Archive dans 2023

Dans les start-up françaises, l’euphorie des recrutements est terminée

Un robot de livraison autonome de colis de la start-up Twinswheel, le 23 novembre 2022, à Paris.

En consultant le site Layoffs.fyi, qui fait référence pour examiner l’étendue des licenciements dans le secteur de la technologie à l’échelle mondiale, on pourrait penser que la France a été très largement épargnée. Seulement une dizaine de compagnies hexagonales ayant tranché dans leurs effectifs sont répertoriées, pour un montant total de moins de 1 000 emplois.

En tête de liste arrive la start-up Meero, avec 350 suppressions de postes, soit 50 % de ses effectifs. Suivent Jellysmack et PayFit (près de 200 emplois chacune, 20 % des effectifs) et Back Market (moins de 100 emplois, 13 %). Le bilan est cependant incomplet et un peu plus sombre. N’apparaît pas, par exemple, le plan de départs volontaires annoncé par OpenClassrooms, lancé en avril et qui vise à réduire d’un quart ses équipes (environ 500 personnes).

Dans un rapport publié le 4 mai par Numeum, l’organisation professionnelle de l’écosystème numérique en France, donne des chiffres plus inquiétants. La dynamique du secteur connaît une inflexion notable en avril, avec un nombre de start-up qui créent des emplois en forte chute (– 69 %), alors que le nombre de celles qui licencient progresse (+ 50 %), observe-t-elle. Après trois mois consécutifs de créations nettes d’emplois, les jeunes pousses tricolores auraient supprimé plus de 3 600 postes en avril, pour aboutir à un total d’environ 274 000 salariés. Numeum rappelle toutefois que le volume des effectifs au sein de ces sociétés avait crû de 15 % en 2022.

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Un facteur explique en grande partie cette contraction du marché de l’emploi : les conditions de financement se sont compliquées ces derniers mois dans l’Hexagone pour les start-up, les obligeant à être plus regardantes sur leurs dépenses, notamment sur leur masse salariale. Selon le baromètre In Extenso Innovation Croissance/ESSEC Business School, le montant des levées de fonds a baissé de 57 % au premier trimestre 2023, par rapport à la même période de 2022. Pour certaines filières, comme la fintech ou les logiciels, le ralentissement est même encore plus brutal (respectivement – 83 % et – 86 %).

Davantage de rationalité

« Dans bon nombre de sociétés françaises de la tech, les réductions d’effectifs se sont faites à l’étranger, dans les pays qui sont ne sont plus considérés comme prometteurs à court terme », précise Franck Sebag, associé au sein du cabinet EY. Paul-François Fournier, directeur exécutif de Bpifrance, essaie de relativiser : « On n’est pas du tout dans un phénomène de la même ampleur qu’aux Etats-Unis, mais davantage dans un mécanisme d’ajustement. Pour les entrepreneurs, il s’agit d’allonger l’horizon de disponibilité du cash. » Selon lui, ce sont surtout les firmes en hypercroissance, ayant massivement embauché ces deux dernières années, qui sont concernées.

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« L’histoire des entreprises enseigne que rien n’est plus faux qu’un supposé processus de sélection darwinienne »

Malgré leurs conséquences néfastes sur des pans entiers de la société (chômage, destruction de richesses, tensions politiques et sociales, drames individuels…), les crises auraient une dimension positive de « sélection naturelle » en mettant à l’épreuve la solidité des entreprises pour permettre aux « meilleures » de poursuivre leur développement. Autrement dit, la dynamique du capitalisme sélectionnerait les « plus aptes » et les mieux « adaptées », condamnant les « moins méritantes » à disparaître.

Charles Darwin, dont L’Origine des espèces a paru en 1859, serait ainsi mobilisé par l’analyse économique ou historique pour expliquer l’évolution des entreprises et des systèmes économiques. A la fin du XIXe siècle, alors que l’économie néoclassique s’affirme comme base conceptuelle du libéralisme, Darwin apparaît comme une base scientifique utile pour « naturaliser » les lois du marché et démontrer la supériorité du capitalisme sur d’autres formes d’organisation économique.

Il fournit enfin une explication et des valeurs pour justifier le comportement et les modes de pensée des décideurs économiques. La rivalité et la hiérarchie entre individus seraient « naturelles ». La moralité des sentiments, la limitation de la responsabilité individuelle, l’irrationalité des affects sont « naturellement » encadrées par la nécessaire lutte pour les ressources et les clients. Il y aurait donc continuité, voire identité, entre les mécanismes naturels et les phénomènes sociaux et économiques.

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L’histoire des entreprises enseigne que rien n’est plus faux. Certes, la démographie des entreprises démontre que, en moyenne en France aujourd’hui, seules deux nouvelles entreprises sur cinq dépassent la cinquième année après leur création. Mais à l’inverse, mis à part quelques réussites extraordinaires et récentes (Apple, Microsoft, Tesla…), la plupart des grands groupes historiques survivent aux crises malgré des résultats économiques, technologiques ou financiers peu glorieux. Même pour certaines entreprises des nouvelles technologies (Amazon, etc.), les résultats se font attendre, et les marchés (ou les pouvoirs publics) acceptent ces pertes dans l’espoir d’un gain futur.

La pression des innovations

Pour la plupart des autres entreprises, la transition et la résilience face aux crises supposent de se transformer, ce qui peut être certes difficile. Lorsque les dirigeants ou les propriétaires acceptent de se remettre en cause, les adaptations nécessaires permettent de répondre aux nouveaux défis de l’environnement. Néanmoins, comme l’avait analysé l’historien américain des entreprises Alfred Chandler (1918-2007), ces périodes de transition peuvent être très longues, et supposent souvent un changement des dirigeants et des propriétaires, car ces derniers peuvent avoir du mal à prendre conscience des nouveaux défis et à établir un agenda stratégique et organisationnel.

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High-tech : les leçons d’une vague historique de suppressions d’emplois

Montage de logos d’entreprises high-tech américaines.

Lorsque Elon Musk a racheté Twitter, à l’automne 2022, pour 44 milliards de dollars (41,1 milliards d’euros, au cours actuel), il a payé le réseau social au moins deux fois trop cher. L’entreprise était en perte de vitesse et son nouveau patron accélérait son hémorragie publicitaire par ses prises de position libertariennes, voire complotistes. Il se montrait alors défiant envers ses salariés, jugés trop à gauche et incapables d’innover depuis des années. Alors il en a licencié quatre sur cinq.

Au printemps 2023, Twitter n’employait plus que 1 500 personnes, contre 8 000 lors de son rachat. Elon Musk a reconnu qu’il avait eu la main lourde. « A situations désespérées, mesures désespérées. Il n’y a aucun doute sur le fait que certaines des personnes que nous avons licenciées n’auraient probablement pas dû l’être, a expliqué le milliardaire sur la chaîne américaine CNBC, le 16 mai. Je pense que nous devons absolument embaucher des gens, et, s’ils ne sont pas trop furieux contre nous, probablement réembaucher certaines des personnes qui ont été licenciées. »

Ainsi, Twitter est devenu le symbole de la purge brutale conduite dans le secteur du high-tech aux Etats-Unis, mais aussi dans le monde. Une impressionnante masse de suppressions d’emplois effectuées en une dizaine de mois, une « charrette » mondiale sans précédent pour cette filière.

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Selon le site Layoffs.fyi, qui fait référence en accomplissant un travail de compilation des annonces de licenciements dans l’industrie de la haute technologie, 1 057 entreprises ont licencié 164 709 salariés au cours de l’année 2022. Le phénomène s’est accéléré en 2023. Fin mai, la barre des 200 000 pertes d’emplois a été franchie en tout juste cinq mois. Au 8 juin, toujours d’après cette source, 749 entreprises avaient annoncé la suppression de 202 299 postes pour cette année.

Le signal de la chute donné par Meta

Comment en est-on arrivé à ce niveau de diminution de la masse salariale ? Cette évolution des effectifs est le reflet d’une bulle née avec le Covid-19. Quand éclate la pandémie, début 2020, la panique gagne brièvement une économie à l’arrêt. Des entreprises victimes du confinement licencient, telles qu’Airbnb, Uber ou Booking.

Plus de 80 000 emplois sont supprimés cette année-là. Cependant, très rapidement, le monde confiné se transforme en monde numérique, avec un vif engouement pour l’application Zoom et les autres outils de visioconférence. Le consommateur – qu’il soit américain, européen ou asiatique – reste à domicile, mais les entreprises viennent à lui.

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A Toulouse, les salariés de la régie de transports en commun Tisséo poursuivent leur grève

Lors d’une grève intersyndicale des salariés de Tisséo, devant la mairie de Toulouse, dans le sud-ouest de la France, le 18 avril 2023.

Nouveau jeudi, et certainement vendredi, noir dans les transports toulousains. La majorité des bus n’a pas circulé, jeudi 8 juin, et les deux lignes de métro ne fonctionneront que jusqu’à 19 h 15, au lieu de 3 heures du matin. L’intersyndicale SUD-Solidaire, CGT, FNCR, et CFDT affiche sa cohésion face à la direction de Tisséo Voyageurs, qui « refuse de s’asseoir à la table des négociations », selon Richard Koch, élu SUD, syndicat majoritaire dans l’entreprise qui compte plus de 2 700 salariés, dont 1 400 conducteurs de bus et de trams.

Débuté en novembre 2022, le conflit porte sur le refus de la régie de maintenir une clause de sauvegarde qui permettait jusqu’alors d’indexer le salaire sur l’inflation officielle et qui, en 2022, avait permis une augmentation de 5,9 % sur l’année. A l’occasion des négociations annuelles obligatoires (NAO), elle proposait une hausse de 2,8 % effective en juillet et une deuxième hausse de 1 % en janvier 2024, si l’inflation était supérieure à 5 % en 2023.

Les syndicats réclament de leur côté une hausse des salaires équivalente à l’inflation, soit environ 6 %. La clause avait été accordée en 2015 à la suite d’un mouvement de grève et dans un contexte de faible inflation. Les blocages ont commencé le 11 avril lorsque plus de 500 salariés ont envahi le siège de Tisséo. Le 11 mai, pour la première fois depuis son inauguration en 1993, le métro, totalement automatique, était à l’arrêt toute la journée, occasionnant des bouchons monstres sur les rocades. Le téléphérique Téléo, mis en service en mai 2022 dans le sud de la ville, fonctionne pour sa part normalement.

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Plus de 1 million d’habitants concernés

Pour Serge Jop (Les Républicains, LR), maire de Saint-Orens-de-Gameville et président de Tisséo Voyageurs, « les augmentations de salaires sont de 12,6 % depuis 2021, ce qui est considérable, et supérieur à ce qui se fait au niveau national dans la branche transports ». L’élu affirme, par ailleurs, que « la clause de sauvegarde n’a aucun fondement légal. On ne méprise personne, ce sont les syndicats qui sont enfermés dans des revendications totalement exagérées ».

Le mouvement, suivi par 28 % des salariés selon la direction de Tisséo, touche plus de 1 million d’habitants sur l’agglomération et ses trente-sept communes adhérentes. M. Jop rappelle aussi qu’un conducteur de bus touche « 3 120 euros brut en début de carrière, et près de 4 000 euros en fin ». Pour l’intersyndicale, « cela ne suffit pas. On va continuer le mouvement, s’il le faut jusqu’à la Coupe du monde de rugby qui se tiendra à l’automne à Toulouse », affirme Benjamin Bordère, de la Fédération nationale des conducteurs routiers.

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La réforme du RSA grossira les rangs des demandeurs d’emploi

Olivier Dussopt, ministre du travail, en visite dans une agence Pôle emploi parisienne, le 27 juin 2022.

L’objectif est martelé depuis la campagne présidentielle. Emmanuel Macron souhaite atteindre le plein-emploi à l’horizon 2027. C’est dans cette quête d’un taux de chômage autour de 5 % de la population active – contre 7,1 % actuellement – que le gouvernement a déjà réformé l’assurance-chômage et les retraites. Le troisième levier qu’il enclenche est la réforme du revenu de solidarité active (RSA). Celle-ci fait partie du projet de loi « pour le plein-emploi » présenté, mercredi 7 juin, en conseil des ministres par le ministre du travail, Olivier Dussopt.

Le texte porte notamment la transformation du service public de l’emploi avec la création de France Travail, qui viendra remplacer Pôle emploi. Il prévoit que tous les demandeurs d’emploi, quelle que soit leur situation, soient inscrits à France Travail, notamment les 2 millions de bénéficiaires du RSA. Or, actuellement, seulement 40 % des allocataires sont enregistrés dans les fichiers de Pôle emploi. Cela signifie donc qu’environ 1,2 million de personnes supplémentaires pourraient venir grossir les rangs de France Travail. Une explosion du nombre de demandeurs d’emploi qui pourrait avoir des conséquences politiques non négligeables pour le gouvernement.

La réforme « augmentera automatiquement le nombre de demandeurs d’emploi inscrits auprès de Pôle emploi », a reconnu Olivier Dussopt, à l’issue de la présentation du projet de loi en conseil des ministres. Mais cela n’aura pas d’incidence sur les chiffres du chômage publiés chaque trimestre par l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), ceux « sur lesquels l’Etat communique depuis au moins vingt ans » et « qui n’ont pas grand-chose à voir en réalité avec le nombre de demandeurs d’emploi inscrits chez Pôle emploi », a précisé le ministre du travail.

Différentes définitions

« Le nombre de demandeurs d’emploi inscrits ne doit pas être confondu avec le nombre de chômeurs », complète de son côté le cabinet du haut-commissaire à l’emploi, Thibault Guilluy, pour déminer. Le taux de chômage est calculé sur la base d’un sondage réalisé à partir de la définition du Bureau international du travail (BIT), qui permet les comparaisons internationales. Un chômeur est une personne en âge de travailler, de 15 ans ou plus, qui n’a pas du tout travaillé – même pas une heure – durant une semaine de référence, qui est disponible pour prendre un emploi dans les quinze jours et qui doit avoir cherché activement un emploi dans le mois précédent. Une définition bien plus stricte que celle utilisée par Pôle emploi pour les demandeurs d’emploi.

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L’équipementier automobile Autoliv supprime 8 000 emplois, principalement en Europe

Dans une usine d’Autoliv à Chiré-en-Montreuil (Vienne), en 2005.

L’équipementier automobile suédo-américain Autoliv, numéro un mondial des airbags et des ceintures de sécurité, a annoncé, jeudi 8 juin, la suppression de 8 000 postes dans le monde, soit 11 % de ses effectifs totaux, afin de réduire ses coûts face à l’inflation.

Ces suppressions d’emploi vont concerner « particulièrement » l’Europe, où le groupe « a l’intention de fermer plusieurs sites », précise Autoliv dans un communiqué.

Les mesures seront appliquées dès 2023 et s’étaleront jusqu’en 2025, annonce l’entreprise. Autoliv n’a pas détaillé davantage où ces suppressions d’emplois auraient lieu.

En Europe, le groupe est très présent en Roumanie (10 500 personnes employées), mais a également une importante présence en Pologne (2 500), en Hongrie (2 000) et en France (2 000), selon une porte-parole. Il emploie également 3 000 personnes en Turquie. Hors d’Europe, les principaux sites sont implantés au Mexique (15 000 personnes employées), en Chine (9 000) et en Thaïlande (4 000).

« La réduction des effectifs impactera les personnes dans nos bureaux, nos centres techniques et nos usines, y compris les postes de direction à tous les niveaux », a expliqué Mikael Bratt, le PDG de l’équipementier.

Un chiffre d’affaires en augmentation, un bénéfice en chute

Le groupe explique être confronté au « défi » de la forte inflation, qui pèse sur ses coûts de production qu’il doit répercuter difficilement à ses clients, les constructeurs automobiles.

« Nous travaillons intensément avec nos clients pour obtenir des augmentations de prix, et nous ne nous arrêterons pas tant que nous n’aurons pas obtenu une compensation complète et juste », a souligné M. Bratt.

Au premier trimestre de 2023, le chiffre d’affaires d’Autoliv avait augmenté de 17 %, pour atteindre 2,5 milliards de dollars (2,33 milliards d’euros), mais son bénéfice net avait chuté de 11 %, pour s’établir à 74 millions de dollars. Jeudi matin, à la Bourse de Stockholm, l’action Autoliv gagnait 2,45 %, à 979 couronnes, dans un marché en légère hausse.

Le Monde avec AFP

En France, l’emploi salarié privé progresse au premier trimestre

L’emploi salarié privé a progressé de 0,4 % au premier trimestre, en France, avec 86 800 créations nettes d’emplois, selon l’estimation définitive publiée jeudi 8 juin par l’Institut national de la statistique et des études ­économiques (Insee). Cette estimation est deux fois plus forte que celle provisoire publiée le 5 mai.

Après + 0,2 % au trimestre précédent, il s’agit du neuvième trimestre d’affilée de hausse. L’emploi salarié privé excède son niveau d’avant la crise sanitaire, fin 2019, de 6,1 % (soit + 1,2 million d’emplois).

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés La dynamique de l’emploi ne s’est pas démentie en début d’année

L’emploi intérimaire se replie nettement

Dans le détail, l’intérim se replie nettement ce trimestre : − 2,2 % (soit − 18 100 emplois). Un recul qui efface intégralement la hausse des deux trimestres précédents. Le taux d’emploi intérimaire est inférieur de 2,2 % à son niveau du premier trimestre 2022 mais supérieur de 2,3 % à son niveau d’avant la crise.

Hors intérim, l’emploi industriel progresse de nouveau de 0,3 % (+ 8 200 emplois) après + 0,2 % au trimestre précédent. Il est supérieur de 1,2 % à son niveau un an auparavant et de 1,8 % à son niveau de fin 2019.

Dans la construction, l’emploi baisse de 0,1 % (soit − 1 500 emplois). Il s’agit du premier trimestre de baisse dans ce secteur depuis le quatrième trimestre 2016. Il dépasse toutefois de 0,4 % son niveau du premier trimestre 2022 et de 7,8 % son niveau de fin 2019.

Dans le secteur tertiaire marchand, l’emploi accélère : + 0,7 % après + 0,2 % (soit + 88 300 emplois après + 22 700). Il dépasse son niveau d’un an auparavant de 2,3 % (soit + 290 500 emplois) et celui d’avant-crise de 7,5 % (soit + 886 400 emplois).

Dans le tertiaire non marchand, il progresse également : + 0,2 % (soit + 15 200 emplois) après + 0,1 % au quatrième trimestre 2022.

Le Monde avec AFP

La dynamique de l’emploi ne s’est pas démentie en début d’année

La machine à recruter continue de tourner. Pour le neuvième trimestre consécutif, l’emploi salarié a poursuivi sa hausse au cours des trois premiers mois de 2023. L’économie française, qui n’a crû que faiblement (+ 0,2 % ) sur cette période, a malgré tout créé 92 400 postes (+0,3 %), contre 55 400 le trimestre précédent, selon les chiffres publiés jeudi 8 juin par l’Insee et la Dares.

En dépit de la succession des crises – sanitaire, énergétique, guerre en Ukraine, inflation – les entreprises ont embauché massivement dans l’Hexagone. Depuis fin 2019, l’économie française a créé 1,3 million de jobs au total, soit une hausse de 4,9 % des effectifs. Le succès de l’alternance joue un rôle important, puisqu’elle représente un tiers de ces créations. En revanche, l’Intérim est en net repli.

Sur le seul périmètre du secteur privé, la dynamique est encore plus remarquable : en hausse de 0,4 % au premier trimestre, soit 86 800 emplois créés, les effectifs totaux se situent 6,1 % au-dessus du niveau de 2019. Dans la fonction publique, la hausse atteint respectivement 0,1 % et 1,1 %.

Un chômage à 7,1 % en mai

Même lors de la dernière période faste – entre le printemps 2015 et le printemps 2018 – le rythme de création était bien plus faible, avec un total de 725 000 nouveaux postes.

Parallèlement, le chômage a atteint 7,1 % de la population active en mai, au plus bas depuis 1982. Une tendance qui permet à l’exécutif d’afficher son objectif d’atteindre le plein-emploi – ce qui correspond à un taux de chômage d’environ 5 % de la population active – d’ici 2027.

Tout, pourtant, pourrait ne pas se passer comme prévu. Le climat des affaires « commence à piquer du nez », observe Vladimir Passeron, chef du département de l’emploi et des revenus d’activité à l’Insee. Son indicateur a atteint en avril son niveau le plus bas depuis avril 2021. Quant à celui qui traduit les intentions de recrutement, il a nettement reculé depuis la fin 2022. « Quand on discute avec les chefs d’entreprise, ils affichent une certaine prudence sur leurs dépenses », confirme Denis Ferrand, directeur général chez Rexecode, pour qui « on a passé un point haut sur la dynamique ». Quelques secteurs, comme le commerce, traditionnellement un gros pourvoyeur de jobs, donnent d’ailleurs des signaux inquiétants entre dépôts de bilan, fermetures de magasin et réductions d’effectifs.

Chute de la productivité du travail

« Les entreprises vont devoir à terme redresser la productivité », explique l’économiste Eric Heyer, « d’autant que la croissance ralentit ». Car la dynamique du marché du travail sur la période récente s’est traduite par une nette chute de la productivité du travail. Si les effectifs avaient progressé sur la période 2019-2022 au même rythme que la valeur ajoutée produite, on compterait aujourd’hui un million d’emplois salariés en moins.

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Plein-emploi : les mesures du projet de loi pour élargir l’accompagnement des chômeurs

Au lendemain de la quatorzième journée de mobilisation contre la réforme des retraites, le gouvernement a clairement montré qu’il entrait dans une nouvelle séquence. Le ministre du travail, Olivier Dussopt, a présenté, mercredi 7 juin en conseil des ministres, le projet de loi « pour le plein-emploi ».

Après une réforme de l’assurance-chômage à l’automne 2022 qui a durci les règles d’indemnisation des chômeurs, ce texte doit permettre de poursuivre la baisse du chômage engagée depuis quelques années et atteindre l’objectif que s’est fixé le gouvernement : ramener le taux de chômage à 5 % en 2027. Cette fois, l’exécutif vise, avec ce texte – qui doit être examiné en première lecture au Sénat la première quinzaine de juillet –, les publics les plus éloignés de l’emploi.

Pour y parvenir, le gouvernement a décidé de réformer le service public de l’emploi et de l’insertion. Pôle emploi sera remplacé par une nouvelle entité, nommée France Travail, à partir du 1er janvier 2024. Il s’agit d’en faire le « guichet unique » d’entrée des demandeurs d’emploi, quel que soit leur profil. « Il ne s’agit pas de faire un big bang institutionnel mais de jouer collectif », a affirmé la première ministre, Elisabeth Borne.

Tous les acteurs de l’emploi (Pôle emploi, les collectivités locales, les missions locales) devront désormais fonctionner « en réseau » en partageant toutes les informations, afin d’améliorer l’accompagnement souvent défaillant de personnes en rupture avec le marché du travail, comme cela peut être le cas pour les bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA).

En janvier 2022, la Cour des comptes avait critiqué les mauvais résultats en matière de retour à l’emploi de ce dispositif, dont « seuls 34 % » des allocataires « sont sortis et sont en emploi » de façon stable « sept ans après leur entrée au RSA ». Et alors que seulement 40 % des allocataires sont actuellement inscrits à Pôle emploi, tous seront à l’avenir automatiquement enregistrés chez France Travail.

RSA : un contrat d’engagement réciproque

C’est dans ce cadre que sera mis en place un nouveau contrat d’engagement réciproque signé entre l’allocataire et l’opérateur qui le suit pour définir le niveau et le type d’accompagnement mis en place (formation, immersion en entreprise, ateliers, etc.). En revanche le quota d’heures n’est pas inscrit dans le projet de loi, alors qu’il avait été jusque-là question de quinze à vingt heures d’activité hebdomadaire. « Ce ne sera ni du travail gratuit ni du bénévolat obligatoire », répète Olivier Dussopt depuis des semaines.

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Dix ans après la promulgation de la loi relative à la sécurisation de l’emploi, le nombre de plans de sauvegarde de l’emploi a été divisé par deux

Politique de l’emploi

[La politique de l’emploi s’appuie sur des dispositifs créés au fil des besoins, qui restent parfois méconnus longtemps après leur création. Quelle est leur efficacité contre le chômage ? Elle n’est pas toujours évaluée. Le Monde publie une série d’articles sur les aides à l’emploi, pour tenter d’estimer ce qu’on en sait – leur objectif initial, leurs résultats.]

En 2013, la procédure d’encadrement des licenciements collectifs a été remaniée en profondeur par la loi relative à la sécurisation de l’emploi. Dix ans après sa promulgation, la Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) a présenté, jeudi 1er juin, à Paris, le bilan de cette évolution importante du périmètre législatif des plans sociaux – renommés « plans de sauvegarde de l’emploi (PSE) » par la loi de modernisation sociale de 2002. En une décennie, leur nombre n’a cessé de diminuer.

L’objectif du dispositif

Depuis la suppression, en 1986, de l’autorisation administrative de licenciement, et jusqu’en 2013, le « patronat critiquait la durée excessive des procédures de licenciement » dues à des « saisines systématiques » de la part des syndicats, a rappelé Olivier Dutheillet de Lamothe, avocat associé au cabinet CMS Francis Lefebvre, en introduction du colloque de la DGEFP. Adoptée après quatre mois de négociations avec les partenaires sociaux dans un contexte économique difficile, la loi relative à la sécurisation de l’emploi a donc cherché à encourager le dialogue social en redonnant à l’administration un rôle d’arbitre pour valider les PSE.

Son fonctionnement

Toute entreprise d’au moins cinquante salariés qui procède à un licenciement pour motif économique d’au moins dix salariés sur une période de trente jours, ou plus étendue dans quelques cas, est tenue d’élaborer un PSE.

La loi de 2013 incite l’employeur à négocier avec les syndicats un panel de mesures définies par un arrêté de 2014 pour limiter les licenciements et faciliter le retour à l’emploi : reclassements, actions de soutien à la création d’entreprise, formations, aménagement de la durée du travail, etc. Le PSE intègre notamment les critères d’ordre et le calendrier prévisionnel des licenciements, ainsi que le nombre de suppressions d’emploi et les catégories de salariés concernées. Les dispositions du plan de reclassement doivent donner la priorité aux salariés âgés ou qui auront des difficultés à retrouver un emploi.

Ce plan est soit négocié avec les syndicats, soit élaboré de façon unilatérale par l’employeur après information et consultation du comité social et économique. En cas d’accord avec les syndicats, il doit être signé par la majorité des représentants syndicaux de l’entreprise.

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