements. »
Dès qu’il y a une situation dangereuse, le chantier est arrêté, selon la SGP. « Dès le lundi qui a suivi le décès de Franck Michel, de la part du groupe, il y a eu une obligation d’un quart d’heure sécurité, une causerie avec l’ensemble des salariés qui travaillent sur les différentes opérations, avec une minute de silence, décrit un délégué syndical chez Eiffage Construction. C’est largement insuffisant. »
Malgré les dispositifs de prévention, risques et accidents graves demeurent surtout en raison du modèle économique du secteur du BTP, qui a très largement recours à la sous-traitance en cascade et à l’intérim. Selon une analyse publiée en mars 2023 par la direction de l’animation, de la recherche, des études et des statistiques (Dares), le risque d’accidents du travail est plus important chez les sous-traitants et les établissements recourant à l’intérim.
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Le jour où Nicole Tsai a été licenciée de Google, elle s’est mise en scène sur TikTok. Larme à l’œil, sirotant son jus avec une paille, elle raconte le texto envoyé par sa hiérarchie. Vite, elle descend son escalier, se précipite sur son ordinateur pour en savoir plus, mais ses e-mails professionnels sont déjà bloqués. Nicole Tsai échange quelques mots avec ses collègues, puis décide d’aller se promener à Disneyland. « Je crois vraiment que lorsqu’une porte se ferme, une autre s’ouvre », conclut l’ancienne salariée de Google.
De fait, les perspectives des jeunes de la Silicon Valley sont toujours brillantes, à condition qu’ils acceptent de regarder ailleurs, au-delà de la Californie et des GAMA (Google, Amazon, Meta et Apple), les « Big Four » qui sont en train d’annoncer des milliers de suppressions de postes, et alimentent la liste des 330 000 emplois supprimés dans la tech dans le monde (majoritairement aux Etats-Unis) en 2022 et en 2023, recensés par le site spécialisé Layoffs.
Alex Ivkovic, directeur des systèmes d’information de CDF Corporation, un fabricant de conteneurs en plastique, se souvient encore avec dépit du mal qu’il a eu à trouver un programmeur informatique avec deux à trois ans d’expérience, un an plus tôt. « Personne n’était intéressé, personne ne voulait travailler en usine avec des machines. Ils veulent tous plancher à distance. » Le directeur a mis six mois pour trouver la perle rare.
Des candidats « plus ouverts »
Paul Toomey, fondateur de Geographic Solutions, une plate-forme de recherche d’emploi implantée en Floride (450 salariés) confie, lui aussi, avoir du mal à attirer les candidats pour les cinquante postes high-tech disponibles dans son groupe. « Ce n’est pas facile de concurrencer la Silicon Valley,dit-il. Les grands proposent beaucoup d’argent et, juste après la pandémie, ils embauchaient à distance dans tout le pays ! Il nous fallait plus de trois mois pour dénicher chacun de nos ingénieurs. »« Heureusement, reprend-il, cela va un peu mieux, les grands sont en train de réduire leurs effectifs. »
Et les ingénieurs logiciels, les designers, les experts en intelligence artificielle… élargissent leur horizon, au-delà de la Californie. Cinquante-six pour cent des intéressés retrouvent rapidement un autre emploi, souligne Sinem Buber, économiste de la plate-forme ZipRecruiter. Leur recherche dure en moyenne sept semaines, et les trois quarts d’entre eux choisissent parmi plusieurs offres, notamment dans d’autres secteurs que la Silicon Valley ; 6 % s’en vont dans le e-commerce, explique Mme Buber, 5 % optent pour la finance, 2 % préfèrent la santé.
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